(LES ROCHES DE CHARTREUSE)
Ce sont des roches, en général encore meubles, qui se sont déposées à la surface du sol, dans des domaines émergés, à une date relativement récente, c'est-à-dire au cours de l'ère quaternaire.
En ce qui concerne ceux de ces terrains qui
sont présents dans nos massifs alpins, et notamment en
Chartreuse, on les classe en quatre grandes catégories
:
- les dépôts gravitaires (éboulis divers)
- les dépôts glaciaires
- les alluvions torrentielles
- les alluvions fluviatiles et lacustres.
Pour la constitution et l'organisation "stratonomique" de ces différents types de dépôts on trouvera des compléments à la page "dépôts quaternaires" |
a) Les éboulis
Ce sont certainement, parmi les terrains de couverture superficielle, ceux qui couvrent, en Chartreuse, les plus grandes surfaces. On peut en distinguer deux catégories (qui sont particulièrement faciles à distinguer l'une de l'autre dans les pentes occidentales des lances de Malissard) :
- Les éboulis anciens sont de
formation antérieure à la dernière glaciation,
dite de Würm (le vieil éboulement
du Sappey, à l'W de Proveysieux, a été
daté de plus de 400.000 ans). Ils formaient de vastes placages
dont la continuité est actuellement rompue par les entailles
des ravins (ce que l'on voit bien en rive droite du ravin
de la Gorgette, sous la dent de Crolles).
Ils sont souvent cimentés en "brèches de
pentes" par de la calcite déposée par les
eaux d'infiltration. Mais ceci se produit d'une façon tellement
capricieuse que l'érosion ultérieure y a aménagé
parfois, en entaillant ces éboulis, des grottes,
qui correspondent à l'effritement des zones les moins bien
cimentées.
- Les éboulis de formation récente (édifiés depuis la glaciation de Würm jusqu'à nos jours) sont meubles et instables. Ils tapissent le pied des falaises, où ils se superposent le plus souvent à des éboulis anciens (qui descendent plus bas), et garnissent, de plus, les flancs et/ou le fond des ravins qui entaillent ces derniers.
L'un comme l'autre de ces deux groupes de formations
ébouleuses ont pu se constituer selon deux processus (qui
se combinent en général) :
- celui de l'éboulement
accidentel, qui donne une nappe de gros blocs et laisse dans sa
falaise d'origine une crevasse
d'arrachement.
- celui de la fragmentation progressive de la roche des falaises,
sous l'effet du gel et dégel ("gélivation").
Cela en détache des fragments plus calibrés, décimétriques
à centimétriques, de taille variable selon les fluctuations
du climat, et aboutit à un litage grossier, parallèle
à la pente.
Elles ont principalement été abandonnés par les glaciers qui circulaient dans les vallées de la périphérie du massif au cours des quatre époques les plus récentes de glaciation (Günz, Mindel, Riss et enfin Würm).
Elles se caractérisent surtout par la présence de blocs de roches "exotiques", c'est à dire qui ne sont pas présentes dans le sous-sol du massif. Il s'agit souvent de roches qui proviennent des massifs cristallins (granites, gneiss, micaschistes). Ces alluvions glaciaires tapissent parfois les bas versants montagneux, notamment dans les basses vallées des deux Guiers, ainsi que dans la vallée des Entremonts : ce sont les restes de moraines de fond abandonnées par des langues des grands glaciers du Rhône et de l'Isère qui ont réussi à pénétrer dans le massif. A vrai dire cela ne s'est guère produit que dans les époques antérieures à celle du Würm car, à cette dernière époque de glaciation, la hauteur des glaces, plus faible, ne leur a permis de s'engager que par le nord (col du Granier) et seulement lors du maximum d'épaisseur du glacier de l'Isère.
On trouve aussi quelques rares arcs morainiques : ils sont situés au débouché de cirques ouverts vers le nord et ont été abandonnés à la fin du Würm par de petits glaciers locaux. Le plus bel exemple est celui du vallon de Malamille, au pied nord du Charmant Som.
Souvent les glaciers ont obturé du côté aval, sans les envahir, les vallons affluents de la vallée qu'ils occupaient. C'est le cas, par exemple, au Würmien pour les vallons qui débouchent sur la cluse de l'Isère (Chalais, Mont-Saint-Martin, Proveysieux, Narbonne, Le Sappey). Les alluvions fluviatiles locales amenées par les torrents s'y sont alors mélangées avec celles apportées par les glaciers en donnant des colmatages d'alluvions mixtes, fluvio-glaciaires (dites alors "d'obturation latérale"), dont la surface est en général faiblement inclinée.
c) Les "cônes de déjections"
Ce sont les nappes de matériaux épandues par les torrents aux débouchés de leurs gorges. Ils sont plutôt rares à l'intérieur même du massif, alors qu'à sa périphérie, notamment en Grésivaudan, il y en a un au débouché de chaque torrent dans la plaine (le plus beau est celui du Manival, au NE de Saint-Ismier).
d) Les alluvions
fluviatiles et/ou lacustres
Par contre on trouve dans les vallées intérieures du massif des alluvions fluviatiles (lits inclinés, formés alternativement de cailloutis à galets arrondis et de sables) ou lacustres (fines couches horizontales de limons). Elles se rencontrent jusqu'à des altitudes de l'ordre de 1000 m, de façon discontinue car elles ont été ré-entaillées par les rivières depuis que celles-ci les ont déposées. C'est notamment le cas de la terrasse alluviale de Saint-Pierre-de-Chartreuse et des fragments de dépôts lacustres visibles dans les gorges du Guiers Mort.
Affleurement de limons lacustres, dans les gorges du
Guiers Mort, 300 m en amont du pont Saint-Bruno.
on devine (surtout au sommet de l'affleurement) le fin litage
en "varves" horizontales. Ces dépôts argileux
et finement sableux sont "ravinés", en haut à
droite, par des cailloutis grossiers torrentiels.
Ces lambeaux alluviaux sont les témoins d'un ancien remplissage des vallées du Guiers Mort, du Guiers Vif et de leurs affluents par les matériaux qu'ils transportaient. Cela a été occasionné, à l'époque de Würm (dernière des glaciations du Quaternaire), par la présence des langues de glace qui contournaient alors le massif et occupaient notamment la dépression molassique de Saint-Laurent-du-Pont et des Échelles. Elles barraient, à leur débouché, du côté ouest les vallées issues du massif, et ce jusqu'à une altitude de 1100 à 1000 au plus fort de la dernière glaciation.