Mont-Saint-Martin

pentes de rive droite de l'Isère, entre Le Fontanil et les Rochers de Chalves

Le chef-lieu du village de Mont-Saint-Martin est suspendu au dessus des pentes boisées qui s'élèvent depuis le Fontanil en rive droite de la vallée de l'Isère. Il se situe à la partie basse du vallon, drainé le ruisseau du Lanfray, qui correspond à l'épanouissement vers l'ouest, en amont du village, de la combe monoclinale* de l'Hauterivien du flanc oriental de l'anticlinal de la Chartreuse occidentale (laquelle descend en aval vers le Roc Cornillon).

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Le site de Mont-Saint-Martin vu du nord-ouest, depuis le sommet des prairies du versant occidental du vallon (Espagne).
W3 = lambeau de moraine de Mont-Saint-Martin (stade 3 du retrait de Würm ). Au Pas du Sapey la mention "brèches" désigne le matériel de l'éboulement très ancien qui couronne la crête (voir aussi le cliché suivant).

La pente douce des prairies à substrat de matériel glaciaire qui occupent ce vallon est limitée au niveau du village par une rupture de pente que souligne une crête morainique. Cette dernière se termine vers le nord par la légére butte au revers oriental de laquelle est construit le chef-lieu. Cet accident de relief ne se prolonge pas sur la rive droite du ruisseau, qui contourne la butte du village en contrebas en se déviant passagèrement vers le NW : il y coule au pied de la pente qui porte les maisons des hameaux occidental de Collavières et d'Espagne, laquelle est au contraire très régulièrement inclinée vers le sud. Cela correspond au fait que celle-ci est une dalle structurale qui correspond au revers est du crêt des calcaires du Fontanil massifs qui limite le vallon du côté NW : elle a été dénudée par l'érosion des bancs de calcaires du Fontanil supérieurs (qui affleurent plus à l'est, à la Côte Charvet) sur toute sa hauteur, jusqu'à la cheminée de Mont-Saint-Martin.

La butte du chef-lieu, que contourne par le nord cette sinuosité du thalweg du ruisseau du Lanfray, montre le long de la route des affleurements de calcaires du Fontanil supérieurs. Mais ceux-ci appartiennent en réalité à un ancien paquet glissé résultant de l'arrachage et du glissement de ces bancs supérieurs des calcaires du Fontanil qui devaient originellement garnir la rive droite du ruisseau plus haut, à l'ouest de la Côte Charvet. En s'effondrant ce paquet rocheux est venu obturer l'ancien thalweg dont le tracé, plus rectiligne, passe en profondeur sous le village (voir plus loin les commentaires de la carte de détail).

 Du côté oriental la combe amont de Mont-Saint-Martin est dominée par le crêt urgonien qui court, depuis les Rochers de l'Église au sud, jusqu'aux Rochers de Chalves au nord, en passant par la crête du Petit Sappey. Le pied des falaises, vers le fond du vallon, au dessus du hameau ruiné de Combes, a été le site d'une exploitation ancienne (14° et 15° siècles) de Pierres à meules (voir l'article consacré à ce sujet dans la page "Rochers de Chalves").
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Le village de Mont-Saint-Martin, vu du sud.
La perspective fuyante de la combe monoclinale (ici vue d'enfilade) ne permet pas de bien voir la géométrie des strates. Ce cliché montre plutôt des traits de morphologie quaternaire :
L'alignement de points blancs souligne le tracé de la crête morainique du premier stade de retrait après le maximum de Würm (ce vallum latéral du glacier de l'Isère, au centre duquel se trouve le village, est maintenant crevé par le ravin du Lanfray, que l'on voit ici d'enfilade).
Les flèches rouges localisent les deux marges de la nappe des brèches d'éboulement ancien qui couronnent la crête du Sappey (voir la page "Chalves") : l'astérisque noir indique l'emplacement d'une vue de détail de ses affleurements. L'emplacement des anciennes "meulières" est indiqué par un astérisque rouge.
S apl. = vieille surface d'aplanissement (antérieure à l'éboulement du Sappey) ; c'est par un effet de perspective qu'elle paraît inclinée vers la gauche.
f.MSM = faille de Mont-Saint-Martin : masquée presque partout, en rive gauche du vallon, sous les terrains quaternaires elle doit passer sensiblement sous les maisons de Namière.


Les matériaux exploités étaient des blocs éboulés provenant de brèches quaternaires dont la présence est bien visible sur la crête, au Pas du Sappey : on observe là qu'ils s'appuient sur le bord sud d'une entaille, recoupant les bancs de l'Urgonien au nord du sommet 1300 des Rochers de l'Église : l'érosion antérieure à leur mise en place avait créé une large dépression de 2 km de large et de près de 200 mètres de profondeur dont le fond était constitué par la surface d'un banc situé à peu près à mi-hauteur de l'Urgonien inférieur. Elle le fait qu'elle ait été remplie par ces brèches témoigne de l'intervention d'un éboulement: ce dernier provenait nécessairement d'une crête urgonienne située à l'époque plus à l'ouest que l'actuelle (sans doute à l'aplomb de l'actuelle crête des calcaires du Fontanil du Pas de l'Âne).

Sur sa rive nord-occidentale la combe amont de Mont-Saint-Martin est d'autre part garnie, à partir du replat du village par un tapis d'alluvions glaciaires qui s'élèvent en pente assez régulière jusqu'à presque 1000 m d'altitude. Entre Collavière et Les Combes elles sont entaillées par le Lanfrey en une gorge qui en montre la constitution et témoigne de leur épaisseur par le fait qu'elle ne parvient pas à atteindre leur bedrock.
Cette forte épaisseur du colmatage du vallon par ce matériel est due à son barrage par le glacier wurmien de la vallée de l'Isère lors de son maximum d'épaisseur. Ce dernier a été constitué par la moraine et par la glace qui la soutenait, barrage qui est maintenant crevé par le ruisseau du Lanfray. Sa présence a interdit l'évacuation du matériel alluvial d'origine locale qui y parvenait mais laissait libre en amont un espace où la glace ne pouvait pas pénétrer. Il s'y est donc accumulé des alluvions fluvio-glaciaires d'obturation latérale
* mélangées, riches en matériel morainique mais aussi ébouleux local, que les eaux marginales du glacier ont épandues sans leur laisser la possibilité d'édifier des crêtes morainiques.
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Le Fontanil et le vallon de Mont-Saint-Martin vus de l'ouest - sud-ouest, depuis La Buffe.
W1, W2, W3 = moraines des stades de retrait wurmiens ; f.MS = faille de Mont-Saint-Martin ; f.F = faille du Fontanil. cFs + cFi = formation du Fontanil ; Be.mc + Bei = formation du Chevalon
Pour des commentaires complémentaires voir la page "Fontanil".
la mention "brèches" désigne celles dues à un éboulement ancien qui couronne la crête du Petit Sappey dans la large zone où son profil est déprimé par l'ablation de la majeure partie de l'Urgonien.
Sous la cheminée de Mont-Saint-Martin la ligne de tirets barbulés correspond à la crevasse par laquelle s'ébauche le tassement du Cuchet.

Sur le rebord ouest du vallon (voir cliché ci-dessus) le garnissage est d'épaisseur beaucoup plus modeste, voire pelliculaire, mais il s'y organise en laissant reconnaître deux lambeaux de crêtes de moraines : elles témoignent des niveaux atteints par la surface du glacier qui occupait la cluse de l'Isère, lors de son retrait à la fin de la glaciation de Würm.

- La crête la plus élevée soutient un vallonnement suspendu à l'altitude de 975 m (points cotés de la carte IGN) sur le versant sud-ouest de l'échine de Côte Charvet, qui fait saille au flanc ouest de la combe. Elle représente la crête morainique latérale abandonnée par le glacier au premier stade de son retrait après le maximum de la glaciation de Würm. On peut s'interroger pour savoir si l'encoche de la falaise des calcaires du Fontanil qui constitue la "cheminée de Mont-Saint-Martin" ne correspond pas à une entaille creusée par les eaux de fonte marginales lors de cet épisode.

- Au revers est de la Côte Charvet cette crête est prolongée, sensiblement selon une courbe de niveau de même altitude, par une rupture de pente brutale qui marque le sommet du colmatage morainique. Plus à l'est encore se développe, au dessus de cette ligne le replat des Combes, garni de prairies, qui correspond au sommet du colmatage du rentrant du vallon par les alluvions d'obturation latérale.

- Un second fragment de crête morainique abandonné à flanc de pente détermine, à 910 m d'altitude au nord-ouest du hameau d'Espagne, le petit vallonnement suspendu d'où part le sentier qui accède au passage de la "Cheminée". Son altitude amène à l'attribuer au stade 2 du retrait de Würm.

Carte de détail des environs de Mont-Saint-Martin
d'après les levés de terrain de M.GIDON

W1 , W2, W3 = crêtes morainiques destrois premiers stades de retrait de Würm.
La ligne barbulée violette suit le pied ouest de l'échine inférieure de Côte Charvet : elle correspond à la crevasse d'arrachement de l'éboulement qui a dénudé la dalle structurale d'Espagne. Les restes du matériel éboulé sont figurés par des v v v avec la mention "ébt"

Les hachures de couleur surchargent les pentes qui correspondent aux dalles structurales du sommet du membre des Bannettes, du Fontanil supérieur (brun), de la Rivoire (beige) et de celui du membre de Valetière (kaki), ces deux derniers constitutifs des calcaires du Fontanil inférieurs (voir la colonne stratigraphique à la page "calcaires du Fontanil").

Commentaires pour la partie sud à la page "Le Fontanil"


  En rive droite du Lanfrey la dalle structurale d'Espagne (formée par le sommet du membre de La Rivoire) a été débarrassée des couches de la formation des Bannettes, plus élevées, qui sont par contre restées en place plus haut dans le versant, à Côte Charvet et jusqu'au Pas de l'Âne. C'est vraisemblablement la conséquence d'un vaste éboulement résultant de l'arrachement, sur une largeur de 500 m, d'une tranche de ces couches, par l'effet initial d'un glissement couches sur couches (sa crevasse latérale d'arrachement correspond en fait au rebord occidental de l'échine boisée de Côte Charvet). On peut a priori s'interroger sur ce que sont devenus les produits de cet arrachement.

Or si les calcaires du Fontanil supérieur affleurent dans le lacet supérieur de la route au nord du village, les affleurements que la route traverse au lacet inférieur montrent que leur soubassement est formé de gros blocs disjoints (qu'il a d'ailleurs fallu maintenir en place à l'aide de multiples "épingles") : il ne s'agit donc pas de roche en place mais d'un paquet glissé recouvrant du matériel éboulé. Il y a donc toutes raisons de penser que ce paquet glissé est constitué par les matériaux arrachés du versant plus en amont en rive droite. De plus cet épais amas de blocs disloqués colmate apparemment un ancien thalweg dont le tracé devait passer, sans subir de déviation, sous l'emplacement actuel du village : en effet il faut aller très au SE du chef lieu, sous le hameau de Rivalière pour retrouver de véritables affleurements, bien stratifiées avec un pendage est, des couches des calcaires du Fontanil supérieurs.

D'autre part cet amas disloqué est conservé là dans une position un peu paradoxale (voire un peu instable ...) puisqu'il forme un ressaut dominant le versant (et non le remplissage d'un creux) : il faut que la masse en glissement ait été retenue là par blocage contre un obstacle. L'explication la plus plausible est que celui-ci était constitué par le glacier de la vallée de l'Isère : en effet les matériaux éboulés s'avèrent constituer l'extrémité nord du cordon morainique qui retient les alluvions du replat du village (son altitude porte à l'attribuer au stade 3 du retrait glaciaire). Ils conférent d'ailleurs là à cette moraine une constitution tellement rocheuse que les ruissellement de versant n'ont pas réussi à la déblayer, contrairement à ce qui s'est produit plus à l'ouest en rive droite du torrent de Lanfray. La dénudation de la dalle des calcaires du Fontanil de rive droite du Lanfray et la formation du replat du village de Mont-Saint-Martin ont donc dû se produire au cours de la dernière glaciation, à un stade où le glacier en retrait obturait encore la vallée jusqu'au niveau de Mont-Saint-Martin.

Le fait que la dalle dénudée d'Espagne supporte néanmoins un placage d'alluvions glaciaires wurmiennes (sans doute fort peu épaisses, d'ailleurs) s'explique sans doute par le fait que ce matériau a bavé vers le bas depuis les témoins conservés en haut de pente au dessus de l'altitude de 900 m, et a ainsi enduit la dalle calcaire.

 Un détail structural qui passe inaperçu dans le vallon du ruisseau du Lanfray en aval des Combes jusqu'au niveau du village, du fait de la couverture alluviale (moraine et éboulis), est que cette dernière est traversée en biais par la faille de Mont-Saint-Martin.

Par contre le rejet vertical de cette faille est bien mis en évidence, plus en amont, par le fait que les calcaires du Fontanil terminaux, qui affleurent en dalle structurale dans les pentes de Côte Charcet jusqu'au Pas de l'Âne sont surplombés du côté est par la barre de calcaires du Fontanil inférieurs qui forme l'échine du Grolier - Pas du Boeuf.

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Le vallon de Mont-Saint-Martin, devant les Rochers de Chalves, vus du sud - sud-ouest, depuis Les Engenières (route Sassenage - Engins, Vercors)
s.apl. = vieille surface d'aplanissement ; f.mSM = faille de Mont-Saint-Martin.
Les lambeaux les plus septentrionaux de la brèche d'éboulement du Petit Sappey (voir plus haut dans cette page) sont délimités de jaune.


f.MS = faille de Mont-Saint-Martin ; SP = synclinal de Proveysieux
légende des couleurs et des figurés

Cette faille se prolonge au nord du Pas de l'Âne, dans le versant ouest des Bannettes puis dans le ravin de la Roize et plus au nord, au pied de la Grande Sure. Son étude dans ces secteurs indique qu'elle a un caractère chevauchant mais que celui-ci n'a sans doute été acquis que secondairement, aux dépens d'une cassure originellement extensive.

Du côté méridional son tracé passe à l'est du Rocher Cornillon et son azimut, comme l'analogie entre ces structures, la font se prolonger en Vercors par le chevauchement de Sassenage.

 

 


carte géologique au 1/50.000° à consulter : feuille Grenoble
Carte géologique simplifiée (fond topographique d'après la carte IGN au 1/100.000°)

Bannettes

Chalves

Girieux
Chalais LOCALITÉS VOISINES Proveysieux

Chevalon

Le Fontanil

Saint-Egrève, R. de l'Église
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