Aperçu global sur le Quaternaire du Bas Dauphiné |
Deux aspects sont abordés dans cette page : la répartition des dépôts quaternaires et leur reconnaissance dans les paysages.
1/ Répartition des dépôts quaternaires (voir la page consacrée aux caractères distinctifs de ces dépôts)
Les dépôts quaternaires occupent de grandes surfaces dans le Bas Dauphiné car ils y tapissent la plupart des dépressions et y coiffent aussi certains reliefs. La plupart de ceux de ces dépôts qui ont une épaisseur importante (plus de quelques mètres) se sont accumulés lors des glaciations les plus récentes (dites "de Würm" et "de Riss"), époques où les vallées les plus proches des chaînons subalpins étaient envahies par des langues glaciaires provenant des crêtes intérieures de la chaîne alpine.
Carte d'ensemble des Alpes occidentales au maximum de Würm : le cadre noir situe la zone représentée sur la carte ci-dessous et le cadre rouge celle du Voironnais, que l'on trouvera plus bas dans cette page
figure plus
grande
Extension des glaces autour du massif de la Chartreuse,
au maximum d'extension de la dernière glaciation
Noter la rencontre des fronts glaciaires provenant du bassin de
l'Isère en passant par Grenoble (en bas) avec ceux qui ont difflué en passant par Chambéry pour occuper la vallée du Rhône
en aval du lac du Bourget (en haut).
Noter aussi que les animaux (ours des cavernes etc..), ainsi que nos
ancêtres Cro-Magnons pouvaient gambader dans les massifs
subalpins, car leurs hautes pentes n'étaient pas englacées.
Il faut pourtant noter que l'on avait alors affaire à des fleuves de glace qui s'avançaient dans des régions largement dégarnies de glace. En Chartreuse par exemple l'étude des pollens, datant de 30.000 à 10.000 ans, récoltés avec les squelettes d'ours des cavernes dans la grotte dite "Balme à Colon" (Chartreuse nord) témoigne de l'existence d'un couvert forestier pas très différent de l'actuel.
Concernant les dépôts témoins
des glaciations antérieures à celle du Würm il est à remarquer qu'il est très rare d'en trouver en arrière de la limite atteinte par le front du maximum
d'extension des glaciers de cette époque.
Cela résulte évidemment de ce que les dépôts
anté-würmiens ont été balayés
par l'avancée du glacier wurmien dans les dépressions
qu'il a envahies. Cela résulte d'autre part, de ce que,
sur les pentes, les dépôts situés au dessus
du niveau maximum de la glace würmienne ont été
en général balayés par les glissements de
terrain ou le ravinement des versants, pendant et après
l'interglaciaire Riss-Würm.
Des témoins subsistent en de rares points dont la situation
particulière a protégé les alluvions glaciaires
de ces effets. Il s'agit essentiellement d'éminences isolées
qui émergeaient tout juste des glaces lors du maximum de
Würm.
Plusieurs cas remarquables à cet égard sont décrits dans le site Geol-Alp. Citons celui de la moraine du Bois de l'Arbre, à l'ouest de Chirens, celui de la moraine du village de Grand Ratz, celui de la moraine du village de Grand Souillet, et celui de la moraine de la Montagne de Saint-Aupre.
On ne trouve cependant qu'une seule ligne de moraines, qui correspondent à la première oscillation de retrait de la glaciation de Riss : cela veut dire que le niveau atteint par le glacier rissien n'a dépassé celui du glacier würmien que dans l'intervalle de temps compris entre son maximum d'extension et le début de sa seconde oscillation de retrait.
2/ Formes de relief des dépôts quaternaires
Les dépôts associés à l'occupation de la région par les glaciers se reconnaissent en premier lieu par leurs caractéristiques sédimentologiques, c'est-à-dire le calibre et la disposition des éléments constitutifs de ces alluvions (voir la page "dépôts quaternaires"). Mais celles-ci ne sont observables que si l'on dispose de coupes (naturelles ou artificielles) ce qui ne fournit que des informations ponctuelles et plus ou moins espacées. C'est cependant à partir de telles observations dispersées que l'on est parvenu à associer à chaque type de dépôt des formes de relief qui le caractérisent.
On trouvera ci-après un bref inventaire des formes de relief qui sont communes en Bas Dauphiné et dont la reconnaissance a permis de reconstituer les péripéties des glaciations :
Il s'agit de formes que l'on peut dire proprement "glaciaires" car elles ont été essentiellement créées par la fonte de la glace. Leur constitution est le plus souvent celle classique pour un dépôt glaciaire, caractérisée par l'extrême hétérométrie du calibre et par l'absence de tri des éléments. Les eaux courantes n'ont en effet eu qu'un rôle très subordonné dans leur formation, mais ce rôle n'est pas toujours nul (étalement et remaniement des matériaux abandonnés à l'état brut par la fonte de la glace).
Crêtes de moraines :
Elles sont souvent très fraîches d'aspect. La hauteur
de la crête est de l'ordre de 10 m à 20 m au maximum
du côté externe. La dénivellation du côté
interne, en général plus forte, est très
variable : elle est fonction de l'importance et de la vitesse
du retrait qui a suivi le stationnement.
Banquettes de retrait glaciaire :
Ces banquettes révèlent une nature de matériaux
qui varie du fluvio-glaciaire au glaciaire franc.
Elles tapissent la partie interne des amphithéâtres
morainiques et correspondent à un épisode de recul
relativement régulier du glacier. Toutefois ce mouvement
n'a pas été nécessairement d'une parfaite
progressivité. De fait des ressauts en escalier y sont
communs : ils peuvent traduire soit des accélérations
du retrait après une pause soit une entaille par des eaux
de fonte, ce qui suppose un épisode de bref stationnement
(cette dernière origine est démontrée en
plusieurs points). Elles ont une inclinaison perpendiculaire au
front glaciaire (dans le cas du glacier isérois : vers
le sud) dont la pente varie de 10/1000 à 40/1000 et plus,
selon la pente du bedrock sur lequel s'appuie le front glaciaire.
Il s'agit de formes dans la construction desquelles le rôle des cours d'eaux est prédominant. Le matériel est le plus souvent riche en éléments apportés par le glacier mais son tri et son classement trahissent ce remaniement par les eaux.
- Terrasses fluviatiles :
Il est fondamental dans le principe (mais parfois difficile dans la pratique) d'en distinguer deux sortes :
1 - Les Terrasses construites :
Elles sont dues à l'épandage des matériaux
par les eaux de fonte, en bordure externe des moraines, lors des
épisodes de stationnement du front glaciaire (elles sont
donc à proprement parler "stadiaires").
Leur surface se caractérise par un excellent aplanissement
et une pente parallèle à celle de la marge glaciaire,
donc des crêtes morainiques. Celle-ci varie de 5/1000 à
10/1000 selon la proximité de la source des écoulements
(qui est en général une brèche de la crête
morainique). En coupe elles présentent souvent des caractéristiques
deltaïques.
On les trouve :
a) - immédiatement en marge externe des moraines, avec
lesquelles il y a raccord progressif des pentes. Le plus bel exemple
est celui de la terrasse de Petit
Voye (entre La Murette
et Apprieu)
b) - isolées à flanc de pente et ne se raccordant
avec aucune moraine : cela répond assez bien à la définition des "terrasses de kame", à ceci près que l'on admet en général que ces dernières, formés entre la montagne et le glacier, s'appuyaient directement sur ce dernier.
En fait cette même morphologie (dénué dee moraine) s'obtient aussi en cas d'érosion
ultérieure de la moraine. Elle est également réalisée dans les vallées latérales,
où l'obturation par la glace avait créé un
lac. C'est le cas dans la cuvette
de Voiron, où les eaux provenant du bassin de la Morge ont dû détruire la moraine en marge du glacier. Dans certains cas les dépôts peuvent être franchement deltaïques
et leur front d'accumulation ne pas avancer jusqu'à s'appuyer sur la glace : c'est ce que l'on voyait bien à Saint-Étienne-de-Crossey
avant que l'exploitation ait pratiquement tout détruit
de l'ancien delta du torrent issu des gorges.
2 - Les Terrasses d'ablation :
Les dépôts abandonnés dans les rives convexes
de méandres sont re-travaillés (érodés
et partiellement re-déposés à un niveau inférieur)
par la divagation des eaux, à l'occasion des baisses de
niveau de base des effluents glaciaires. De ce fait ils prennent
aussi une surface aplanie, bien que celle-ci résulte d'une
ablation. Toutefois cette surface est beaucoup moins plane que
celle des véritables terrasses, à tel titre que
l'on y voit souvent se dessiner des ressauts dont la courbure
est concentrique avec celle des rebords de terrasses qui les dominent.
D'autre part la couche alluviale fluviatile y est souvent mince
(1 à 2 m), recouvrant une surface entaillée dans
un matériau variable, bedrock (nombreux cas) ou matériel
morainique (terrasse des Brosses d'Apprieu).
Ces "terrasses de retrait" ont cependant, comme
les terrasses construites, une inclinaison générale
selon l'écoulement des eaux, donc parallèle à
la marge glaciaire (dans le cas du glacier isérois : vers
l'ouest), ce qui les distingue des banquettes glaciaires.
La distinction entre les deux sortes de terrasses fluviatiles
reste, dans divers cas, difficile ; elle est souvent plus étayée
par les coordinations chronologiques que par la pure analyse morphologique.
- Vallées mortes :
Il s'agit de vallées dont le calibre témoigne
du passage d'un cours d'eau important, alors qu'il n'y circule
actuellement que de minuscules ruisseaux, voire aucun cours d'eau.
On peut en distinguer plusieurs sortes selon leur orientation
par rapport aux lignes de crêtes morainiques :
1 - Les chenaux marginaux :
Les vallées mortes de ce type, les plus nombreuses, ont
un tracé grossièrement parallèle à
celui des moraines. Cela indique bien que ces chenaux se sont
creusés en contournant le front glaciaire et qu'ils sont
dus à l'évacuation d'eaux de fonte.
En fait ils se sont formés de deux façons. Certains
résultent de ce que les eaux ont suivi exactement la marge
externe des moraines parce que ces dernières étaient
serrées contre la pente ; ils sont alors garnis d'un fond
alluvionnaire contemporain de l'accumulation morainique et méritent
la notation "s", comme les terrasses construites (voir
les principes de notation).
D'autres se sont creusés, souvent plus à l'extérieur
de la marge morainique, d'abord par entaille dans les terrasses
stadiaires, à partir d'effluents s'échappant d'une
brèche maintenue ouverte dans une crête morainique,
lors des étapes de retrait ayant suivi sa construction
: ils méritent alors la notation "r", comme les
terrasses d'ablation.
Les collines
des abords occidentaux de la ville de Voiron montrent une
très belle série de telles vallées mortes
parallèles, étagées du sud au nord (des plus
récentes aux plus anciennes).
2 - Les chenaux radiaux.
Ils se caractérisent par leur disposition à peu
près perpendiculaire au front du glacier, orientation qu'ils
gardent sur une distance d'ordre kilométrique, avant de
rejoindre un chenal marginal, du côté externe de
la ligne de moraine.
Ce dispositif, surtout illustré, dans le Voironnais, aux
environs de Charnècles,
est lié à une dénivellation médiocre
entre les lignes morainiques successives, de sorte que les eaux
qui s'échappent des brèches de la moraine peuvent
facilement réutiliser le trajet qu'elles empruntaient déjà
au stade précédent (alors qu'elles ne peuvent pas
s'en frayer un nouveau entre les crêtes morainiques des
deux stades, parce que ceux-ci ne sont pas séparées
par une dépression marginale suffisamment profonde et continue).
Ils étaient considérés comme l'une des caractéristiques
de la surface marginale mais résultent en fait plutôt
de circonstances locales particulières.
3 - Les méandres fluviatiles suspendus
Ce sont d'anciens lits de cours d'eau, formant un sillon allongé
au pied d'un rebord d'érosion et en marge d'une terrasse
d'ablation. Ils ont été abandonnés par le
creusement d'un lit plus récent dont le tracé n'est
souvent pas parallèle et vient donc les recouper (cela
résulte du phénomène de migration des méandres).
Ils sont surtout représentés, dans le Voironnais,
sur les terrasses de retrait de La
Fure.
Concernant les dépôts morainiques et fluviatiles des environs de Voiron et du seuil de Rives, voir les publications n° 42, 44 et surtout 163.
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