Saint-Michel-les-Portes - La Bâtie |
Saint-Michel-les-Portes est l'une des localités qui jalonnent la limite occidentale du sillon subalpin du Trièves. Elle est située au débouché du torrent de la Grosse Eau, qui descend du vallon de la Bâtie et y draine les eaux du versant nord du Mont Aiguille. L'entaille que ce torrent a pratiqué dans la corniche tithonique fait décrire au dessin de cette dernière un rentrant vers l'ouest très accusé, qui occasionne aussi une importante incurvation aux tracés de la route nationale et de la voie ferrée.
Ce profond rentrant ne correspond qu'à un simple "V topographique"* pointant vers l'amont du versant : le lit du torrent n'y suit aucun tracé de faille et il est simplement orienté selon la pente moyenne générale du versant du rebord subalpin. Le village est bâti sur ses pentes de rive gauche où il s'appuie sur un épaulement qui est situé assez au dessus des pentes douces des Terres Noires du fond de vallon pour être constitué déjà par les calcaires argileux argoviens.
Sur la transversale de Saint-Michel-les-Portes le ravin de la Grosse Eau est traversé presque orthogonalement par un système de cassures importantes. On les repère d'ailleurs aisément sur sa rive droite (méridionale) par le décalage que subit la barre tithonique dans les abrupts de la Tête du Papavet. La principale est la faille de Jasneuf qui délimite plus au SW la face nord du Mont Aiguille et dont le rejet vertical est un surhaussement de sa lèvre NW. En rive opposée son tracé passe peu en amont du village de Saint-Michel-les-Portes car les marno-calcaires argoviens qui y affleurent le font en contrebas de Terres Noires dont la position plus élevée indique qu'elles appartiennent à sa lèvre occidentale.
En outre le col du Papavet correspond au passage de la faille de l'Eygaillette qui représente clairement une cassure satellite de celle du Jasneuf (le rocher de l'Eygaillette qui la jalonne à cet endroit est une navette* intercalée verticalement le long de sa surface de cassure). |
Le rentrant E-W du ravin de la Grosse Eau se termine 2 km à l'ouest du village en décrivant un brutal changement d'orientation : il se coude à 90° vers le sud pour rejoindre le vallon de la Bâtie en contournant par le sud la Tête du Papavet, c'est-à-dire par un tracé en baïonnette empruntant le ravin des Pellas. Pourtant le lit du torrent avait franchi la barre tithonique et même atteint les couches berriasiennes inférieures, dans lequel il n'aurait eu aucune peine à se poursuivre. Mais il bute là contre un mur tithonique, orienté N.20°, qui s'avère être un miroir d'une faille.
Cette faille de Chauplane n'est qu'une cassure mineure, mais qui a une forte empreinte sur le relief : en effet elle détermine vers le sud le tracé du ravin des Pellas et se prolonge vers le nord en dirigeant le lit du ruisseau de Chauplane : le Tithonique qui affleure en rive ouest de ce dernier est en effet surhaussé d'une centaine de mètres par rapport à celui qui forme le reste de la dalle du versant occidental du Baconnet.
Le large vallon de La Bâtie s'ouvre dans les couches de la lèvre occidentale de cette faille, dont le tracé se perd vers le sud dans les marnes valanginiennes avant d'atteindre la crête nord-orientale du Mont Aiguille. Cette dernière, qui ferme le vallon du côté sud-est, se poursuit vers le nord-est jusqu'à la Tête du Papavet, en séparant le vallon de la Bâtie de la dépression de Chichilianne. L'orientation SW-NE de cette crête, est tout-à-fait originale par rapport au relief général du rebord subalpin du Vercors. Elle résulte évidemment du rôle directeur qu'a dû avoir, sur l'érosion, la grande faille de décrochement du Jasneuf : avec sa satellite de l'Eygaillette, qui court parallèlement sur le versant opposé, elle délimite en effet une lame rocheuse large de près de 1 km dont l'abaissement relatif a permis au chicot urgonien du Mont Aiguille de subsister malgré l'érosion remontante des ravins de ses flancs.
Si ce vallon est drainé du côté oriental par le torrent des Pellas (qui se déverse dans celui de la Grosse Eau à la faveur de la faille de Chauplane), il se poursuit pourtant plus au nord, jusqu'au col de l'Allimas (qui le sépare du vallon de la Gresse) : il suit en effet les affleurements des marnes de Narbonne qui courent au pied de la crête du Grand Brisou. Mais ces derniers se rétrécissent aux approches de ce col car ils sont coupés en biseau par la grande faille de décrochement de la Queyrie.
Le tracé de cette dernière, également orienté SW-NE, suit précisément le pied du revers sud de la crête du Grand Brisou depuis le Pas des Bachassons jusqu'à celui du Serpaton. L'orientation SW-NE de cette crête, identique à celle du Mont Aiguille, confirme le rôle directeur majeur joué dans la formation du relief par les deux grandes cassures de décrochement qui traversent ce secteur de la marge orientale du Vercors.
En définitive le vallon de la Bâtie correspond à un compartiment intermédiaire entre les deux failles parallèles de Jasneuf au SE et de la Queyrie au NW, dont les surfaces de cassure indique, par leur pendage sub-vertical, qu'il s'agit de décrochements. Son déplacement relatif par rapport aux compartiments nord-occidental, du Grand Veymont et sud-oriental, du Mont Aiguille s'inscrit dans le cadre d'un coulissement général dextre qui est indiqué tant par le décalage du tracé de la corniche tithonique que par celui du rebord urgonien du plateau du Vercors.
Ce schéma, simplifié à l'extrême,
explique surtout à quoi correspond le
changement de pendage entre le Grand Veymont et le Mont Aiguille
: |
Or le décalage de la corniche tithonique par la faille de Jasneuf entre le Rocher du Baconnet et le sommet de l'Aubeyron s'avère au contraire être sénestre ce qui induit, en raison du pendage ouest des couches, un rejet vertical d'abaissement de sa lèvre SE que l'on observe à la Tête du Papavet et à Saint-Michel-les-Portes. On est donc conduit à admettre que ce compartiment de la Bâtie s'est déplacé plus fortement vers le SW que celui de Chichilianne. Peut-être cela résulte-t-il de ce que, à la différence de ce dernier il est encore affecté par l'anticlinal de la Moucherolle, ce qui l'a raccourci. |
cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuille La Chapelle en Vercors
Carte géologique très simplifiée du rebord sud-oriental du Vercors
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble
des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°",
par M. Gidon (1977), publication n° 074
légende
des couleurs
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(Grand Veymont) |
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