Aiguille du Fruit, Roc Merlet
entre les hauts vallons de Méribel et Courchevel

L'Aiguille du Fruit est le sommet le plus marquant du chaînon qui sépare les vallons de Méribel et de Courchevel en se terminant vers le nord par la crête de la Saulire et de la Croix de Verdon. Elle y appartient à la couverture briançonnaise "carbonatée" (Trias moyen à Éocène) de la zone houillère de Vanoise occidentale.

Sa succession stratigraphique se singularise toutefois un peu, par une lacune des dolomies ladiniennes et des couches du Trias supérieur : ceci la distingue quelque peu des autres unités à succession briançonnaise "classique".

Au sein de cet ensemble elle constitue une unité tectonique relativement indépendante du fait qu'elle présente un certain isolement tectonique. En effet du côté nord-occidentale la faille du col du Fruit, prolongement vers le nord de la faille de Gébroulaz du haut vallon du Doron des Allues, la juxtapose aux terrains paléozoïques de La Saulire. Elle est séparée des unités plus orientales (Roc de la Pêche) par la dépression de la Grande Val et ses larges affleurements de gypses et cargneules (en outre largement garnis d'alluvions quaternaires). Enfin, du côté méridional, elle est également séparée des couches triasiques du Mont Coua par la bande de cargneules qui détermine le vallon de Chanrouge.

image sensible au survol et au clic

Le chaînon de l'Aiguille du Fruit, vu du sud depuis le Col Rouge.
f.cF = faille du col du Fruit ; s.aF = synclinal couché de l'Aiguille du Fruit (vu pratiquement dans son axe).


Coupe transversale
aux chaînons du Roc de la Pêche et de l'Aiguille du Fruit (extrait de Debelmas et Desmons, 1997).
"F1" = faille du vallon des Vals ; "F2" = chevauchement du Rateau.
Observer le changement de polarité des couches de part et d'autre du talweg des Vals : dans le chaînon du Roc de la Pêche les couches plissées elles sont globalement à l'envers, alors que du côté ouest au contraire elles appartiennent au flanc inférieur du synclinal de l'Aiguille du Fruit et sont globalement à l'endroit (les replis indiqués le sont de façon seulement symbolique) : cela renforce l'interprétation selon laquelle le tracé de ce vallon est dirigé par une cassure importante.


Sa pyramide rocheuse, d'aspect plutôt rébarbatif, est presque entièrement formée par les calcaires et dolomies triasiques. Du côté occidental ces couches donnent de hauts abrupts car leur hauteur d'affleurements est accrue du fait qu'elles y dessinent la charnière d'un grand pli d'axe presque N-S.

image sensible au survol et au clic

L'aiguille du Fruit vue du nord, depuis la Saulire
La charnière du synclinal couché de l'Aiguille du Fruit (s.aF) se voit en coupe sur l'arête ouest (à droite) et sous forme d'une dalle structurale en rouleau sur l'arête nord-est ; f.cF = faille du col du Fruit : on voit qu'elle coupe le pli presque transversalement ; la Pointe Émilienne est un bloc de taille hectométrique déplacé en navette*, le long du plan de faille.

Ce pli s'avère être un synclinal couché ouvert vers l'est, car on voit du côté est qu'il s'ouvre en laissant affleurer un coeur formé de Jurassique et de Crétacé. C'est dans ces couches, relativement faciles à affouiller, que s'est creusée la dépression des Lacs Merlet (que tendent à envahir les glaciers rocheux formés par les éboulis de pied de falaise).

image sensible au survol et au clic
 
L'aiguille du Fruit vue rapprochée, de l'est, depuis les abords du refuge des lacs Merlet (en premier plan le lac Merlet oriental).
La dépression des lacs est logée dans les marbres chloriteux du cœur du synclinal couché de l'Aiguille du Fruit (s.aF), affouillés par l'érosion glaciaire (de la moraine couronne le verrou de retenue du lac).

En outre ces couches dessinent plus à l'est un anticlinal de la grande Val dont la voûte s'ennoie vers le sud sous les cargneules du Plan du Pètre. En fait ces dernières représentent l'extrémité méridionale des affleurements de La Dent de Villard et sont donc à rattacher à la nappe des gypses.

image sensible au survol et au clic

L'Aiguille du Fruit et la rive gauche du vallon de La Rosière, vus de l'est, depuis le sommet du Petit Mont Blanc.
n.G = nappe des gypses ; s.aF = synclinal de l'Aiguille du Fruit (c'est en son cœur qu'est logée la klippe de cargneules du Plan du Pêtre) ; a.gV = anticlinal de la Grande Val ; f.rM = faille du Roc Merlet.

Du côté oriental du Roc Merlet le bombement anticlinal de la montagne de La Grande Val forme les alpages du pied de versant. Son flanc oriental est toutefois tranché par une cassure N-S qui a dû déterminer le tracé du torrent de La Rosière, bien qu'elle y soit masquée sous les cargneules du fond de vallon : elle surhausse en effet, par rapport au Malm et au crétacé supérieur de ce bombement, les calcaires triasiques qui forment sur le versant opposé la voûte anticlinale de la Petite Val (voir la page "Portetta"). De plus elle les juxtapose, plus en amont, à la succession renversée de l'Aiguille du Rateau (voir la page "Roc de la Pêche" et la coupe en haut de la présente page).

image sensible au survol et au clic

L'extrémité septentrionale du chaînon de l'Aiguille du Fruit, vue du nord depuis le sommet de la Dent de Villard.
ØG = chevauchement de la "nappe des gypses" ; f.cF = faille du col du Fruit ; a.gV = anticlinal de la grande Val ; a.rM = anticlinal du Roc Mugnier.

Vers le nord, dès la latitude du Roc Merlet, ce bombement anticlinal disparaît de nouveau sous le large nappage des cargneules qui forment les alpages de Plan Mugnier et qui s'étendent à la latitude du col de La Platta, jusqu'au lit du ruisseau de la Rosière pour rejoindre le reste de la nappe des gypses au Mont Charvet (voir la page "Dent de Villard"). Il réapparaît plus au nord, dès le passage des Chapelets, pour former les échines du Mont Bel Air mais celles-ci sont constituées par son cœur de houiller car sa voûte y est alors fortement débarrassée de sa couverture calcaire, sans doute par l'effet du rabotage tectonique induit par la mise en place de cette nappe des gypses.

Du côté occidental cette bande cargneulique se prolonge vers le nord au delà d'Ariondaz, en formant l'échine allongée de la crête des Gravelles, pour passer sous Courchevel 1650 : finalement elle se termine au niveau de Courchevel 1560, pincée au sein du houiller et sans doute biseautée par l'extrémité septentrionale de la faille du Col du Fruit.

Elle y occupe toujours le coeur du synclinal de l'Aiguille du Fruit car c'est bien au flanc ouest de ce grand pli que se rattachent les replis de matériel carbonaté briançonnais de la crête de Plan Mugnier.

Par contre les affleurements du Roc Merlet sont dans une situation tectonique un peu énigmatique : en effet bien que constitués par des termes plus anciens (Trias calcaire) de l'unité de l'Aiguille du Fruit et franchement disposés en série renversée ils s'intercalent à l'est de ces derniers et reposent sur une intrication entre les cargneules et le flysch noir du cœur synclinal.

aperçu général sur la Vanoise

cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuilles Moûtiers et Modane


Carte géologique simplifiée des abords de l'Aiguille du Fruit

redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M. Gidon (1977), publication n° 074
plus au nord ;
plus à l'ouest < cartes voisines > plus à l'est
plus au sud
Autre découpage de la même carte, par coupures moins agrandies et couvrant des secteurs plus larges


Méribel

Courchevel

Dents de Portetta
Ménuires

LOCALITÉS VOISINES

Petit Mont-Blanc

Val Thorens

Mont Coua ; Gébroulaz

Roc de la Pêche
N.B. Les localités entre parenthèses appartiennent à une autre section du site et leur page s'ouvrira avec l'en-tête correspondant.

accueil section Vanoise

début de la page
Aiguille du Fruit

sommaire de GEOL_ALP

Aller à la page d'accueil du site
Dernières retouches apportées à cette page le 10/08/23