Les décrochements

ou "failles de coulissement" : exemples en Chartreuse
voir aussi : la notion de faille et les agencements de failles.

Ce sont, à la différence des autres types de failles, des déchirures le long desquelles les mouvements étaient des coulissements horizontaux (ou ne comportaient qu'un décalage vertical faible en regard du décalage horizontal).

Le mouvement est de sens dextre (ou "horaire") si le pivotement que subirait un objet pris dans le plan de cassure se fait, vu de dessus, dans le sens des aiguilles d'une montre (dit aussi sens "horaire") ; il est dit sénestre (ou "anti-horaire") dans le cas contraire

Les surfaces de cassures des failles de décrochement sont à peu près verticales. Leurs miroirs sont porteurs de stries ou cannelures horizontales (ce qui ne se voit que sur les vues rapprochées).

Le décrochement de l'Alpette, vu d'enfilade, depuis son extrémité occidentale à La Ruchère.

Sous cet angle la faille est vue d'enfilade, ce qui ne permet pas d'apprécier la valeur du décalage horizontal (le compartiment droit se déplace relativement vers l'avant). Par contre cela met en évidence l'attitude très verticale du plan de cassure.
Remarquer que la barre urgonienne de la Roche Veyrand, abaissée par la faille dans la gorge du Guiers Vif, se trouve dans le prolongement exact de la falaise des calcaires du Fontanil du socle de cette montagne, qui lui ressemble (cela avait fait croire aux anciens auteurs à un redoublement de l'Urgonien par chevauchement).
voir commentaires complémentaires sur ce dernier point.


 

  Vue plus rapprochée du décrochement de l'Alpette

depuis le roc du Pinet

 

sous cet angle la composante verticale du rejet est la plus apparente, mais ce n'est qu'un aspect accessoire de cette cassure, dont on voit bien le pendage subvertical.
version plus grande, sans commentaires, de cette image



 Les décrochement de l'Alpette et de l'Alpe, dans leur traversée des hauts plateaux orientaux de la Chartreuse, vus du NE (d'avion).

La gouttière du synclinal chartreux oriental héberge, à droite du centre du cliché, les prairies de l'Alpette (installées sur le Sénonien du coeur du pli). Elle est tranchée et décalée (aussi bien dans le sens vertical qu'horizontal) par des failles de décrochements. Le plateau déprimé de l'Alpette (partie centrale du cliché) est délimité par deux de ces cassures : le décrochement du col de l'Alpe le surhausse par rapport à la partie plus méridionale du synclinal ; au contraire il est abaissé, vis-à-vis du plateau du Granier, par le décrochement de l'Alpette (le décalage horizontal dû à ces failles est plus facile à apprécier sur une vue prise dans l'axe du synclinal).
En avant droit la dalle urgonienne du Granier, inclinée vers le Grésivaudan correspond au flanc ouest du synclinal (son flanc est étant enlevé par l'érosion qui a creusé le Grésivaudan) ; la gouttière du synclinal oriental se termine au fond à gauche, à la Dent de Crolles, où elle est tranchée par le Grésivaudan.


En Chartreuse les failles de décrochement sont presque toujours orientées NE-SW et le déplacement relatif des compartiments est alors dextre (c'est à dire que le compartiment SE est décalé vers le sud-ouest par rapport au compartiment NW). Pour chaque faille le déplacement approche de 3 km à la marge est du massif. Il décroît vers l'ouest, en même temps que le décalage total se "dilue" entre un nombre plus grand de fractures moins importantes, de sorte qu'aucun décrochement ne franchit le chevauchement le plus occidental.


 
 Les failles de décrochement du synclinal oriental de la Chartreuse (vu du N, d'avion)

Les traits blancs représentent les quatre tronçons successifs du synclinal oriental de la Chartreuse. Ils sont décalés dans le sens dextre par trois décrochements majeurs : d.A = décrochement de l'Alpette ; d.CA = décrochement du col de l'Alpe ; d.B = décrochement de Bellefond. On distingue aussi, à l'avant gauche, l'extrémité du décrochement secondaire des Pinchérins, qui traverse le plateau du Granier.
On complétera avantageusement cette vue par celle du même synclinal vu sous un angle plus oblique.


 
 La partie septentrionale du synclinal oriental de la Chartreuse, vue du sud, depuis les Lances de Malissard

On voit bien, sous cet angle, les décalages successifs de l'axe du synclinal par les décrochements du col de l'Alpe (DCA) et de l'Alpette (DA). Chacun est souligné par un abrupt regardant vers le sud, qui est dû au rejet vertical qui s'y ajoute au décalage horizontal.


Schéma montrant le décalage d'un niveau repère ployé en synclinal, à la suite d'un décrochement dextre.

(inspiré de l'Urgonien du synclinal oriental de la Chartreuse, notamment au niveau du col de Bellefond)
Les parties représentées en tirets sont celles susceptibles d'être enlevées par l'érosion lorsque cette dernière a rectifié l'alignement des falaises (c'est notamment le cas du rebord du Grésivaudan). On voit ainsi apparaître dans ces falaises des rejets verticaux qui sont différents (notamment de sens opposé) dans le flanc ouest (rvO) et dans le flanc est (rvE).
rh est le rejet horizontal., ASs l'axe synclinal dans le compartiment sud et ASn dans le compartiment nord.
(figure agrandissable).


Schéma montrant le rejet vertical (rv) induit par un décrochement dextre (A) et sa variabilité en fonction du pendage des couches (B).

(inspiré de l'Urgonien du flanc oriental de la Roche Veyrand).
Dans le cas B on parle souvent de faille "en touche de piano", car le rejet vertical croît de gauche à droite. Cette expression suggère, de façon erronée, que ce rejet résulterait d'un basculement, alors que, dans la majorité des cas, c'est en fait le résultat d'un décrochement.

La grande importance des décrochements, tant par leur nombre que par l'ampleur du décalage des plis qu'ils introduisent, est peut-être la singularité la plus marquante de la Chartreuse par rapport aux autres massifs subalpins, notamment à ses plus proches voisins, les Bauges et le Vercors.

L'existence de ces cassures montre que l'écrasement transversal du massif était compensé non seulement par un déplacement de matière vers le haut (plis et chevauchements) mais aussi, en partie, par un étirement horizontal N-S. Ce dernier est certainement en relation avec l'allongement généralisé de la chaîne qu'implique la courbure en arc de la chaîne alpine, et plus précisément avec le coude accentué dessiné par cet arc au niveau de Grenoble.

A propos des décrochements il faut parler de deux types de cassures qui en sont de proches parentes :

Les "failles de déchirure" sont des cassures coulissantes qui désolidarisent deux compartiment en cours de déformation, leur permettant de subir des déformations indépendantes, différentes dans leur dessin et dans leur ampleur (par exemple des plis plus ou moins serrés). Ces failles diffèrent en cela des véritables décrochements, qui tranchent et décalent des structures préformées (c'est même ce décalage qui permet les mettre en évidence) : ici il n'y a pas décalage mais dissemblance des structures de part et d'autre de la faille.

Les "rampes latérales", qui affectent certains chevauchements, sont des failles de coulissement le long desquelles l'un des compartiments de la tranche chevauchante avance plus que l'autre, à la façon de deux tiroirs situés côte à côte dont on aurait tiré en avant l'un plus que l'autre. Par l'intermédiaire des rampes latérales le mouvement de chevauchement est transféré d'une ligne de chevauchement à une autre (en retrait ou plus avancée).
Beaucoup de chevauchements se terminent ainsi par une rampe latérale qui sépare un compartiment chevauchant d'un secteur non affecté par le chevauchement. Le décrochement joue alors à la façon du flanc d'un tiroir dont le chevauchement constituerait le fond.
Le rôle des rampes latérales est donc celui de "failles transformantes", comparables à celles qui décalent le tracé des dorsales océaniques.
>>> De beaux exemples de telles structures sont donnés par le secteur de La Ruchère en Chartreuse (ainsi que celui de Saint-Martin en Vercors).

On constate souvent que les décrochements s'accompagnent de déformations par serrage qui se manifestent autour et au voisinage de la surface de fracture. Lorsque la part de ces effets de serrage est importante on parle de "décro-chevauchement" et l'on dit que la faille a joué en "trans-pression" (c'est même fréquent, en raison du fait que ces surfaces de cassures sont disposées obliquement par rapport à la direction de raccourcissement qui leur correspond). C'est en particulier le cas, en Chartreuse et en Vercors, en ce qui concerne la "faille de Voreppe".
On peut également observer des cas de jeu décrochant en "trans-tension", mais c'est plus exceptionnel.


Pour en savoir plus sur les décrochements en Chartreuse consulter la publication n°142

voir aussi microstructures des lèvres de faille
voir aussi microstructures des couloirs de faille

Failles   d'extension

Types de structures

  Failles de compression
voir aussi : la notion de faille et les agencements de failles.

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