Sources du Sierroz, Montagne de Lachat |
Entre le Revard et la Montagne de Bange s'étend une zone, transversale au chaînon bordier occidental des Bauges, où celui-ci subit un relatif abaissement et surtout un certain effacement de ses reliefs, de sorte que ce secteur, favorable au ski nordique, est parfois désigné du nom de "Plateau du Revard". Il est limité du côté sud-oriental par la longue échine boisée de la Montagne de Lachat dont le versant SE représente le versant occidental du vallon de Saint-François-de-Sales et du Noyer qui descend vers le NE depuis le col de Plainpalais jusqu'à Lescheraines.
A/ Au sud de Saint-Offenge l'escarpement du front des Bauges est couronné par une ligne continue de falaises qui rejoint la falaise de la Tour des Ébats, c'est-à-dire l'extrémité NE de la montagne du Revard au "col de la Clusaz" (sur le trajet de la D.913) (voir la page "Revard"). Formée par la barre des calcaires du Fontanil inférieurs cette barrière naturelle dessine un rentrant vers l'est qui est dû à l'entaille de la vallée supérieure du Sierroz : celle-ci y a ouvert une ébauche de cirque qui s'apparente aux "reculées"* du Jura en ceci que l'on débouche en amont dans un espace largement ouvert qui est presque un plateau.
Le front des Bauges au nord du Revard vu du sud-ouest, d'avion, depuis l'aplomb de Drumettaz. aS = anticlinal du Semnoz (noter l'obliquité de son axe, qui le fait passer en arrière-plan du col de la Cochette) ; f.T =faille du Trousset ; a.R = anticlinal du Revard ; f.R = faille du Revard ; ØB = chevauchement frontal des Bauges. (pour l'interprétation tectonique consulter les coupes ci-après dans la présente page) |
Au pied de la ligne de falaise, le relief du fond de ce cirque montre des pentes douces et mamelonnées, garnies d'alluvions glaciaires, qui trahit la nature molassique de son sous-sol : cela correspond au fait que le tracé du chevauchement frontal des Bauges y décrit un "V topographique" rentrant vers l'est et que le pendage de sa surface de faille n'y est que fort peu pentée (conformément d'ailleurs à ce que l'on observe plus au nord dans la coupe du Chéran).
Les pentes nord-orientales et sud-occidentales de ce cirque et le lit du cours supérieur du Sierroz donnent donc, autour du village des Combes, une coupe naturelle, transverse au front des Bauges, qui est assez parlante bien qu'elle soit malheureusement assez fortement masquée par le couvert forestier.
Au niveau des collines du fond du cirque des Combes le lit du torrent atteint la base tithonique de la lèvre supérieure, du chevauchement des Bauges. Il traverse même la surface de ce dernier jusqu' à atteindre la molasse du sillon périalpin, mais on ne peut y observer cet accident lui-même, qui reste caché sous les alluvions quaternaires du pied du versant.
Les pentes de ce versant montrent que la falaise des calcaires du Fontanil dessine un ample anticlinal qui se situe dans le prolongement axial de l'anticlinal du Revard et dont les couches de son flanc ouest ne montre que des pendages très modérés (ce qui n'incite pas à voir dans ce pli un crochon du chevauchement des Bauges). Il est à remarquer que le crêt du sommet de ce versant est constitué par les calcaires du Fontanil et que la corniche urgonienne est totalement absente, ces couches y ayant été enlevées jusque loin vers l'est par l'érosion qui y a ouvert la dépression des sources du Sierroz (voir plus loin). Au niveau de la voûte anticlinale (Les Pendants) on distingue même assez bien le chanfrein qui coupe le crêt du flanc oriental du pli et qui est un témoin de la surface d'aplanissement créée sans doute au quaternaire ancien
Cette ablation de la carapace urgonienne à la voûte de l'anticlinal relève du phénomène d'arasement des reliefs qui est intervenu lors d'un épisode ancien, sans doute plio-quaternaire, lequel s'avère général dans la partie occidentale des chaînes subalpines septentrionales (voir plus loin et lire la page spécialement consacrée à ce sujet). Son effet apparaît plus clairement en observant le rebord occidental de ce plateau depuis l'ouest. |
La falaise des calcaires du Fontanil inférieurs qui couronne le versant se montre en outre coupée par deux types de failles :
- La faille du Trousset prolonge vers le sud l'accident de ce nom qui affecte la partie ouest de la montagne de Bange et dont le tracé s'aligne assez bien, du côté sud, avec celui de la faille du Revard(voir cliché plus loin dans la présente page). Elle possède un caractère clairement compressif (c'est une "faille inverse"). Au niveau du Tithonique sa lèvre orientale est bordée par une charnière anticlinale que l'on peut considérer comme un simple crochon* ou comme le cœur du prolongement nord de l'anticlinal du Revard. - Plusieurs failles sub-verticales à rejet essentiellement extensif, dont la principale (faille de Montagny) détermine le col de La Cochette. Il s'avère, sur le versant oriental de la crête (voir plus loin dans cette page), que ce sont des cassures extensives conjuguées en réseau, les plus importantes presque E-W et les plus modestes NW-SE : elles ont été crées par la torsion à convexité est du flanc oriental du pli à cette latitude (voir plus loin dans la présente la page). |
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B/ La Montagne des sources du Sierroz (au sens alpagiste du Mot) s'étend à l'est de la ligne de falaises qui limite du côté oriental le cirque de Saint-Offenge, donc au NE du Revard. Ce vaste
espace d'alpages que draine la patte d'oie des ravines des sources du Sierroz est formé de pentes mamelonnées, incisées par les ruisseaux affluents du Sierroz et faiblement inclinées vers l'ouest . Elles sont sculptées dans les terrains argilo-calcaires essentiellement hauteriviens mais allant en fait depuis les calcaires du Fontanil supérieurs jusqu'à ceux du Barrémien inférieur inclus. Ces alpages s'étendent largement vers l'est, jusqu'à une bordure boisée constituée par le rebord supérieur des pentes qui tombent sur la vallon de Lescheraines - Plainpalais, lequel correspond à la partie basse des calcaires urgoniens, cette dernière ne formant là qu'une corniche extrêmement émoussée qui dessine un arc de cercle ouvert du côté ouest.
Les couches y sont à peu près horizontales, entre deux flexures qui accroissent leur pendage, la flexure synclinale des Ébats et la flexure anticlinal du Mont Lachat, situées respectivement à l'ouest et à l'est.
L'ouverture de cette zone d'alpages résulte d'un large décapage de la dalle urgonienne : celui-ci a vraisemblablement pour origine un épisode d'érosion qui ne tenait guère compte de la nature des roches : il est en particulier remarquable à cet égard que la corniche habituellement formée par les calcaires urgoniens y a presque totalement été gommée par cet aplanissement. Cette surface d'érosion ne fait très vraisemblablement que prolonger celle qui affecte l'Urgonien du revers est de la flexure de Lachat, datée de l'Éocène (voir plus loin). Mais ici la bien moindre résistance des roches ainsi mises à nu a permis que cette surface topographique éocène ait été ultérieurement remodelée
par les ravinements de l'érosion quaternaire récente.
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Les alpages de la Montagne du Sierroz se terminent en pointe sur la carte du côté septentrional : cette limite correspond au tracé de la faille de la Cochette, qui est la cassure conjuguée mineure de la faille majeure de Montagny (voir la page "Montagne de Bange").
Ls surfaces de ces deux cassures, assez proches de la verticale, se recoupent en délimitant un compartiment abaissé, ouvert à angle aigu qui pointe à peu près selon le N110 : cette orientation trahit un serrage E-W qui est compatible avec celui à l'origine du plissement de l'anticlinal du Revard au nord du col (crête occidentale de la Montagne de Bange) ainsi que de l'anticlinal du Semnoz, tous plis dont l'axe est précisément N25. Par contre cet azimut n'est guère compatible avec le serrage correspondant à la direction axiale N45 de l'anticlinal du Revard au sud de la vallée du Sierroz ainsi que de la flexure de Lachat. |
Au sud de la faille de Montagny le versant de la Montagne de Bange est simplement formé des couches urgoniennes qui pendent monoclinalement vers l'est, avec un pendage modéré, en formant la salle structurale du Bois de Prépoulain et supportent les affleurements tertiaires de Montagny.
Le rejet vertical apparent de cette cassure s'atténue d'est en ouest, au point de devenir presque imperceptible dans les falaises de calcaires du Fontanil du secteur occidental des Turres (voir plus haut) : ceci peut s'acommoder d'un décrochement dextre, si l'on tient compte de l'inflexion antiforme du pendage des couches mais peut également correspondre à un jeu en ciseaux avec charnière à l'ouest. |
C/ La dalle urgonienne du revers oriental de ces alpages culmine à la latitude de Lescheraines avec la bosse boisée de la Roche de Prépoulain. Elle est traversée en biais, à mi-distance entre Lescheraines et Saint-François-de-Sales, par une longue falaise urgonienne est-ouest qui regarde vers le sud. Cet escarpement est dû à une grande faille E-W, la faille de Prépoulain, dont la lèvre méridionale est assez fortement abaissée.
Pourtant on perd le tracé de cette cassure vers l'ouest, à la traversée des alpages avant d'atteindre la falaise des calcaires du Fontanil de leur rebord occidental (voir plus haut dans la présente page). On observe seulement dans ces falaises, environ100 m au nord des gorges du Ruisseau des Otalets et de la Rionde (affluent de rive droite du Sierroz), une faille qui ne dénivelle que d'une dizaine de mètres la falaise des calcaires du Fontanil. Mais elle semble avoir un tracé un peu trop méridional pour se connecter vers l'est avec la faille de Prépoulain. C'est plutôt la cassure qui franchit la falaise à l'aplomb du chalet inférieur des Turres (1121) qui semble être localisée correctement pour prolonger la faille de Prépoulain (voir la page Montagne de Bange). Quoi qu'il en soit aucune cassure affectant ces falaise n'a un rejet vertical comparable à celui de la falaise de Prépoulain. On peut penser que faille de Prépoulain est une faille extensive
(faille "normale") dont le rejet diminue d'est en ouest
("rejet en ciseaux"). |
Au sud de la faille de Prépoulain la surface de la dalle urgonienne s'infléchit, en azimut comme en pendage, pour constituer le flanc occidental de la vallée de Saint-François-de-Sales. Cette inflexion topographique correspond aussi à un accroissement progressif du pendage des couches de l'Urgonien, qui commencent à dessiner plus franchement la flexure anticlinale du Mont Lachat, au flanc est de laquelle les couches urgoniennes sont dénudées selon une dalle boisée qui accroît sa pente vers le bas.
En fait il s'agit plutôt de la dalle obtenue par le dégagement de surface de base du Tertiaire. Or, dans tout le secteur à l'est du Revard, jusqu'aux Déserts, cette surface de reprise de sédimentation n'est pas parallèle à celle des strates de l'Urgonien, qui ont un pendage plus fort et qu'elle coupe donc de plus en plus profondément, du bas en haut de la pente topographique (c'est-à-dire du SE vers le NW). Ce biseautage dû à l'érosion anté-nummulitique explique l'épaisseur anormalement faible qui est celle de l'Urgonien sous cette surface. Ce premier épisode d'érosion par aplanissement, sous un régime d'ailleurs karstique, s'est produit à l'Éocène et a arasé les voûtes anticlinales des plis (qui étaient donc déjà ébauchés à cette époque). Mais cette paléo-surface topographique a été tordue par l'accroissement ultérieur du plissement, à la différence de celle plus récente, du quaternaire ancien, d'ailleurs plus élevée (1550 au Revard et 1450 à la Crête ouest de Bange), qui est restée presque horizontale et en tous cas plane et oblique aux couches. |
En définitive, au sud de la terminaison de l'anticlinal du Semnoz (Montagny), la dalle urgonienne du flanc oriental de l'anticlinal du Revard, qui constitue alors le versant occidental du vallon de Saint-François-de-Sales entre Lescheraines et Plainpalais, présente une déformation sigmoïde qui aboutit à pivoter son azimut, en deux fois, de 25° au total dans le sens horaire. Chacune de ces deux inflexions de son azimut s'accompagne d'une fracturation de type coulissant-extensif (par des failles conjuguées délimitant des panneaux abaissés à l'intérieur de l'angle aigu de leur intersection) ; mais elles indiquent des directions de compression différentes, N110 à la latitude de Lescheraines, N130 à celle de Saint-François de Salles, ce qui indique deux étapes de compression dont les orientations sont celles des deux directions de plissement observables dans ce secteur. Le fait que cette torsion apparaisse, du côté nord, à la latitude même où le chevauchement du Margériaz prend apparemment naissance, joint à celui que le tracé de la surface de cassure de celui-ci ait précisément un azimut N45, identique à celui des plis au sud de cet endroit est significatif. Il porte à conclure que la direction azimutale "aberrante" de l'anticlinal du Revard est le résultat de l'avancée du chevauchement du Margériaz, lequel a dû "emboutir" horizontalement des plis d'orientation "banale" N20, antérieurs par conséquent (voir aussi, à ce sujet, la page "Aillon-Noyer). L'inventaire des plis des Bauges occidentales (carte ci-après) faite en outre apparaître que des ondulations dont l'azimut axial est également orienté NE-SE affectent aussi les chaînons situés à l'est du chevauchement du Margériaz : on peut se demander si cette déformation, tardive donc par rapport au plissement principal n'est pas une expression des déformations associées au soulèvement de Belledonne par le biais d'un serrage au cœur de son synclinal bordier occidental "de Serraval", dont l'orientation est assez voisine (voir la carte ci-après). |
Carte structurale schématique des Bauges occidentales Chevauchements : Ø B = chevauchement
frontal des Bauges ; ØM =
chevauchement du Margériaz ; ØV = chevauchement du Veyrier. |
Aperçu global sur les Bauges occidentales |
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(Aix-les -bains) |
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