Rocher du Corbeley, La Combe |
Le Rocher du Corbeley (1419 m) est le plus septentrional des sommets qui s'alignent, depuis le Guiers Vif jusqu'à la latitude de Chambéry le long du chaînon de l'Outheran. Ce dernier chaînon, bien que le plus occidental de la Chartreuse septentrionale, n'appartient pourtant pas, du point de vue tectonique, à la Chartreuse occidentale mais est armé par l'anticlinal médian de la Chartreuse (en effet le domaine chartreux occidental disparaît vers le nord à la latitude de Saint-Thibaud de Couz, en se fondant dans le synclinal de Couz).
Le sommet du Corbeley se fait remarquer par son isolement en un piton rocheux. L'Urgonien, d'ailleurs limité aux quelques dizaines de mètres de ses niveaux tout-à-fait inférieurs, n'y forme en effet qu'une étroite crête rocheuse longue de 400 m : c'est une typique "butte témoin" qui semble comme posée sur la molle échine boisée que détermine son substrat marneux hauterivien. En outre les couches n'y présentent qu'un pendage très faible vers l'est, ce qui correspond au fait que le Corbeley se situe du point de vue tectonique à la voûte même de l'anticlinal médian. Sa situation structurale est donc sensiblement la même que celle de l'Outheran méridional, dont il représente en somme le modèle réduit (voir la page "Outheran").
Le versant est du Corbeley, vu du sud-est, depuis les crêtes, entre le col des Fontanettes et le Mont Pellaz. Les prairies du col du Planet sont installées sur les calcaires du Fontanil supérieurs de la voûte de l'anticlinal médian : ces couches butent du côté est contre l'épaulement d'Urgonien du col lui-même, par la faille de La Combe (f.C), qui se connecte à la faille du Col du Mollard (f.cM) au sud du col du Planet. Les symboles de charnière désigne l'incurvation des couches par laquelle on passe de la voûte de l'anticlinal médian à son flanc oriental (la charnière occidentale du pli n'est pas visible ici, car elle se situe sur le versant opposé de la montagne). |
Ce large déblaiement de la carapace urgonienne cesse toutefois rapidement 1 km plus au nord du sommet : en effet à partir de la bosse 1268 jusqu'à la plaine, la dalle urgonienne garnit le reste de l'échine montagneuse aussi bien que son versant oriental (mais pas son versant occidental). On la retrouve également 200 m en contrebas est du sommet où elle arme le fort épaulement du Plan du Bouc (point 1298) et l'échine qui en descend jusqu'au col du Planet. Cette situation résulte de ce que la vôute du pli est abaissée par la faille de la Combe (voir en fin de page), sub-verticale et à peine oblique à l'axe anticlinal, qui passe à l'ouest de l'alignement de ces épaules rocheuses.
Cette faille extensive, à lèvre orientale abaissée, représente en fait la branche la plus septentrionale du faisceau de cassures associé à la grande faille du col du Mollard. Elle se suit vers le nord jusqu'à l'ultime extrémité des affleurements calcaires du chaînon (au nord du village de la Combe) ; au sud du col du Planet elle traverse les pentes orientales de l'échine nord de l'Outheran pour aller se raccorder, sous les éboulis du vallon des Fontanettes, à la faille principale aux abords du col du Mollard (voir la page "Col du mollard") : en fait on peut sans doute la considérer comme presque aussi importante que cette dernière, surtout au nord du col du Planet. |
Le col du Planet, qui sépare la montagne du Corbeley de celle de l'Outheran, se situe sur le tracé de cette faille de La Combe, mais le vallon des prairies du Planet ne saurait avoir été déterminé par cette cassure, puisqu'il est orthogonal à son tracé. Ce vallon traverse en pente douce les couches supérieures des calcaires du Fontanil de la voûte de l'anticlinal médian (remontées par la faille de La Combe), puis il se poursuit par le ravin de la Gorgeat, qui donne une coupe du flanc ouest de l'anticlinal : on y voit sans ambiguité qu'il n'y a aucune discontinuité tectonique séparant ses deux rives et que son origine n'est donc pas structurale.
À l'opposé, du côté oriental, le vallon du Planet ne se poursuit pas : il se termine de façon "aveugle" , suspendu au dessus du vallon de Lélia - Fontanettes. Cette configuration porte à penser qu'il s'agit d'une ébauche de cluse*, maintenant sèche, dont le creusement a du s'amorcer par l'arrivée d'eaux provenant de la fonte d'une langue glaciaire qui remplissait le vallon de Lélia : cette cluse a dû cesser de s'approfondir lorque le niveau de la glace s'est trop abaissé dans ce dernier vallon, pour que puisse se pousuivre cet apport d'eaux. |
Pourtant la profondeur de cette gorge est hors de proportion avec la taille du bassin hydrographique des abords du col du Planet, ce qui oblige à rechercher son origine dans le passage
d'un ancien cours d'eau maintenant disparu. Sans doute s'agit-il
d'un des émissaires des eaux de fonte du glacier qui occupait
la dépression de Saint-Cassin - Montagnole à l'époque
du maximum d'extension de la glaciation würmienne. En cela
l'origine du col du Planet apparaît comparable
à celle du col
de la Cluse, situé plus au sud sur le même chaînon
et dont l'altitude est un peu plus élevée.
Le versant occidental de la montagne, très boisé comme l'oriental, dessine globalement une échine bombée (Les Avignières, Le Sapeney) qui descend vers le nord jusqu'au village de La Combe : cette échine est l'ébauche d'un mont dérivé dessiné par les calcaires du Fontanil massifs du cœur de l'anticlinal médian. Elle est en effet bordée du côté est par un vallonnement, ouvert dans les niveaux supérieurs du Valanginien et de l'Hauterivien, qui longe le pied du crêt émoussé de la Bonne Allée (ce dernier correspond au bord supérieur de la dalle urgonienne du flanc oriental du pli).
Du coté ouest de cette échine ses pentes boisées sont coupées par une série de ressauts correspondant aux niveaux successifs plus ou moins résistants du flanc ouest, vertical, de l'anticlinal. Les derniers de ces escarpements, qui dominent directement le fond de la vallée de l'Hyère sont ceux de l'Urgonien. Leur pied est plus ou moins largement garni par une jupe d'éboulis anciens qui est activement exploitée : elle est profondément entaillée, voire totalement enlevée, dans les carrières des abords septentrionaux de Saint-Thibaud-de-Couz (on y observe le litage, parallèle au versant, caractéristique des "grèzes").
Les deux bandes d'affleurements de l'Urgonien qui encadrent l'échine se rejoignent en fait au nord de La Combe, fermant ainsi la combe hauterivienne dans laquelle ce village est logé : au nord de ce village l'Urgonien dessine une carapace quasi continue en forme de voûte (un "mont" typique) qui s'enfonce sous la plaine alluviale au nord de Saint-Cassin.
Toutefois celle-ci est accidentée par la faille de La Combe, dont le tracé sensiblement N-S introduit un décalage dextre des contours stratigraphiques. Cela est dû au fait que cette cassure abaisse en fait la moitié orientale de l'anticlinal, à l'Urgonien de laquelle appartient la butte des ruines de Saint-Claude. Un peu plus au nord, dans les gorges du torrent du Merdarel au nord-ouest de Saint-Cassin (voir cliché en haut de page), des couches oligocènes cachettent cette faille, ce qui montre qu'elle a, pour l'essentiel, fonctionné au cours de leur dépôt. Cette faille se connecte vers le sud à la faille du col du Mollard, dont le tracé passe en contrebas oriental de la butte du château Saint-Claude. |
En définitive l'échine de la montagne du Corbeley s'abaisse de plus en plus vers le nord, jusqu'à s'effacer, à l'est de Vimines, dans les collines du pourtour de la dépression alluviale de Chambéry (voir le premier cliché de la page). Ceci résulte d'un relief presque "conforme", qui suit à peu de chose près l'abaissement, depuis l'Outheran jusqu'à Saint-Cassin, de la voûte urgonienne de l'anticlinal de la Chartreuse médiane. Mais il faut observer que si le chaînon de l'Outheran finit par s'effacer à la latitude de Vimines et de Saint-Cassin ce n'est pas que le pli s'amortisse, puisque sa voûte urgonienne y est toujours bien dessinée : en fait il s'ennoie simplement là sous le remplissage miocène de la dépression synclinale du lac du Bourget.
De fait il semble bien que la voûte de ce pli médian de la Chartreuse se prolonge sous les molasses et le quaternaire et que c'est elle qui en resurgit, plus au nord, à Voglans. Là, en effet, le tracé de l'autoroute A41 se fraye un passage en entaille dans une carapace urgonienne dont les couches, presque horizontales, correspondent clairement à une voûte anticlinale. On peut même présumer que c'est le même pli qui resurgit de nouveau, au nord d'Aix, pour former la montagne du Corsuet et de la Chambotte. Si ce pli ne se manifeste plus dans le relief plus au nord c'est que cette formation, outre qu'elle affleure peu aux abords de son tracé, est constituée de molasses homogènes et plutôt tendres qui ne présentent pas de différenciations lithologiques résistantes susceptibles de traduire dans le relief le dessin du pli. Elle n'est d'autre part pas discordante sur le pli puisque l'on constate dans la vallée de Couz, son ploiement en synclinal entre les chaînons de la Chartreuse et du Mont du Chat. |
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Vallée de Couz |
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Corbeley |
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