Le col de la Cluse, le Désert d'Entremont |
Le village du Désert et ses hameaux se situent sur les pentes d'alpages les plus élevées du versant occidental de la vallée des Entremont, au pied des falaises du Mont Outheran.
Ces hauts alpages sont séparés du reste de la vallée des Entremonts par une barrière rocheuse boisée que franchit le torrent de La Chaume, qui les draine. Mais la nature de cette barrière est différente de part et d'autre : au sud il s'agit de la dalle des calcaires supérieurs du Sénonien, au flanc de laquelle la D.45 s'élève à flanc de versant entre les Curialets et le Désert ; au nord il s'agit au contraire des marno-calcaires du Berriasien moyen qui s'avancent sur les couches précédentes par le jeu du chevauchement de la Chartreuse orientale, lequel passe sous les alluvions du fond de ravin du torrent de La Chaume.
Le col de la Cluse, qu'emprunte la D45 entre Corbel et Entremont-le-Vieux s'ouvre à l'extrémité méridionale de ces alpages du Désert d'Entremont, au flanc oriental de la cime de la Cochette.
Le versant oriental de la cime de la Cochette et le col de La Cluse, vus de l'est, depuis l'aplomb du col de l'Alpette. a.M = anticlinal médian : noter le plongement axial vers la droite (c'est-à-dire vers le nord) de ce pli ; f.CM = faille du col du Mollard (elle est doublée, du côté est, par une faille plus modeste, de rejet opposé, ce qui délimite un petit graben* à remplissage de Sénonien) ; Ø3 = chevauchement de la Chartreuse orientale. (les symboles conventionnels habituels indiquent le sens de pendage des couches du flanc oriental de l'anticlinal médian). (pour la suite vers la droite voir la page "Outheran"). |
Le nom de ce point bas de la dalle urgonienne du flanc oriental de l'anticlinal de la Chartreuse médiane est justifié par le fait qu'il se situe à l'entrée amont d'une gorge sinueuse qui s'encaisse jusqu'à trancher toute l'épaisseur de l'Urgonien. Cette gorge, sinueuse mais orientée en moyenne selon une direction perpendiculaire à celle des couches, débouche en effet du côté ouest dans la combe anticlinale de Corbel .
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Du côté amont cette gorge s'ouvre brutalement sur la combe monoclinale des prairies des Bruyères (station de ski du Désert d'Entremont), ouverte dans le Sénonien du flanc oriental du pli.
Cette "cluse" est actuellement une vallée absolument morte, où il ne coule aucun cours d'eau, et ne correspond d'autre part à aucun accident tectonique (même si celle-ci a pu éventuellement réutiliser un réseau karstique effondré). Son origine ne peut effectivement être recherchée que dans une érosion fluviatile dont la source a maintenant disparu : en fait celle-ci ne peut guère correspondre qu'à d'anciens écoulements d'eaux de fonte de la langue du glacier isérois qui s'engageait dans la vallée des Entremonts par le col du Granier, à un stade où sa surface dépassait suffisamment le niveau de ce col pour qu'il puisse envoyer une langue diffluente dans la vallée des Entremont.
Cette hypothèse est très satisfaisante car elle explique aussi la présence, en amont nord-est du col, du replat de prairies des Bruyères qui s'étend depuis le débouché nord de la Cluse jusqu'aux maisons les plus basses de l'échine du village des Nantets (il se poursuit en fait au delà, jusqu'au hameau des Marots, dans le vallon qui s'élève vers le col du Mollard : voir la page "col du Mollard") : de fait ce replat est limité, du côté oriental, par une ligne de colline, allongée NW-SE, qui s'avère garnie par du matériel morainique (d'ailleurs essentiellement local) et rejoint vers le sud la colline rocheuse du col du Cucheron, cotée 1261. Cette crête représente les restes médiocres de la moraine latérale d'une langue glaciaire qui barrait alors le vallon du col du Mollard et qui est maintenant crevée, au niveau du village des Déserts, par le cours du torrent de La Chaume : il s'était donc formé là, en marge de cette moraine des Bruyères, une dépression latérale que les eaux de fonte, accrues de celles provenant des vallons latéraux de l'actuel Cozon et du col du Mollard, ont comblé. C'est la surface de ces "dépôts d'obturation", inclinée effectivement vers le col de La Cluse, qui forme le replat de prairies.
La crête morainique, allongée parallèlement à la direction d'ensemble du versant, se profile devant les pentes du versant oriental de la dépression des Entremonts (sommets du Granier sud et du Pinet) en masquant le fond de cette dépression, où se trouvait, au maximum de Würm, la langue glaciaire provenant, à gauche, du col du Granier. |
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Les maisons s'alignent en suivant la crête de la moraine et dominent la pente qui tombe sur la vallée d'Entremont, où se trouvait, au maximum de Würm, la langue glaciaire provenant, à gauche, du col du Granier. |
On peut envisager que cette moraine date de l'époque du maximum d'extension de la glaciation würmienne mais il est peut-être plus plausible qu'elle soit rissienne. En effet au Würm la surface du fleuve de glace isérois devait atteindre, au col du Granier, une cote de l'ordre de 1400 (voir la carte) et il paraît difficile que la langue glaciaire qui pénétrait par le col du Granier ait pu atteindre encore une cote de 1200 m, 5 km plus au sud-ouest, à la latitude du col de la Cluse. En ce qui concerne le col du Mollard, son altitude de 1320 fait qu'il a pu servir d'exutoire à des eaux de fonte provenant de la marge chambérienne du glacier wurmien qui s'écoulait vers le Lac du Bourget. Ces eaux ont donc d'abord dû contourner par l'ouest la moraine (rissienne ?) des Bruyères pour s'évacuer par le col de La Cluse. Mais il est très vraisemblable qu'elles ont très vite crevé cette moraine et creusé alors la gorge du petit ruisseau de La Chaume : cette circonstance paraît être seule capable d'expliquer la profondeur de cette gorge, car les écoulements actuels de ce ruisseau sont bien trop modestes pour en avoir été capables. |
C'est en contrebas (du côté glacier) de la moraine des Bruyères, sur les affleurements de Sénonien inférieur qui la supportent qu'est situé Le village même du Désert. Ces affleurements sénoniens descendent jusqu'au fond du ravin du ruisseau de La Chaume, mais la rive opposée (orientale) de ce ravin est formée de marno-calcaires du Berriasien moyen, appartenant au domaine de la Chartreuse orientale : lors du creusement de cette ravine ce ruisseau a donc été guidé par le tracé du chevauchement de la Chartreuse orientale.
Pour plus de détails sur ce secteur, voir l'excursion décrite au fascicule n°1J
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La Cochette | LOCALITÉS VOISINES | Entremont-le-Vieux |
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Col de La Cluse |
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