Dent de l'Ours, Crête du Cernay |
Le chaînon du Grand Som se prolonge assez longuement au nord du col du Fret et de celui de Bovinant, jusqu'à l'aplomb sud du village du Château du Gouvernement, en restant bordé tout du long par le vallon des Éparres, sur son côté ouest. Il consiste en une longue crête boisée mais très abrupte qui culmine en cours de route d'abord à la Dent de l'Ours (1820 m), puis à la crête du Cernay (rocher 1750).
Cette crête est constituée globalement par une large bande d'Urgonien dont les strates sont dans l'ensemble très redressées, même à la verticale dans une grande partie des abrupts de son versant ouest. Elle est limitée du côté ouest (comme, plus au sud, au Grand Som) par le chevauchement de la Chartreuse orientale qui la sectionne, à sa base, tout du long du vallon des Éparres (ce chevauchement se poursuit plus au nord jusqu'au Guiers Vif et au delà).
Il est assez difficile d'analyser dans le détail les contournements qu'y présente l'Urgonien, en raison de la mauvaise visibilité et de la difficulté d'accès de ces abrupts très boisés. Mais il apparaît en définitive que l'on retrouve, sur les transversales successives de la crête, un même enchaînement d'au moins deux plis : à l'ouest l'anticlinal de la Dent de l'Ours, suivi à l'est par le synclinal du Cernay.
On est porté à voir dans ces deux plis les prolongements septentrionaux du couple similaire formé par l'anticlinal et le synclinal du Grand Som : en effet il est aisé d'envisager qu'ils se correspondent au prix d'un simple décalage dans le sens dextre par le faisceau des décrochement de Bovinant. Toutefois la forme et l'attitude de ces plis sont assez différentes et surtout on voit clairement l'anticlinal du Grand Som s'amortir vers le nord au col de Bovinant., alors que l'anticlinal de la Dent de l'Ours est d’emblée un pli très vigoureux lorsqu'il apparaît au nord du décrochement de Bovinant. Plutôt qu'une continuité originelle il paraît donc plus vraisemblable qu'il y ait là un dispositif de relais dû à une contemporanéité de la formation de ces plis et du jeu (en déchirure) du décrochement qui les sépare. |
Ces plis sont difficiles à voir, hormis par des vues aériennes obliques. Cependant vers l'extrémité
nord de la crête du Cernay, un peu au sud du point coté 1529 (voir la situation au cliché ci-dessus),
la crête est ici orienté NE-SW. Son abrupt occidental tranche de ce fait la charnière de l'anticlinal
de la Dent de l'Ours, dont l'orientation est pratiquement N-S. Une ravine de ce versant ouest met même à nu le soubassement de l'Urgonien, montrant le cœur de l'anticlinal rompu par une cassure NW-SE extensive, la faille de la crête du Cernay.
Le ravin du versant ouest de la crête du Cernay a.dO = anticlinal de la Dent de l'Ours ; f.C = faille extensive de la crête du Cernay, d'orientation à peu près N-S, peu oblique à l'axe du pli. Il n'y a qu'en ce point que l'on voit apparaître, presque sur
cette crête, des terrains d'âge plus ancien que l'Urgonien. |
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À la Dent de l'Ours ce dispositif plissé est en outre tranché par plusieurs failles de décrochement secondaires dont la plus importante (faille de la Dent de l'Ours) détermine la brèche au nord du sommet : elles se rattachent en fait à la partie septentrionale du faisceau de failles de Bovinant (voir la carte de ce secteur), à commencer par la plus méridionale, qui détermine le col du Fret et son couloir "des cent lacets" au revers est de la crête.
Dans les abrupts occidentaux inférieurs de la Dent de l'Ours on observe d'autre part le redoublement de la barre de l'Urgonien supérieur par une cassure N-S à faible pendage vers l'est (la faille des Éparres). Son tracé semble pouvoir lui faire prolonger le chevauchement du Sangle de la crête nord du Grand Som. Pourtant il s'agit d'un accident très différent, car son rejet est de sens opposé, la lèvre supérieure étant en retrait vers l'est par rapport à à la lèvre inférieure : il s'agit vraisemblablement d'une ancienne faille extensive qui a été basculée avec le flanc ouest de l'anticlinal du Grand Som. |
Dans les abrupts du versant oriental du chaînon de la Dent de l'Ours l'Urgonien pend dans l'ensemble vers l'est, parfois en dalles structurales. Ces couches sont celles du flanc oriental de l'anticlinal de la Dent de l'Ours, séparé et décalé vers l'est par rapport à celui du Grand Som par les décrochements qui traversent la crête aux abords du col du Fret.
image sensible au survol et au clic |
Ce versant oriental est assez difficilement accessible et en outre très boisé, de sorte que sa structure n'est pas connue de façon parfaitement satisfaisante. En fait il se montre partagé entre une partie supérieure, laissant assez bien affleurer l'Urgonien (flanc oriental de l'anticlinal de la Dent de l'Ours), et une partie inférieure qui ne montre, en sous bois, que des affleurements de calcaires du Fontanil ; les variations de pendage de ces derniers montrent qu'ils représentent le flanc ouest de l'anticlinal de l'Écoutoux.
Mais entre les deux il ne semble pas y avoir assez de place pour que puisse s'y dessiner complètement, avec un flanc est complet, la charnière du synclinal du Cernay. Une ébauche incomplète de cette dernière s'observe cependant localement, notamment à la latitude du Villard en rive gauche du ravin du Rafour. Il faut aller jusque à l'extrémité septentrionale de la crête, dans les abrupts urgoniens qui tombent sur le village du château du Gouvernement, pour que ce pli s'observe clairement. Il est donc vraisemblable que la continuité des couches, entre synclinal du Cernay et anticlinal de l'Écoutoux, est rompue par un chevauchement du Cernay. Ce pourrait même être son prolongement de cet accident qui isole, au nord du Château du Gouvernement, la lame urgonienne qui s'intercale entre la surface de chevauchement et le reste de l'anticlinal frontal de la Chartreuse orientale (c'est-à-dire de l'anticlinal de l'Écoutoux). |
Par ailleurs les contreforts élevés de la crête du Cernay sont entaillés par deux grands ravins qui y ménagent de profondes entailles. La plus facile à observer est celle de la rive nord du ravin du Nant des Rey, qui aboutit 500 m au nord du pied du couloir qu'emprunte le sentier des cent lacets (lequel est déterminé par le décrochement du col du Fret). Cette coupe naturelle, orientée E-W, du flanc oriental de l'anticlinal du Grand Som montre deux détails notables :
- 1 - une cassure extensive N-S, que l'on peut appeler la faille de la crête du Cernay car elle traverse en un biseau aigu cette crête, entre le point coté 1593 et le point 1529, pour passer sur son versant ouest (voir plus haut).
Il est vraisemblable qu'il s'agit là d'une cassure ancienne, antérieure au plissement, de la même famille que celle qui passe à proximité du sommet du Grand Som (F1 sur le schéma) ; peut-être s'agit-il même du prolongement septentrional de cette dernière, décalé vers l'est par le faisceau de décrochements de Bovinant. |
- 2 - un repli secondaire assez remarquable qui affecte la partie basse de la masse inférieure urgonienne. Il s'agit d'un anticlinal anguleux, déversé vers l'ouest, qui présente la particularité notable de ne pas affecter les bancs formant le pied de la falaise. Ceci implique qu'il y a eu désolidarisation et glissement des bancs supérieurs, plissés par rapport à ceux, non déformés, du pied de falaise.
Ce pli doit donc être interprété comme un exemple de "pli de propagation", qualificatif que l'on attribue aux plis par lesquels s'effectue l'amortissement d'un chevauchement, au point extrême atteint par la propagation de la cassure. Ici la faille de chevauchement, notée F sur le schéma, s'est "propagée" d'est en ouest et la flèche du déplacement de la tranche supérieure est égale à la longueur du flanc ouest de l'anticlinal (dont le basculement a absorbé le mouvement). |
Le repli secondaire du versant oriental de la Dent de l'Ours, vu du sud, depuis le versant ouest du vallon des Aures (sentier des cent lacets). |
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crête des Éparres |
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Colleret |
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Dent de l'Ours |
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