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La Beaume, montagne d'Aureille |
Le versant occidental du col de Cabre est examiné aux pages "Beaurières" et "Valdrôme" |
Le col de Cabre permet de passer du bassin hydrographique de la Drôme à celui de la Durance. De ce côté là il se situe à la source du ruisseau de Chauranne dont le vallon descend vers l'est - sud-est par Saint-Pierre d'Argençon, pour déboucher dans la vallée du Grand Buëch à Aspremont (voir la page "La Piarre").
Cette combe anticlinale, ouverte dans des Terres Noires du coeur de l'anticlinal d'Aspremont, se termine sous le col de Cabre : là ce pli d'axe NNW-SSE (qui prolonge vers le NW l'anticlinal de Savournon) est brutalement tranché par l'extrémité méridionale d'un couloir de failles sub-verticales grossièrement N-S, l'accident de Bonneval. Cet accident constitue une frontière tectonique importante séparant les structures qui affleurent sur le bassin versant de la Durance de celles que l'on observe du côté de celui de la Drôme (voir page "Beaurières").
On peut donc considérer que le col de Cabre a une origine structurale, puisqu'il correspond à la rencontre de plusieurs accident tectoniques majeurs.
 Le vallon de la Beaume et le col de Cabre vus d'avion, depuis l'est. a.B = anticlinal de Beaurières (pli E-W) ; a.As = anticlinal d'Aspremont (pli NW-SE) ; acc.Bo = accident de Bonneval : vers la gauche (vers le sud) la poursuite de sa branche occidentale explique l'isolement du minuscule rocher de Tithonique du Banillon ; acc. Sav = accident de Savournon (extrémité septentrionale) : son tracé à droite du Serre des Aures est totalement hypothétique, car masqué sous les éboulis et la couverture végétale ; f.B = faille de la Beaume ; s.hB = synclinal de La Haute Beaume (diverticule NE-SW du synclinal de Montbrand) |
La cassure principale, occidentale, de l'accident de Bonneval passe peu à l'est du col. Elle tranche du côté ouest, jusqu'à son coeur d'Argovien, l'anticlinal E-W de Beaurières. C'est pourquoi son tracé se marque ici dans le paysage par un vallonnement N-S relativement étroit, ouvert dans ces couches, qui descend, parallèlement à la crête de partage des eaux, depuis la crête de Rigaud jusqu'à la route D 993 (en amont cette dernière gagne le col à flanc de talus dans les affleurements d'Argovien de la lèvre ouest de la cassure).
 Le versant oriental de la crête de partage des eaux entre Drôme et Durance, au nord-est du col de Cabre, vu du sud, depuis le dernier grand tournant saillant de la D 993 avant le col de Cabre. ac.Bo = accident de Bonneval (branche occidentale) ; sa branche orientale passe derrière la crête de Coste Auriolle. |
Au sud de ce point les conditions d'affleurement font que le
tracé de l'accident de Bonneval devient difficile à
suivre. Mais il apparaît néanmoins que sa faille principale se poursuit encore, selon la
direction N-S (qui est la sienne au nord), jusqu'au col de Carabès (voir la page Valdrôme), quoique en perdant progressivement beaucoup de son importance.
La branche orientale de l'accident de Bonneval se raccorde, selon toute vraisemblance, au faisceau de cassures longitudinales de l'"accident de Savournon" que l'on suit jusque là dans le flanc ouest de l'anticlinal d'Aspremont et dont le tracé court à flanc de versant en rive droite de la vallée de Saint-Pierre d'Argençon (voir le premier cliché de la présente page et la carte structurale).
Le village de La Beaume est construit en rive nord-orientale du vallon du ruisseau de Chauranne, 3 km à l'est du col de Cabre, au débouché d'un ravin qui entaille le versant sud-occidental de la Montagne d'Aureille. Celle-ci est un mont* jurassien formé par la dénudation de la carapace tithonique d'un anticlinal d'Aureille dont l'axe est orienté SW-NE et dont la charnière, déversée vers le SE, est à peine crevée par l'érosion.
Cet anticlinal n'est en fait qu'un repli qui prend naissance, dans les pentes au sud de Montbrand, aux dépens du flanc NW de l'anticlinal de Faucon - La Rochette.
 La montagne d'Aureille, vue du NE, depuis l'aplomb de Montbrand. f.B = faille de La Beaume ; a.A = anticlinal d'Aureille ; f.F = faille transversale de Fourane. Le Tithonique de la voûte anticlinale (presque horizontale) a été crevé par l'érosion, qui y a ouvert une "boutonnière" où le Séquanien affleure largement. |
Au village de La Beaume le mont formé par ce pli se termine brutalement en tombant sur le val, pratiquement orthogonal, du ruisseau de Chauranne, qui suit l'anticlinal d'Aspremont. Cela correspond au fait que l'anticlinal d'Aureille y est tranché par la faille de la Beaume, cassure qui présente des caractères assez particuliers.
L'entaille du ravin qui débouche montre en premier lieu que la voûte de sa charnière est affectée à ce niveau par un curieux rebroussement en sens inverse du déversement du pli principal ; le redressement à la verticale de cette partie tordue de la charnière est à l'origine du dessin assez remarquable qu'y montre de la barre tithonique au dessus du village.
 La gorge débouchant au village de la Beaume vue du sud-ouest depuis le fond de vallée (de la route D.993) f.B = faille de la Beaume ; a.A = anticlinal d'Aureille; c.r. = charnière de rebroussement vers le NW (tracé du plan axial). |
D'autre part le flanc SE du pli se tord ici dans le sens horaire, pour devenir E-W ; il se complique même d'un repli synclinal en rive droite (ouest) de la gorge (voir le cliché suivant).
Le tracé de la faille de la Beaume tourne de le même manière, en sens horaire, pour devenir SE-NW à l'ouest du village, où la cassure prend le caractère d'un chevauchement redoublant le Tithonique (c'est donc une faille compressive résultant d'un serrage presque N-S).
Enfin le tracé de cette faille se poursuit plus au nord jusqu'à se raccorder au faiscau de cassures de l'accident de Bonneval (voir le second cliché de la page).
 Le village de la Baume et la gorge du vallon de la Haute Beaume, vus d'avion, depuis l'est f.B = faille de la Beaume Les replis dessinés par la barre tithonique sont clairement analysables sous cet angle. Ils ne peuvent pas être interprétés comme des crochons ni comme des plis d'entraînement liés à la faille de la Beaume (le rejet vertical de celle-ci est un soulèvement de sa lèvre gauche, méridionale). Pourtant la localisation de ces plis, en bordure de la faille, leur taille modeste, qui en fait des accidents visiblement liés à une cause locale, et leur axe sensiblement parallèle à la surface de cassure, tout ceci incite à penser que leur formation est en rapport avec cette faille. En définitive il faut sans doute envisager que la faille soit antérieure aux plis et que ceux-ci résultent d'un froissement contre le plan de faille lors d'une compression tardive (phénomène dit du "plissotement par ancrage sur faille") |
Ces particularités s'associent au fait que, entre le col de Cabre et le village de La Beaume, la combe de l'anticlinal d'Aspremont est beaucoup plus rétrécie (environ moitié moins) que plus en aval, aux abords de Saint-Pierre d'Argençon. En fait il apparaît assez clairement que ce rétrécissement est dû au jeu de la faille de la Beaume. En effet le tracé d'ensemble de cette cassure décrit un arc concave vers le nord, centré autour de la Haute Beaume, et délimite un bloc triangulaire, saillant vers le sud (voir la carte ci-après) : en raison du jeu compressif de la faille ce panneau rocheux a dû s'avancer en poinçon* dans le flanc nord-oriental de l'anticlinal d'Aspremont.
On s'explique en définitive assez bien l'origine des replis du Tithonique de la Beaume dès lors que l'on prend en compte cette situation tectonique particulière. Le village se trouve en effet à la proue sud de ce poinçon : lors de son avancée horizontale vers le sud-ouest il s'est embouti dans les Terres Noires du coeur de l'anticlinal d'Aspremont. Malgré la déformabilité de ces dernières cela n'a pu se faire sans résistance, et c'est sans doute ce qui a provoqué l'écrasement de la pointe de ce poinçon rocheux (d'où les replis) et le rebroussement de la partie haute de la charnière de l'anticlinal d'Aureille.
On remarquera que cet ensemble de dispositions a eu pour résultat d'absorber une grande partie de la composante dextre du jeu de l'accident de Bonneval, ce qui explique que sa seule branche ouest se poursuive vers le sud et que le rejet de cette dernière y soit en outre bien atténué.
Carte géologique très simplifiée
des environs du col de Cabre
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble
des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°",
par M.Gidon (1977), publication n° 074
contexte régional de 
ce fragment de carte
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