Passo della Gardetta, Pianezza, Fonda Brancia |
Le bassin de réception supérieur du torrent de Preit est constitué par une large longue dépression d'alpages, à fond mamelonné, qui s'allonge transversalement au reste de son cours. Elle est limitée d'une part du côté septentrional par les crêtes du Monte Cassorso et de la Rocca La Meja et d'autre part du côté méridional par celles du groupe du Monte Oserot et du Monte Giordano. Elle s'étend sur 10 km de long du NW au SE entre le Passo della Gardetta et le Colle Margherina. Sur une largeur d'environ 1 km et à une altitude de plus de 2200 m elle englobe des alpages qui sont du côté ouest ceux du large vallon de la Pianezza. Ils s'élèvent par de douces pentes depuis le col de Preit (voir la page "Meja") jusqu'au Passo della Gardetta, lequel fait communiquer ce vallon avec les hauts ravins de la vallée de l'Unerzio.
La partie occidentale du bassin des sources du torrent de Preit, vue de l'est depuis le Colle Cologna (extrait de la publication n° 024, M.GIDON 1962)
Les alpages de la Pianezza de la Gardetta sont le siège, dans leur partie basse, d'une curiosité géologique assez remarquable, qui fait même l'objet de visites organisées. Il s'agit de présence d'empreintes de pattes de quadrupèdes "archosaures" (anciens lézards géants) du genre Chirotherium). Elle a été découverte en 2008 par Michele Piazza et Enrico Collo et étudiées en 2009 par Heinz Furrer. En 2017, un groupe de nouvelles empreintes du genre Isochirotherium a été découvert par Edoardo Martinetto, Massimo Delfino et étudié par Fabio Petti. |
Le très net contraste de relief entre les alpages de la dépression et les crêtes qui la bordent est dû à une différence flagrante de nature des roches : les chaînons rocheux sont en effet formés par des calcaires triasiques et jurassiques, tandis que les vallonnements d'alpages sont installés sur une large "bande siliceuse de la Gardetta" où prédominent les schistes siliceux permiens à lentilles de roches volcaniques. Cette unité tectonique prend naissance du côté ouest en contrebas du col de ce nom, au Prato Ciorliero (voir la page "Unerzio sud"), mais dès cet endroit sa structure s'avère assez somplexe.
En effet au Passo della Gardetta et dans son versant ouest se développe une puissante bande de gypses, criblée d'entonnoirs de dissolution, qui sépare deux bandes de roches permiennes. |
En définitive la bande siliceuse de la Gardetta s'avère donc composite, formée par l'accollement de deux bandes parallèles dont la plus méridionale se rattache sans doute à la nappe du Rouchouse et la septentrionale à celle de Sautron. En fait, si l'on parvient à suivre ces deux bandes de terrain en direction de l'est, leur devenir n'offre pas de confirmation flagrante de leur rattachement respectif aux nappes précitées. En réalité la bande de la Gardetta s'y fait plutôt remarquer par diverses complications de détail dont la signification n'est pas très claire :
- La bande méridionale de schistes permiens, bien que relativement étroite, se prolonge presque sans discontinuité vers l'est, jusqu'au delà du cours du torrent de Preit puis se lamine dans les pentes du flanc nord du Bric Servagno. - La bande permo-triasique septentrionale prend au contraire de l'ampleur vers l'est et y montre des complexités de détail dont la principale est le ploiement de sa succession en un anticlinal de la Pianezza qui se dessine entre le replat de ce nom et les grangie Isoardi : en fait elle est assez largement désolidarisée de la dalle calcaire verticale du Bric Servino et du Colle del Preit, avec laquelle elle est le plus souvent en contact direct (tectonique ou stratigraphique ?). |
Du côté sud du Passo della Gardetta la zone d'alpages s'étend en englobant le vallonnement oriental ouvert et peu déclive de la Fonda Brancia.
Le fond de cette dépression est presque partout dépourvu d'alluvions, ce qui permet de voir que les couches de calcaires triasiques y décrivent un bel anticlinal à axe plongeant vers l'ouest : il s'avère très clairement qu'il s'agit du prolongement oriental de l'anticlinal du Rouchouse, affectant ici la nappe de Rocca Peroni (le pincement du pli à son cœur semble indiquer qu'il ne saurait affecter des couches plus profondes que celles affleurant là).
La crête de Bernoir, qui limite la Fonda Brancia du côté sud et la sépare du vallone del Oserot, est formée par les calcaires triasiques supérieurs et les dolomies triasiques du flanc sud de ce pli
On voit au Colle Oserot (voir la page "Oserot"), que ces dernières couches s'enfoncent vers le sud, par un contact très redressé, sous les volcanites permiennes du soubassement du Monte Oserot, qui appartiennent à l'unité de Tête Dure (elle-même rattachée à la nappe du Rouchouse). Cet accident, que l'on peut objectivement appeler faille de Bernoir, avait été considéré comme la surface de charriage de cette unité, qui aurait été basculée par la formation du pli anticlinal. Mais il s'avère (voir la page "Oserot") que cette cassure doit vraisemblablement représenter le prolongement oriental de la grande faille du Ruburent.
En effet à l'extrémité orientale de la crête de Bernoir, dans le secteur où cette dernière se coude pour se raccorder à celle des Costiglioni (collet 2719), son tracé franchit la crête et semble se poursuivre en direction de l'est sous les alluvions glaciaires du versant nord du col de Servagno ; or, si l'on tient compte du décalage sénestre introduit par la faille transverse du col de Servagno, elle peut aisément se prolonger au delà par la cassure du Bric Servagno, elle-aussi extrêmement redressée et de même direction, qui sépare, à l'est de col, les unités briançonnaises et celles subbriançonnaises. |
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En définitive les bandes de roches de la dépression du versant oriental du Passo della Gardetta sont considérées comme appartenant à trois nappes juxtaposées, savoir la nappe de Sautron, celle du Rouchouse et celle de Rocca Peroni, dont les couches affleurent ici en s'enfonçant sub-verticalement, au flanc oriental du gros bombement anticlinal "du Rouchouse" dont la charnière est visible du côté sud.
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Cette disposition a été interprétée en considérant qu'elle correspondait aux "racines"* de ces nappes de matériel calcaire, originellement imbriquées puis basculées ensemble jusqu'à leur disposition actuelle lors du plissement. Cette interprétation est basée sur le fait qu'on observe plus au NW leur raccord anticlinal avec ces nappes superposées et que le matériel charrié s'enfonce définitivement ici sous la surface topographique. De fait le matériel siliceux intercalé ici entre les lames calcaires peut être considéré comme la semelle siliceuse permo-triasique de ces nappes, qui est absente plus au SW par suite du rabotage oblique induit par le charriage et conservée ici en raison de cette situation plus "radicale", alors que dans une telle situation c'est effectivement la couverture calcaire qui tend à être sectionnée par la surface de charriage (voir l'article "racines" du glossaire). |
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Cette manière de voir, qui a été la clé fondamentale pour interpréter cette structure, passe toutefois sous silence deux aspects de celle-ci : |
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Unerzio sud |
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