Chasseforêt, Arpont, Plateau de Bellecombe |
Le Dôme de Chasseforêt est le sommet central de la calotte des Glaciers de la Vanoise, d'où descendent vers l'est plusieurs langues glaciaires, dont celle de l'Arpont. Son altitude, de 3586 m, est cependant inférieure à celle du Dôme de l'Arpont (3599) et peu supérieure à celles du Dôme des Nants (3570) et du Dôme des Sonnailles (3381). Mais ces sommets voisins sont situés plus à l'ouest, au rebord supérieur des abrupts qui tombent sur la vallée du Doron de Chavière (voir la page "Génépy").
Sur son versant oriental la coupole de socle cristallin s'abaisse
doucement vers l'est avant d'être tranchée
par le cours du Doron de Termignon, qui la sépare de son
prolongement oriental, le plateau des lacs de Bellecombe.
Le placage de cargneules qui garnit ce plateau englobe des panneaux
de dolomies noriennes et de Lias qui sont posés sur les
micaschistes. Ceux-ci se disposent dans le prolongement des lambeaux
de terrains sédimentaires (surtout formés de calcaires
du Lias et de dolomies triasiques) qui sont plaqués à
différents niveaux sur la pente de la rive opposée, occidentale,
également sur le flanc de la coupole de socle. Ces différents
éléments sont pour la plupart attribuables à
la série de la Grande Motte, de sorte que leur contact
sur le socle est classiquement interprété
comme étant la surface de charriage de la nappe de la Grande Motte (des commentaires plus circonstanciés sont fournis aux pages "dent Parrachée" et "tectonique de la Vanoise").
Coupe des glaciers de la Vanoise au niveau du Pelve, d'après H. Dondey et al (extrait de Debelmas et Desmons, 1997, retouché) . Cette coupe passe au nord du Dôme de Chasseforêt ; elle montre surtout les rapports entre les deux rives des gorges du Doron. |
Tous ces sommets doivent leur nom de "dôme" à leur forme de cône surbaissé. Elle résulte de ce qu'ils ne sont que de simples aspérités de la surface d'un vaste très haut plateau qui correspond sensiblement à la surface structurale de la coupole anticlinale dessinée par le socle cristallin de la Vanoise méridionale. En effet la surface du socle y est presque totalement dénudée par l'érosion de son enveloppe sédimentaire, sous laquelle elle s'enfonce doucement plus au nord (Mont Pelve, Réchasse) et plus au sud (Labby, Dent Parrachée).
Du côté oriental la coupole de socle de Chasseforêt est assez profondément entaillée par les gorges du Doron. Mais elle se poursuit en rive gauche de ce torrent, où sa surface forme le Plateau de Bellecombe et du Plan du Lac, avant de s'enfoncer sous l'empilement de roches charriées du massif du Grand Roc Noir.
Le Plateau de Bellecombe est remarquable par la présence spectaculaire de larges affleurements de cargneules qui le garnissent à l'ouest d'une ligne qui court depuis le parking vers le nord jusqu'au delà du Plan du Lac. Ces cargneules constituent un assez épais placage enduisant la surface des micaschistes, qui s'enfonce en pente douce vers l'est du plateau.
Ces affleurements de cargneules semblent donc constituer un épais enduit, reposant sur le socle de Chasseforêt, qu'il est tentant d'interpréter comme la base broyée par charriage du matériel sédimentaire de la nappe de la Grande Motte. Il existe de plus, en divers points de la marge de leurs affleurements, à l'ouest et au NW du Plan du Lac, divers affleurements où l'on voit reposer des dolomies noriennes ou du Lias directement sur les micaschistes : ces derniers représenteraient une série réduite "autochtone" respectée résiduellement sous le charriage.
On considère donc que ces cargneules doivent, classiquement, jalonner une importante surface de charriage et l'on peut y voir la preuve que les terrains de l'unité de la Grande Motte ont ici été traînés bien classiquement au dessus d'une discontinuité tectonique franche, à la différence de ce qui s'observe en divers autres endroits (cf. la page "tectonique de la Vanoise"). |
Au nord du parking de Bellecombe la dalle de cargneules du plateau est brutalement interrompue, sensiblement selon le tracé suivi par la route pastorale, et se trouve juxtaposée du côté oriental à des micaschistes. Or ces derniers, qui affleurent pourtant en contrebas du plateau des cargneules, représentent le prolongement méridional de ceux qui fait affleurent dans le bas vallon de la Rocheure, où ils sont attribués à une "écaille des Lombards" (voir la page "Grand Roc Noir"). Leur situation chevauchante semble par ailleurs confirmée ici par le fait qu'aux abords nord et sud de Bellecombe, ces micaschistes se montrent posés à faible pendage sur le Lias qui chapeaute les cargneules du côté est de la route.
Cette géométrie correspond au passage de la faille de Bellecombe, (non représentée sur la carte géologique BRGM) presque N-S à pendage proche de la verticale est à rejet extensif par abaissement de sa lèvre orientale. On suit cette cassure vers le nord au delà du Plan du Lac, jalonnée (à la Chapelle Saint-Barthélémy) par une lame intercalaire de dolomies triasiques et de Lias, jusqu'à l'extrémité du vallonnement qu'emprunte la route pastorale. Son ultime tracé visible se trouve quelques centaines de mètres au NE de la ferme de Pensamen, dans la bosse surplombant le torrent de La Rocheure, où elle détermine un étroit couloir à fond liasique entre deux lèvres de micaschistes.
Il est curieux que l'on n'observe aucun prolongement de cette faille en rive nord du vallon de la Rocheure alors qu'en direction opposée (voir ci-après) sa visibilité et son rejet vertical se révèlent croissants. |
Au sud du parking de Bellecombe le prolongement de la faille de Bellecombe se confirme de façon très convaincante. En effet, dans les alpages de Chavière (où la route d'élève en lacets), on voit se développer largement, sous la klippe de micaschistes de la butte 2403, des couches triasico-liasiques qui sont clairement rapportables à la succession de la Grande Motte. En outre elles y dessinent un synclinal de La Chavière, couché et apparemment ouvert vers l'ouest, car les cargneules y enveloppent un coeur formé de Lias, intercalé entre deux flancs de Norien à polarité inverse
Mais ces couches ne se développent vers l'ouest que jusqu'à un ravinement N-S, 500 m. à l'ouest du Coëtet, le long duquel elles butent contre les micaschistes du soubassement du plateau occidental.. Ce tracé, qui descend de plus en plus raide en direction du Villard en passant par le hameau du Glotte, représente clairement le prolongement de la faille de Bellecombe car il tranche orthogonalement le dispositif en synclinal couché qui affecte son compartiment oriental.
Dans ces pentes inférieures du revers sud du plateau de Bellecombe le flanc normal de ce synclinal de La Chavière repose presque horizontalement sur des cargneules qui sont profondément affouillées, sur plus de 400 m. d'épaisseur, par les divers ravins affluents du torrent de la Chavière. Ceci porte à penser que ces cargneules résultent de la transformation de la partie inférieure des dolomies noriennes de la série de la Grande Motte et qu'elles représentent donc le soubassement stratigraphique originel de cette dernière.
En définitive les cargneules de Bellecombe ne constituent donc pas une simple brèche tectonique enduisant une surface de glissement (celle du charriage de la présumée nappe de la Grande Motte), mais semblent faire partie intégrante de la succession stratigraphique de la Grande Motte, "altérée" par la proximité du gypse sans doute sous-jacent. Elles différent aussi d'une grande partie de celles des pentes de Sardières, qui semblent résulter d'un remaniement quaternaire : mais une partie de ces dernières peut aussi y avoir une origine semblable puis y avoir alimenté ce remaniement (voir les pages "Parrachée" et "Aussois"), |
Plus au sud encore il est clair que que la faille de Bellecombe se prolonge
au moins jusqu'à la latitude de Termignon
(voir le cliché du début de la page "Grand Roc Noir") jalonnée par une bande d'affleurements cargneulique qui suit le pied du versant (même si cette dernière se rétrécit passagèrement à moins de 100 m. entre socle et schistes lustrés à la latitude du Villard et se masque immédiatement plus au sud sous quelques centaines de mètres de dépôts quaternaires).
Au delà, en aval de Termignon, tout indique que l'inflexion
vers le sud du cours de l'Arc a été guidée
par cette bande de cargneules, qui se raccorde là aux
vastes plaquages de même nature qui s'élèvent
sur la rive droite de la rivière, dans les pentes orientales
inférieures de la Dent
Parrachée.
Or, entre Termignon et Bramans, ces affleurements cargneuliques constituent la frange occidentale des énormes affleurements gypseux de la "nappe des gypses". Ainsi, les cargneules de Bellecombe semblent bien se rattacher, vers le sud, à la "nappe des gypses" tout en représentant, du côté nord, le soubassement sédimentaire de la série liasique de la Grande Motte.
On peut sans doute voir là une indication importante à verser au dossier de l'origine du matériel de cette "nappe des gypses" . En effet cela permet d'envisager que l'importance volumétrique de ces gypses résulte ici d'une accumulation originellement stratigraphique d'évaporites associée au domaine sédimentaire de la série de la Grande Motte. Plus précisément cela revient à penser qu'elle résulterait d'un remplissage précoce de la partie la plus creuse de l'hémigraben de la Grande Motte, avant que ce dernier n'accueille, après le Trias, la succession liasique typique de cette entité. |
cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuille Modane
Carte géologique simplifiée des abords
du Dôme de Chasseforêt
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble
des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°",
par M. Gidon (1977), publication n° 074
plus au nord ;
plus à l'ouest < cartes voisines > plus à l'est
plus au sud
Autre découpage de la même carte, par coupures moins agrandies et couvrant des secteurs plus larges
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Chasseforêt |
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