La Dent de Crolles : sommet et abrupts méridionaux
l'extrémité méridionale du chaînon des plateaux orientaux de la Chartreuse

Le sommet de la Dent de Crolles, le second de la Chartreuse en altitude (2062 m.), a l'apparence d'une proue de bateau dressée en sentinelle au dessus du Grésivaudan. Il est sculpté dans l'Urgonien du synclinal chartreux oriental, mais ici l'érosion a enlevé l'essentiel des flancs de ce pli : c'est donc l'éperon sud d'un "synclinal perché" qui est réduit à son fond à la latitude du sommet (mais qui d'élargit et se complète plus au nord, surtout par son flanc oriental d'ailleurs).

image sensible au survol et au clic

Le versant sud-est de la Dent de Crolles, vu d'avion depuis l'aplomb de Bernin.
f.G = faille de la Gorgette ; f.Pr = faille du Prayet ; f.Pa = faille du Paradis ; f.R = faille de Rocheplane.
Les failles N-S de la Gorgette et du Prayet délimitent, par leur conjugaison, un compartiment effondré ("graben") auquel appartient le sommet de la Dent de Crolles. Elles s'amortissent au sein des marnes de Narbonne, car elles n'affectent pas le Tithonique du rebord du plateau des Petites Roches.

Il faut aller au nord du sommet pour que, à la faveur du plongement vers le nord de l'axe du pli, l'Urgonien de ses flancs soit mieux conservé et que le synclinal se dessine clairement (ce qui est notamment le cas dans les abrupts des Sources du Guiers Mort).

En outre l'Urgonien de ce synclinal est accidenté d'un système de failles N-S, orientées longitudinalement par rapport à l'axe du pli. Il s'agit d'un système de failles extensives conjuguées*, qui se sont formées avant le plissement et ont été déformées (essentiellement basculées) par ce dernier.


version plus grande de cette figure
Les deux étapes qui ont abouti à la disposition actuelle des failles longitudinales du chaînon de la Dent de Crolles
a) Débitage de la dalle urgonienne, par une extension est-ouest, à l'Aptien (époque de dépôt de la Lumachelle) : les relations mutuelles entre les deux familles de failles (les unes à regard ouest, les autres à regard est) sont clairement observables, 2 kilomètres au nord de la Dent de Crolles, dans le rebord de falaise qui descend de la "cheminée du Paradis").
b) Plissement, à axe N-S, qui bascule (et éventuellement tord) les surfaces de failles.

image sensible au survol et au clic

Coupe naturelle du ravin de la Gorgette, à la Dent de Crolles

vue du sud, depuis le village du Baure, dans l'axe du synclinal oriental (s.O)
Sous cet angle on voit bien que le tracé de la faille de la Gorgette (f.G) est incurvé par la torsion synclinale (par simplification on n'a pas représenté la faille du Pas de l'Oeille).



Coupe par le sommet de la Dent de Crolles.
fG = faille de la Gorgette ; fO = faille de l'Oeille ; fPr = faille du Prayet.
Pour plus de détails et pour les explications qu'appelle cette coupe, voir le fascicule n°1D.

image sensible au survol et au clic

La face sud-ouest de la Dent de Crolles, vue depuis le sommet de Chamechaude.
C'est dans ce versant que s'élève le sentier (le plus fréquenté) qui monte depuis le col des Ayes. Il franchit la faille de la Gorgette (f.G, en tirets rouges) avant les premiers passages rocheux, au niveau d'un éboulis triangulaire à pointe vers le bas, et franchit les derniers escarpements par le Pas de l'Oeille.
L'éperon sud (à droite) donne une vue de profil, comparable à une coupe naturelle, de la succession des couches depuis les calcaires du Fontanil jusqu'au sommet de l'Urgonien.
Uis = partie supérieure de la masse inférieure urgonienne ; pcOs et pcOi = deux niveaux de "pseudo couches à Orbitolines" ; Uii = partie inférieure de la masse inférieure urgonienne (pour les autres niveaux voir la liste des abréviations).
f.O = faille de l'Oeille : voir détails ci-après.

Le Pas de l'Oeille doit son nom à un monolithe décamétrique ("Oeille" = "Ouille" = aiguille), que contourne et longe du côté ouest le sentier venant du col des Ayes, dans le haut de sa partie urgonienne.


Le rocher de l'Oeille, vu d'amont et d'enfilade, devant le Grésivaudan, le Bec Charvet et le Col du Coq.


C'est un bloc d'Urgonien découpé et limitée par les deux plans de cassure entre lesquels se partage ici la faille de l'Oeille (il constitue donc un exemple de "navette" de faille). On peut penser que ce qui lui a conféré une plus grande résistance à l'érosion (laquelle agit principalement, ici, par la gélivation) est que la roche y a été fragmentée par le déplacement tectonique puis recimentée.

Le Pas de l'Oeille, vu depuis Chamechaude (c'est-à-dire à une distance et une altitude éliminant les déformations perspectives).
f.O = faille de l'Oeille : Le compartiment oriental ("supérieur") de la faille est abaissé d'environ 20 m ; la valeur du rejet se déduit de ce que la portion de montagne visible a une dénivelée d'environ 200 m (voir le repère d'altitude en bas gauche du cliché).
La faille se partage au niveau du monolithe de l'Oeille en deux cassures secondaires qui le limitent et se rejoignent en haut comme en bas : ce monolithe est sans doute un broyat formé aux dépens du niveau calcaire médian des couches à Orbitolines.
f.s = faille satellite, de rejet moindre et prenant naissance plus haut dans la succession des couches.

Le sentier de la voie normale de montée depuis le col des Ayes est figuré en jaune.


N.B. : L'angle que fait la surface de cassure avec les surfaces de strates, de l'ordre de 50 à 60° vers l'est, paraît typique d'une faille extensive. Mais c'est un effet de perspective dû à l'obliquité de l'angle de prise de vue par rapport au plan de cassure (en réalité son pendage est assez proche de la verticale, comme indiqué sur la coupe).
image sensible au survol et au clic

D'un rejet décamétrique cette faille extensive s'amortit presque totalement plus bas, dans la partie haute de l'Urgonien inférieur : cela signifie qu'elle est apparue peu après le dépôt des couches de ce niveau, sans doute par tassement des couches de sa lèvre droite (orientale). Le tassement a repris un peu plus tard en se propageant vers l'ouest et en créant une cassure extensive secondaire.
On peut remarquer que ce dispositif indique que la tranche de calcaires en cours de dépôt était plus libre de s'étirer par tassement vers l'est que vers l'ouest, ce qui est conforme à ce que nous savons de l'extension des dépôts urgoniens.

 


 


Tableau général des pages consacrées aux différents secteurs du chaînon des Hauts de Chartreuse :
Granier col et Porte de l'Alpette
Pinet, plateau de l'Alpette col de l'Alpe et Tracarta 
 Lances de Malissard Aulp du Seuil 
Alpages et col de Bellefond   alpages de Marcieu 
Failles N-S de Bellefond   crête de Bellefond
Chaos de Bellefond  Pas de Rocheplane
Sources du Guiers, Trou du Glas Dent de Crolles 
   Cartes du chaînon Crolles - Bellefond

Ce secteur est visité par les itinéraires du fascicule1D
Les spéléologues trouveront une mine de renseignements de tous ordres dans l'ouvrage collectif "La Dent de Crolles et son réseau souterrain", publié par le Comité départemental de spéléologie de l'Isère (4 rue Général Marchand 38000 Grenoble).

 


Carte géologique simplifiée (fond topographique d'après la carte IGN au 1/100.000°)
carte géologique au 1/50.000° à consulter : feuille Domène

Roc d'Arguille

Sources du Guiers

crête de Rocheplane
col du Coq LOCALITÉS VOISINES Petites Roches

Bec Charvet

Bernin, St Ismier

Saint- Hilaire

 accueil section Chartreuse

début de la page

sommaire de GEOL_ALP

Aller à la page d'accueil du site
Dernières retouches apportées à cette page le 26/05/23