La Tournette : versant de Thônes |
aperçu d'ensemble sur le chaînon de la Tournette |
Depuis l'arête septentrionale de la montagne de La Tournette se détache, en direction du NE, une crête qui s'abaisse progressivement jusqu'à Thônes, où elle finit, tranchée par les étroits du Fier, à la sortie aval de cette localité (voir la page "Thônes"). Il s'agit pour l'essentiel d'un crêt* regardant vers l'ouest, qui limite du côté NW le glacis rocheux du revers est de La Tournette (mais à mi-parcours ce crêt présente un important ressaut constitué par la montagne du Cotagne (qui est analysée en fin de la présente page).
Ce versant de la montagne de la Tournette est fondamentalement constitué par une grande dalle d'Urgonien qui pend vers l'est et constitue la bordure occidentale de la dépression de Thônes. En effet cette dalle s'enfonce en bas de pente, vers l'est, sous les couches plus récentes et plus tendres de la succession stratigraphique (Sénonien à Nummulitique) qui forment le talus boisé du pied de la montagne et constituent la bordure occidentale de la cuvette structurale de Thônes - Manigod. Cette succession de couches, globalement plus fortement pentées que le versant, correspond au flanc oriental de l'anticlinal du Varo (pli que l'on peut considérer comme un repli oriental par rapport au grand anticlinal du Bargy). Deux remarques peuvent être faites à son sujet :
a) L'action de l'érosion a créé un relief assez particulier qui se caractérise par deux traits :
- la présence de deux éperons rocheux, celui du Bouton et celui de l'Aiguille, triangulaires sur la carte car ils s'élargissent vers l'aval et sont coiffés d'une dalle structurale : ce sont de splendides chevrons "en V topographique" qui pointent vers l'amont de la pente et des strates ;
- entre ces deux lignes de crête l'existence de un secteur aplani en pente régulière qui n'est pas une dalle structurale car elle coupe en biseau les couches urgoniennes successives, qui sont plus pentées que cette surface d'érosion. Il est limité par les abrupts des rebords des deux chevrons.
Il s'agit là d'un relief typiquement glaciaire, qui a été créé par une coupole de glace locale (couronnant la montagne), laquelle s'est partagée en deux langues (celle de Rosairy et celle des Vorets) chacune creusant une typique vallée en auge à fond plat.
b) Deux détails tectoniques retouchent la planéité globale de cette dalle :
1 - Toutes ses couches subissent, au nord-est du sommet de La Tournette (au niveau de la montagne du Cotagne), une importante torsion de leur azimut, de plus de 50° dans le sens horaire (il passe, du sud au nord, de N160 à N35) : cela se traduit par un pli très ouvert, que l'on peut appeler le synclinal de Rosairy dont l'axe passe au voisinage des chalets de ce nom et qui plonge fortement vers l'est (en direction de Manigod).
2 - Cette dalle est accidentée par deux cassures, d'orientation sub-méridienne mais non parallèles, qui convergent vers le nord aux chalets de Rosairy :
- La première est le chevauchement des Vorets, qui détermine le col de ce nom et traverse du sud au nord la dalle urgonienne dans sa partie inférieure, selon un tracé absolument méridien. Elle a pour effet de surhausser la dalle urgonienne du Rocher de l'Aiguille (voir la page Tournette Sud). et de créer une ligne de replats qui court presque horizontalement à flanc de montagne, en y dessinant toutefois quelques chevrons en raison de son pendage proche de celui de la topographie
- La seconde est la faille de La Tournette. Depuis les chalets de Rosairy vers le sud elle rejoint la crête sommitale au sud du sommet de la Tournette en séparant la crête principale de celle de Bajulaz qui s'embranche vers l'est (voir ce secteur à la page "Tournette sud"). D'orientation N30, elle est également bien marquée dans la topographie par un vallonnement qui s'élève en biais dans le versant.
Les figures suivantes permettent de suivre cet accident du sud vers le nord et de décrire les complications de détail qui l'accompagnent.
Le passage de la faille de La Tournette détermine un vallonnement pesque rectiligne, souvent fort creusé à la faveur du fait qu'elle remonte à l'affleurement les couches plus litées du Barrémien inférieur. Il prend naissance peu à l'ouest des chalets de Rosairy et se poursuit en direction du sud jusqu'au pied du col séparant la Pointe de Bajulaz de l'extrémité sud de la crête du sommet de la Tournette. En se rapprochant de cette extrémité sud de son tracé on remarque que la surface de cassure pend de moins en moins fort et s'infléchit en se couchant vers l'ouest.
coupe interprétative schématique du sommet de La Tournette Cette coupe, orientée comme le cliché précédent, montre la partie supérieure des pentes du versant est de la Tournette. f.To = faille de La Tournette ; Ø? = hypothétique rejeu avec inflexion et avancée de la lèvre supérieure en chevauchement (responsable du rebroussement de l'Urgonien du sommet). |
Cette transformation se confirme au col séparant la Pointe de Bajulaz de l'extrémité sud de la crête du sommet de la Tournette. On y voit même que la surface de faille vient tangenter le flanc inverse du synclinal de la Tournette (qu'elle finit par sectionner en biseau). Cette disposition suggère assez clairement que la surface de faille a du rejouer en se tordant et que sa lèvre supérieure a subi un cisaillement vers l'ouest qui l'a fait avancer en chevauchement : ce mouvement apparaît donc être le responsable du rebroussement en un crochon* de l'Urgonien du sommet.
L'examen du versant sud de la crête de La Bajulaz permet de compléter l'analyse de cette structure (voir la page "Tournette sud") et de montrer qu'il s'agit d'une faille normale à lèvre occidentale abaissée qui a été déformée par une compression posthume accompagnée d'un cisaillement grossièrement à vergence ouest. |
Au niveau des chalets de Rosairy l'extrémité nord du tracé de la faille de La Tournette vient rencontrer, sous les éboulis supportant les alpages, le tracé du chevauchement de Vorets.
Or au delà, dans le revers oriental de la montagne du Cotagne, on observe une faille sub-verticale (appelée ici "faille de Rosairy") qui semblerait, à première vue, en représenter le prolongement. Mais cette interprétation se heurte au fait que son sens de rejet est inverse. En outre le tracé du chevauchement des Vorets décrit un profond V topographique dans le ravin sous le chalet de Rosairy : il y a la plus grande vraisemblance pour que ce tracé remonte sous les prairies en longeant le pied des abrupts de rive nord de ce ravin pour se prolonger par celui du Cotagne, que l'on voit affecter la crête au nord des alpages.
Coupe composite de l'extrémité méridionale de la crête de la montagne de Cotagne (combinaison de deux coupes, l'une à la latitude des chalets de Rosairy et l'autre un peu plus au nord), donnant un schéma interprétatif du cliché ci-dessus |
Au nord-ouest des chalets de Rosairy on doit donc considérer que le chevauchement des Vorets se poursuit par le chevauchement du Cotagne ; au-delà celui-ci traverse l'extrémité sud de la crête rocheuse de la montagne de Cotagne puis court à mi-falaises, sur son côté occidental, en direction de la cluse de Thônes.
Il semble bien (comme dessiné sur la carte géologique Annecy-Ugine) que ce chevauchement se poursuit assez loin à flanc de falaise, jusqu'à se raccorder apparemment à la faille nord du Cotagne. Pourtant cette faille du Cotagne ne présente absolument pas le sens de rejet voulu pour qu'on puisse la considérer comme un chevauchement vers le NW : en effet lame urgonienne du Cotagne ne s'épaissit pas vers le NE, où elle devrait se raccorder au reste du compartiment chevauchant présumé (à sa "racine") ; au contraire elle se termine en sifflet dans cette direction, au sein du Sénonien des pentes de Mont Verdy. Ce paradoxe se résout si l'on admet qu'en fait il y a là deux failles distinctes dont les tracés convergent seulement vers le chalet de Cotagne (sans se prolonger l'un l'autre). En effet la faille du Cotagne peut aisément représenter le prolongement de la faille de la Tournette, disparue car tranchée par le chevauchement au niveau de Rosairy : elle présente précisément le rejet voulu , de soulèvement de sa lèvre sud-orientale. Le fait que l'on ne retrouve plus de chevauchement dans sa lèvre nord-occidentale (au nord du Cotagne) s'explique simplement en voyant en elle la rampe latérale contre laquelle se terminait, du côté initialement NE, le chevauchement Vorets-Cotagne. La difficulté à lire cette géométrie, de chevauchement limité par une rampe, dans le dispositif actuel vient du fait que tout cela a, postérieurement, été tordu par le synclinal de Rosairy, lors du cisaillement sénestre qu'a induit le jeu de la faille du Vuache. (voir la page "aperçu tectonique général") |
aperçu d'ensemble sur le chaînon de la Tournette |
Diverses parties du chaînon :
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Carte géologique à consulter : feuille Annecy-Ugine.
légende des couleurs (nouvelle fenêtre)
Carte géologique très simplifiée
des montagnes au nord de la Trouée de Faverges
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble
des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°",
par M.Gidon (1977), publication n° 074
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