La Tournette : versant de Thônes

revers nord-oriental de la montagne
aperçu d'ensemble sur le chaînon de la Tournette

Depuis l'arête septentrionale de la montagne de La Tournette se détache, en direction du NE, une crête qui s'abaisse progressivement jusqu'à Thônes, où elle finit, tranchée par les étroits du Fier, à la sortie aval de cette localité (voir la page "Thônes"). Il s'agit pour l'essentiel d'un crêt* regardant vers l'ouest, qui limite du côté NW le glacis rocheux du revers est de La Tournette (mais à mi-parcours ce crêt présente un important ressaut constitué par la montagne du Cotagne (qui est analysée en fin de la présente page).

image sensible au survol et au clic

Le flanc occidental de la dépression de Thônes, vu du nord, depuis les pentes du Mont Lachat (au dessus du hameau de La Mare).
ØV = chevauchement des Vorets ; s.Ro = synclinal de Rosairy ; f.To = faille de La Tournette ; f.Co = faille du Cotagne ; a.B = anticlinal du Bargy ; s.Th = repli synclinal de Thônes. On a indiqué l'inflexion que décrit l'axe de ce petit pli, tordu par le grand synclinal de Serraval : il passe d'une direction N170, au sud, dans la vallée du Fier, à N50, au nord-est de Thônes, dans la vallée du Nom.


Ce versant de la montagne de la Tournette est fondamentalement constitué par une grande dalle d'Urgonien qui pend vers l'est et constitue la bordure occidentale de la dépression de Thônes. En effet cette dalle s'enfonce en bas de pente, vers l'est, sous les couches plus récentes et plus tendres de la succession stratigraphique (Sénonien à Nummulitique) qui forment le talus boisé du pied de la montagne et constituent la bordure occidentale de la cuvette structurale de Thônes - Manigod. Cette succession de couches, globalement plus fortement pentées que le versant, correspond au flanc oriental de l'anticlinal du Varo (pli que l'on peut considérer comme un repli oriental par rapport au grand anticlinal du Bargy). Deux remarques peuvent être faites à son sujet :

a) L'action de l'érosion a créé un relief assez particulier qui se caractérise par deux traits :

- la présence de deux éperons rocheux, celui du Bouton et celui de l'Aiguille, triangulaires sur la carte car ils s'élargissent vers l'aval et sont coiffés d'une dalle structurale : ce sont de splendides chevrons "en V topographique" qui pointent vers l'amont de la pente et des strates ;

- entre ces deux lignes de crête l'existence de un secteur aplani en pente régulière qui n'est pas une dalle structurale car elle coupe en biseau les couches urgoniennes successives, qui sont plus pentées que cette surface d'érosion. Il est limité par les abrupts des rebords des deux chevrons.

image sensible au survol et au clic  
Le versant sud-oriental de la montagne de la Tournette (vue pseudo-aérienne obtenue au moyen du logiciel "PLANS" d'Apple)
f.To = faille de La Tournette ; ØV = chevauchement des Vorets.
La ligne barbulée bleu-clair souligne le rebord latéral abrupt des fonds d'auges occupés par les anciennes langues glaciaires.

Il s'agit là d'un relief typiquement glaciaire, qui a été créé par une coupole de glace locale (couronnant la montagne), laquelle s'est partagée en deux langues (celle de Rosairy et celle des Vorets) chacune creusant une typique vallée en auge à fond plat.

b) Deux détails tectoniques retouchent la planéité globale de cette dalle :

1 - Toutes ses couches subissent, au nord-est du sommet de La Tournette (au niveau de la montagne du Cotagne), une importante torsion de leur azimut, de plus de 50° dans le sens horaire (il passe, du sud au nord, de N160 à N35) : cela se traduit par un pli très ouvert, que l'on peut appeler le synclinal de Rosairy dont l'axe passe au voisinage des chalets de ce nom et qui plonge fortement vers l'est (en direction de Manigod).

2 - Cette dalle est accidentée par deux cassures, d'orientation sub-méridienne mais non parallèles, qui convergent vers le nord aux chalets de Rosairy :

- La première est le chevauchement des Vorets, qui détermine le col de ce nom et traverse du sud au nord la dalle urgonienne dans sa partie inférieure, selon un tracé absolument méridien. Elle a pour effet de surhausser la dalle urgonienne du Rocher de l'Aiguille (voir la page Tournette Sud). et de créer une ligne de replats qui court presque horizontalement à flanc de montagne, en y dessinant toutefois quelques chevrons en raison de son pendage proche de celui de la topographie

image sensible au survol et au clic

Le versant oriental de la Tournette, vu du nord, depuis le chalet de l'Ovine (rive droite du Fier).
Les couches de la crête du Cotagne sont vues ici presque d'enfilade alors que celles versant est de la crête sommitale de la Tournette et des pentes à gauche de Rosairy montrent leur disposition grossièrement en dalle structurale.
ØV = chevauchement des Vorets ; s.Ro = synclinal de Rosairy ; f.To = faille de La Tournette ; f.Co = faille du Cotagne ; d.C = décrochement du Charvet ; f.V = faille du Varo ; a.V = anticlinal du Varo.

- La seconde est la faille de La Tournette. Depuis les chalets de Rosairy vers le sud elle rejoint la crête sommitale au sud du sommet de la Tournette en séparant la crête principale de celle de Bajulaz qui s'embranche vers l'est (voir ce secteur à la page "Tournette sud"). D'orientation N30, elle est également bien marquée dans la topographie par un vallonnement qui s'élève en biais dans le versant.
Les figures suivantes permettent de suivre cet accident du sud vers le nord et de décrire les complications de détail qui l'accompagnent.

image sensible au survol et au clic

Les pentes orientales de la Tournette vues du nord, dans le secteur traversé par le sentier montant depuis Rosairy, depuis un point situé vers 1900m d'altitude.
f.To = faille de La Tournette : l'érosion du couloir de faille a dénudé une portion du miroir de cette cassure.
Le pendage des strates, noté s0, s'accroît de haut en bas de part et d'autre de la faille.

Le passage de la faille de La Tournette détermine un vallonnement pesque rectiligne, souvent fort creusé à la faveur du fait qu'elle remonte à l'affleurement les couches plus litées du Barrémien inférieur. Il prend naissance peu à l'ouest des chalets de Rosairy et se poursuit en direction du sud jusqu'au pied du col séparant la Pointe de Bajulaz de l'extrémité sud de la crête du sommet de la Tournette. En se rapprochant de cette extrémité sud de son tracé on remarque que la surface de cassure pend de moins en moins fort et s'infléchit en se couchant vers l'ouest.


coupe interprétative schématique du sommet de La Tournette
Cette coupe, orientée comme le cliché précédent, montre la partie supérieure des pentes du versant est de la Tournette. f.To = faille de La Tournette ; Ø? = hypothétique rejeu avec inflexion et avancée de la lèvre supérieure en chevauchement (responsable du rebroussement de l'Urgonien du sommet).

Cette transformation se confirme au col séparant la Pointe de Bajulaz de l'extrémité sud de la crête du sommet de la Tournette. On y voit même que la surface de faille vient tangenter le flanc inverse du synclinal de la Tournette (qu'elle finit par sectionner en biseau). Cette disposition suggère assez clairement que la surface de faille a du rejouer en se tordant et que sa lèvre supérieure a subi un cisaillement vers l'ouest qui l'a fait avancer en chevauchement : ce mouvement apparaît donc être le responsable du rebroussement en un crochon* de l'Urgonien du sommet.

 L'examen du versant sud de la crête de La Bajulaz permet de compléter l'analyse de cette structure (voir la page "Tournette sud") et de montrer qu'il s'agit d'une faille normale à lèvre occidentale abaissée qui a été déformée par une compression posthume accompagnée d'un cisaillement grossièrement à vergence ouest.


image sensible au survol et au clic

Les plus hautes pentes du versant oriental de la Tournette , vues du nord, depuis un point situé peu en contrebas du pied de la cheminée finale d'accès au sommet.
La faille de la Tournette (f.T) coupe en biseau le versant est de la crête sommitale : à l'extrémité sud de celle-ci elle tranche l'Urgonien des deux flancs (normal et inverse, tous les deux horizontaux) ainsi que le cœur albien du synclinal de la Tournette.

Au niveau des chalets de Rosairy l'extrémité nord du tracé de la faille de La Tournette vient rencontrer, sous les éboulis supportant les alpages, le tracé du chevauchement de Vorets.

image sensible au survol et au clic

L'extrémité méridionale de la crête rocheuse du Cotagne, vue du SE depuis le chalet de Rosairy.
f.To = faille de La Tournette ; f.Ro = faille de Rosairy ; ØCo = chevauchement du Cotagne .
On est encore ici dans le flanc sud du synclinal de Rosairy car les couches ont encore un azimut NW-SE (la direction du regard de l'observateur est très proche de N160).

Or au delà, dans le revers oriental de la montagne du Cotagne, on observe une faille sub-verticale (appelée ici "faille de Rosairy") qui semblerait, à première vue, en représenter le prolongement. Mais cette interprétation se heurte au fait que son sens de rejet est inverse. En outre le tracé du chevauchement des Vorets décrit un profond V topographique dans le ravin sous le chalet de Rosairy : il y a la plus grande vraisemblance pour que ce tracé remonte sous les prairies en longeant le pied des abrupts de rive nord de ce ravin pour se prolonger par celui du Cotagne, que l'on voit affecter la crête au nord des alpages.

image sensible au survol et au clic

L'extrémité méridionale des crêtes de la montagne de Cotagne vue du sud, depuis le sentier de la Tournette (alt. 1850 env.).
f.To = faille de La Tournette ; f.Ro = faille de Rosairy (bordée à gauche par des cassures satellites, f.a et f.b) ; ØV = chevauchement des Vorets ; ØCo = chevauchement du Cotagne (prolongement du précédent ?).


Coupe composite de l'extrémité méridionale de la crête de la montagne de Cotagne
(combinaison de deux coupes, l'une à la latitude des chalets de Rosairy et l'autre un peu plus au nord), donnant un schéma interprétatif du cliché ci-dessus

Les deux cassures mineures, f.a et f.b, ont l'une et l'autre un rejet de même sens que f.Ro, avec compartiment oriental abaissé. En raison de leurs sens de rejet opposés aucune de ces failles ne peut, malgré leur orientation conforme être considérée comme le prolongement de la faille de La Tournette.

Au nord-ouest des chalets de Rosairy on doit donc considérer que le chevauchement des Vorets se poursuit par le chevauchement du Cotagne ; au-delà celui-ci traverse l'extrémité sud de la crête rocheuse de la montagne de Cotagne puis court à mi-falaises, sur son côté occidental, en direction de la cluse de Thônes.

 Il semble bien (comme dessiné sur la carte géologique Annecy-Ugine) que ce chevauchement se poursuit assez loin à flanc de falaise, jusqu'à se raccorder apparemment à la faille nord du Cotagne. Pourtant cette faille du Cotagne ne présente absolument pas le sens de rejet voulu pour qu'on puisse la considérer comme un chevauchement vers le NW : en effet lame urgonienne du Cotagne ne s'épaissit pas vers le NE, où elle devrait se raccorder au reste du compartiment chevauchant présumé (à sa "racine") ; au contraire elle se termine en sifflet dans cette direction, au sein du Sénonien des pentes de Mont Verdy.

Ce paradoxe se résout si l'on admet qu'en fait il y a là deux failles distinctes dont les tracés convergent seulement vers le chalet de Cotagne (sans se prolonger l'un l'autre). En effet la faille du Cotagne peut aisément représenter le prolongement de la faille de la Tournette, disparue car tranchée par le chevauchement au niveau de Rosairy : elle présente précisément le rejet voulu , de soulèvement de sa lèvre sud-orientale. Le fait que l'on ne retrouve plus de chevauchement dans sa lèvre nord-occidentale (au nord du Cotagne) s'explique simplement en voyant en elle la rampe latérale contre laquelle se terminait, du côté initialement NE, le chevauchement Vorets-Cotagne.

La difficulté à lire cette géométrie, de chevauchement limité par une rampe, dans le dispositif actuel vient du fait que tout cela a, postérieurement, été tordu par le synclinal de Rosairy, lors du cisaillement sénestre qu'a induit le jeu de la faille du Vuache. (voir la page "aperçu tectonique général")


image sensible au survol et au clic

La crête de la Montagne de Cotagne vue d'enfilade, du sud - sud-ouest, depuis les abords septentrionaux de la crête sommitale de la Tournette
f.Co = faille nord du Cotagne ; Ø.Co = chevauchement du Cotagne ; ØV = chevauchement des Vorets (il se prolonge par le précédent) ; s.Ro = synclinal de Rosairy.
On a tracé approximativement les limites des formations de la bordure occidentale de la dépression structurale de Thônes, car on voit bien leur changement d'azimut, qui décrit l'incurvation de la "virgation des Bornes". La montagne du Cotagne se situe à mi-course de cette torsion.
L'Urgonien de la crête des Tours (arête nord-est de la Tournette)qui a été voilé de gris se trouve nettement en avant-plan ; il prolonge celui de la partie inférieure des falaises occidentales de la Montagne de Cotagne.

aperçu d'ensemble sur le chaînon de la Tournette

Diverses parties du chaînon :

 La Forclaz - Montmin

 Cotagne -Tournette est

 La Tournette

 Bajulaz - Beccaz

 Arclosan

Carte géologique à consulter : feuille Annecy-Ugine.

légende des couleurs (nouvelle fenêtre)
Carte géologique très simplifiée des montagnes au nord de la Trouée de Faverges
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M.Gidon (1977), publication n° 074


Dent du Cruet

Thônes

Manigod
Tournette : sommet LOCALITÉS VOISINES Sulens

La Forclaz

Tournette : sud

Serraval
N.B. Les localités entre parenthèses appartiennent à une autre section du site et leur page s'ouvrira avec l'en-tête correspondant.

accueil section Bornes

début de la page

sommaire de GEOL_ALP

Aller à la page d'accueil du site
Dernières retouches apportées à cette page le 18/11/19