Aussois, Sardières, Bramans |
Les pentes passagèrement douces qui portent le village d'Aussois s'étendent en rive droite de l'Arc entre Avrieux et Bramans. Elles s’inscrivent à l'intérieur d'un saillant vers le SE du cours de l'Arc, qui s'infléchit à proximité de Bramans de N20° depuis Termignon à N70° en direction de Modane, ceci en liaison apparente avec le contournement du bombement de socle de la Vanoise sud-orientale qui s'ennoie là vers le SW. Les pentes d'Aussois y sont plus précisément délimitées par deux vallons, pratiquement N-S, celui de Saint-Benoît à l'ouest, avec ses deux lacs de barrage du Plan d'aval et du Plan d'amont, et celui de Saint-Pierre à l'est.
Ces pentes, assez largement garnies d'alluvions glaciaires, constituent un plateau suspendu doucement incliné vers la vallée. Son rebord inférieur domine le thalweg de la rivière par des escarpements rocheux qui portent les forts de l'Esseillon. Le plateau d'Aussois doit son existence au fait qu'il est installé sur une dalle peu inclinée de calcaires et de dolomies triasiques.
L'Arc entaille cette dalle rocheuse à son extrémité aval, entre les forts inférieurs, Victor-Emmanuel et Marie-Thérèse, en y ouvrant la gorge de l'Esseillon.
La dalle calcaire du plateau d'Aussois repose, par l'intermédiaire des quartzites et du Verrucano, sur les micaschistes supérieurs ("d'Ambin"). Mais ces couches n'affleurent qu'en aval des forts, dans le lit de l'Arc au sud du village d'Avrieux : la dalle calcaire y est percée en boutonnière* et à la faveur d'une faille secondaire orienté N-S. Ces calcaires triasiques représentent donc la couverture stratigraphique autochtone du socle cristallin de la Vanoise sud-orientale.
Cette dalle calcaire supportait d'autre part des cargneules, encore bien visibles dans les pentes au nord-est du village ; mais elles ont été largement déblayés par l'érosion glaciaire et remplacés par du matériel morainique qui garnit assez largement le plateau. Par contre de forts résidus de ce placage cargneulique tapissent les pentes dominant le plateau d'Aussois ; ils s'y appuient plus ou moins directement, du côté amont, sur le socle siliceux du revers oriental de l'anticlinal de socle de la Vanoise méridionale, comme on le voit en rive est du vallon de Saint-Benoît en aval du Plan d'Aval et, plus à l'est, dans des petites boutonnières ouvertes dans le ravin de Saint-Pierre.
Le versant montagneux de rive droite de l'Arc, sur lequel s'appuie le plateau d'Aussois est installé les pentes méridionales de la Vanoise sud-orientale, qui s’enfoncent sous la nappe des gypses. La limite de cette dernière n'est suivie qu'approximativement par le tracé presque E-W de la vallée de l'Arc. Les ravins des affluents de rive droite de cette rivière, bien qu'ils restent plutôt tangents à la voûte de socle du massif cristallin de la Vanoise méridionale, entaillent néanmoins, et ce de plus en plus vers le haut, les unités tectoniques calcaires empilées sur le revers oriental de ce massif (c'est dans ces dernières, de type briançonnais "classique", qu'est sculpté le plateau d'Aussois et la partie basse des deux vallons).
Tandis que le vallon de Saint-Pierre reste dans ces couches, ici largement transformées en cargneules, jusque dans les ravins qui lui servent de source, la partie supérieure du vallon de Saint-Benoît s'inscrit assez profondément dans la couverture siliceuse du socle cristallin ; elle y héberge désormais deux lacs de barrage, qui s'appuient sur les ressauts étagés de l'épaulement glaciaire qui borde la vallée de l'Arc aux alentours de 2000 m.
** Sur la photo ci-dessus l'ensemble nord-oriental des couches calcaires plaquées sur la pente a été attribué, comme on le fait classiquement, à une klippe de la Dent Parrachée, représentant un fragment de la nappe de la Grande Motte, qui serait plaquée sur le flanc oriental de l'anticlinal de socle en rive droite de la vallée de l'Arc. |
Les cargneules garnissent de plus en plus largement le versant de rive droite de l'Arc en amont d'Aussois et en particulier forment presque totalement le versant du Bois de Mollard Fleury à l'aplomb de Sardières, où leur érosion a isolé le spectaculaire "Monolithe de Sardières".
Haut de presque 100 mètres, il s'apparente, quant à sa formation, à une "cheminée de fées" : s'il n'y a aucun bloc protecteur visible ce n'est pas que la cargneule n'en contienne pas. Mais sans doute est-ce une zone de cargneule moins friable qui a joué ce rôle protecteur. Les rochers qui percent le sous-bois de Mollard Fleury, en arrière-plan, sont également constitués par les cargneules, qui tapissent le versant au pied des escarpements de la Dent Parrachée. |
Ces amas cargneuliques représentent en définitive la terminaison méridionale des affleurements du matériel sédimentaire qui forme la montagne de la Dent Parrachée. Le type de succession stratigraphique de l'unité structurale qui la constitue, de type Grande Motte (avec Trias supérieur dolomitique et Lias), remplace ici le matériel de type briançonnais classique (à Trias moyen dolomitique et sans Lias), qui affleure autour d'Aussois. Le passage de l'un à l'autre de ces deux types de succession se fait par l'intermédiaire d'une large zone où du matériel mélangé - des deux types - est inclus dans les cargneules.
La très large extension, au sud du grand ravin de Bonne Nuit, de ces affleurements de cargneules, qui tapissent presque les pentes en contrebas oriental de la Pointe de Bellecôte, à partir de son éperon coté 2830, est un fait remarquable, qui pose question. Ce placage s'étend du côté méridional jusqu'à la crête des Corneilles, où son sectionnement montre clairement que la surface basale de ces cargneules est inclinée un peu plus fort que la pente moyenne du versant (voir la page "Aussois amont"). Cette disposition porte à considérer qu'il s'agit en fait d'une épaisse brèche de pente à matériel de cargneules.
Mais le matériel constitutif de cette formation ne peut guère avoir été alimenté à partir des affleurements de la surface basale du chapeau calcaire du sommet de la Dent Parrachée, qui déterminent le Col de La Faculta car ils sont insuffisamment volumineux. Par contre la pyramide rocheuse cotée 2830 située au SE de la Pointe de Bellecôte repose sur un socle de dolomies noriennes peu épaisses qui passent vers le bas aux cargneules de plus en plus épaisses et qui s'étalent sur le versant pour former un étage supérieur d'entablements de la Turra et de La Loza, dont le relief évoque au contraire celui d'un épandage en terrasses. On peut donc penser que si on observe là l'épandage quaternaire d'un matériel dolomitique qui a été cargneulisé sur une épaisseur croissante d'ouest en est donc c'est sans doute qu'il a été soumis à l'action de gypses dont la présence prenait de l'importance vers le bas dans cette direction. Il est d'autre part remarquable que les placages de cargneules du bas des pentes se limitent par rapport aux gypses de rive droite de la vallée de l'Arc suivant un tracé presque rectiligne passant par Sardières. Or celui-ci prolonge de façon assez évidente celui de la faille de Bellecombe (voir la page "Chasseforêt"). On peut donc envisager que l'origine des cargneules soit une transformation des carbonates du miroir de la lèvre occidentale de cet accident, sous l'action du matériel de la nappe des gypses qui s'appuyait sur lui, comme il le fait vis-à-vis du socle de Chasseforêt au nord de la latitude de Termignon. En faveur de cette interprétation on peut sans doute voir un argument dans le fait que c'est aussi à cette latitude que ce matériel gypseux sa plus forte épaisseur d'affleurements. |
Coupe de la marge méridionale de la Vanoise, à peu près selon le tracé de la vallée de l'Arc Les relations géométriques entre les grands ensembles rocheux sont figurées de façon très schématique mais relativement objective, sans prendre en compte aucune hypothèse relative à leur mise en place. Noter que, de part et d'autre de cette coupe, le socle de Chasseforêt s'enfonce vers le sud tandis que celui d'Ambin et celui du Grand Paradis s'enfoncent vers le nord. De haut en bas s'empilent les unités tectoniques suivantes : SLss = unité des schistes lustrés sommitaux ; SLs, SLm = unités de schistes lustrés intermédiaires (" supérieures" et "médianes") ; SLi = unités de schistes lustrés inférieures. ts-e = séries carbonatées de type Grande-Motte (Trias supérieur à Éocène) ; tG = "nappe des gypses" ; tm-e = séries carbonatées briançonnaises (Trias moyen à Éocène) ; ti-P = Tégument siliceux du socle de la Vanoise orientale (Trias inférieur et Permien) ; hr-P = paléozoïque de la Vanoise occidentale. c.Ch = cicatrice de Chavière = faisceau de failles du linéament briançonnais oriental à cette latitude (voir la page spéciale consacrée à cet accident) |
Carte géologique simplifiée des abords du
col d'Aussois
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble
des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°",
par M. Gidon (1977), publication n° 074
(remarque concernant la légende : les "schistes versicolores", représentés avec la teinte brun clair, ne sont plus rapportés au Permien mais au socle (= micaschistes supérieurs "msv")
plus au nord ;
plus à l'ouest < cartes voisines > plus à l'est
plus au sud
Autre découpage de la même carte, par coupures moins agrandies et couvrant des secteurs plus larges
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Rateau d'Aussois |
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