L'Aiguille de Chambeyron

le chaînon séparant le vallon de Mary de celui de Fouillouse

Le long chaînon, acéré et déchiqueté, de l'Aiguille de Chambeyron forme la ligne de partage des eaux entre les deux vallons principaux de rive gauche de l'Ubaye que sont celui de Fouillouse au sud et celui de Mary au nord. Avec ses 3412 m l'Aiguille de Chambeyron elle-même est le point culminant de toutes les montagnes de la Haute Ubaye et de la Haute Maira.

Situé au coeur de la zone briançonnaise à cette latitude il est essentiellement constitué par le matériel rapporté à la nappe de Chambeyron. À l'Aiguille de Chambeyron elle-même la ligne de crête et son versant méridional sont presqu'en totalité formés par les calcschistes néocrétacés ("marbres en plaquettes") du sommet de la succession briançonnaise.

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L'arête ouest de l'Aiguille de Chambeyron, vue du sud depuis la rive du Lac des Neuf-Couleurs.(cliché original obligeamment communiqué par M. G. Deleuil)
csri = calcschistes rouges inférieurs ; csm = calcschistes moyens (csr = calcschistes rouges intermédiaires) ; css = calcschistes argileux sombres supérieur.
acc.i? = tracé masqué (supposé) de l'accident de l'Infernetto (voir la page "Infernetto").

Ils y sont particulièrement épais (comme partout dans cette nappe) et sont débités en dalles qui plongent vers la dépression des lacs de Chambeyron (SW) : leur débit semble correspondre plus à la schistosité de ces calcschistes qu'au pendage de leurs strates : celles-ci sont particulièrement difficiles à repérer, en raison de leur uniformité de constitution mais plutôt fortement inclinées vers le versant opposé (vers le nord), comme l'indique déjà le fait que le sommet est constitué par les marbres de Guillestre, qui ne réapparaissent pas plus bas dans ce versant.

Le pendage des strates est sub-vertical dans le haut de la crête, comme indiqué par la présence d'une bande de calcschistes plus colorés, rouges et verts, qui court à flanc de versant en y dessinant des redents au gré des ravines. Par contre il s'atténue par une inflexion synclinale que dessine le sommet de la succession dans le versant de la Pointe de Chauvet.
D'autre part la rupture de pente du pied de ce versant est garnie par une jupe continue de cones d'éboulis qui ceinture en fait la dépression des lacs jusque sur son pourtour oriental, du Brec de l'Homme au Brec de Chambeyron. Il est vraisemblable que c'est sous cette dernière que passe le tracé de la limite avec les calcschistes similaires attribués à la nappe de Sautron (voir la page "Lacs de Chambeyron").


Le versant sud de l'Aiguille de Chambeyron et son arête est, vu depuis la rive du Lac des Neuf-Couleurs.
s0 = attitude de la stratification ; s1 = attitude de la schistosité principale ; acc.i? = tracé masqué (supposé) de l'accident de l'Infernetto (voir la page "Infernetto")


Au contraire sur le versant Marinet (NE) la succession stratigraphique de la nappe est plus obliquement tranchée par l'érosion, montrant ainsi le repos des calcaires massifs du Malm sur leur soubassement de calcaires dolomitiques triasiques, qui y affleurent au cœur d'un anticlinal de l'Aiguille de Chillol.

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La face nord de l'Aiguille de Chambeyron

et le glacier rocheux de Marinet, vus du nord-est, depuis la Plate de Tuissier (cliché pris en 1964).

NB : Les sinuosités dessinées par la base du Malm, à l'aplomb du sommet, sont dues à une ondulation synclinale relativement modeste mais dont l'axe est presque tangent à la paroi rocheuse : ceci a pour effet d'en accentuer le dessin de façon caricaturale.
(autres commentaires tectoniques en légende des figures ci-après)

La perspective non déformante, autorisée par la grande distance de prise de vue, permet d'apprécier l'importance du glacier rocheux par rapport au glacier nord-ouest de Marinet.
Les moraines déposées au front du glacier, à une époque où il remplissait son ombilic frontal, ont recouvert sa langue. Celle-ci s'est fossilisée sous la pierraille en même temps qu'elle était abandonnée, en avant du front actuel, lors du recul de ces derniers siécles.
Cette loupe de glace masquée détermine un bombement en aval de l'ombilic (elle a été mise en évidence sous la pierraille par un sondage réalisé en 1986 par M.Michèle Evin). A sa surface le matériel morainique a glissé sur une longueur de 1 kilomètre, entre deux bourrelets latéraux, et a formé à l'avant une série d'arcs pseudo-morainiques emboités .


En fait la coupe que donnent les arêtes N et S du Brec de l'Homme, qui sont transverses par rapport au reste du chaînon de l'Aiguille de Chambeyron, montre que ses couches sont ployées en un ample synclinal du Brec de l'Homme au cœur duquel se trouve la dépression des lacs. Ce pli s'enchaine avec l'anticlinal de l'Aiguille de Chillol en dessinant un"S" par l'intermédiaire d'un flanc vertical, auquel appartient l'Aiguille de Chambeyron (voir la page "Lacs de Chambeyron").


 Le versant nord du chaînon de l'Aiguille de Chambeyron était garni par deux petits glaciers de cirque, presque jointifs originellement mais hélas agonisants. Leurs moraines se sont transformées en glaciers rocheux très spectaculaires qui s'avancent jusqu'au fond du vallon de Marinet.

documents complémentaires sur le glacier rocheux de Marinet : voir la page Marinet

Au pied de cette face nord le matériel calcaire de la nappe des Aiguilles de Chambeyron y repose sur le matériel siliceux de l'unité de Marinet par une surface tectonique que l'on peut en première analyse considérer comme sa surface de charriage.

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Le versant septentrional du chaînon de l'Aiguille de Chambeyron vu du nord-est depuis le Pas nord de Chillol.
a.M = anticlinal de Marinet ; a.C = anticlinal de l'Aiguille de Chillol (son axe, incliné vers la droite est tordu d'une concavité orientée vers l'observateur) ; f.H = faille des Houerts (anciennement considérée comme surface de chevauchement de la nappe des Aiguilles de Chambeyron) ; ØFS = surface de chevauchement de l'unité de la Font-Sancte (en bleu) ; ØAM = surface de chevauchement de l'écaille des andésites de Marinet .
Ces andésites reposent sur les quartzites du rocher 2906, par l'intermédiaire du chevauchement de l'écaille des andésites de Marinet, qui est enroulé par l'anticlinal de Marinet. Elles sont coiffées, à l'Aiguille 2827, par une klippe* de calcaires triasiques, qu'il faut sans doute rapporter à la nappe de la Font-Sancte (voir la page "Chillol").
Une autre klippe de Trias calcaire repose sur le flanc oriental de l'anticlinal de l'Aiguille de Chillol (où elle est séparé du Malm par un peu de marbres en plaquettes). Elle forme la butte au sud-ouest du col 2831, qui sépare la dépression des glaciers de Marinet du vallon de Chillol.


Mais, à l'aplomb du sommet, cette surface recoupe en biseau très oblique le cœur de l'anticlinal de Chillol aussi bien que la klippe de Trias calcaire qui repose sur le flanc nord-oriental de l'anticlinal de l'Aiguille de Chillol. De plus on voit, plus bas dans le vallon de Chillol qu'elle recoupe la surface de redoublement tectonique qui y individualise une digitation inférieure (l'unité de du Sommet Rouge) : il assez donc plausible que ce "contact basal" sur l'unité de Marinet soit plutôt (ici au moins) le prolongement de la faille des Houerts, faille tardive qui détermine, en rive droite de l'Ubaye, le col du même nom.

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La partie médiane de la rive gauche des gorges de l'Ubaye (massif de Chambeyron) vu depuis la partie supérieure du vallon des Houerts.
ØFS (bleu foncé) = surface de base de la nappe de la Font-Sancte.
n.aC = nappe des Aiguilles de Chambeyron (unité de Chauvet = corps principal de la nappe) ; u.sR = unité du Sommet Rouge (digitation inférieure de la nappe des Aiguilles de Chambeyron) ; f.H = faille des Houerts : elle recoupe en biseau la surface de charriage de l'unité de Chauvet ; a.aC = anticlinal de l'Aiguille de Chillol.


Au nord-ouest du sommet de l'Aiguille de Chambeyron le vallon de Chauvet détache de la crête principale celle de l'Aiguille Grande, qui s'abaisse vers la gorge de l'Ubaye en rive gauche du vallon de Chillol. Cette dernière porte également une klippe de calcaires triasiques (voir la page "Aiguille Grande"). Le fait que, dans cette partie de la montagne, les calcschistes de la nappe de Chambeyron supportent plusieurs lambeaux de calcaires triasiques montre que la nappe de Chambeyron a été chevauchée par une unité supérieure qu'il est donc loisible, en fait, d'attribuer soit à la nappe du Châtelet soit à celle de la Font-Sancte.

 

Diverses autres pages relatives au massif de Chambeyron : Vue d'ensemble du chaînon du Brec, Le Brec lui-même , La crête méridionale du Brec , La dépression des lacs de Chambeyron , l'Aiguille de Chambeyron , Fouillouse et La Souvagea.

consulter l'aperçu structural général sur la zone briançonnaise méridionale
consulter l'aperçu d'ensemble sur les chaînon au sud-est de la Haute Ubaye


cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuille Aiguille de Chambeyron

Carte géologique simplifiée du massif de Chambeyron
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M.Gidon (1977), publication n° 074


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