Dent de Cons, Belle-Étoile

le chaînon le plus oriental des Bauges, entre les vallées de Tamié et d'Ugine

Le petit chaînon de la Dent de Cons (2064 m) est long d'une dizaine de kilomètres ; c'est le plus oriental du massif des Bauges, qui s'individualise à l'ouest d'Albertville : il y constitue, un promontoire que la trouée d'Ugine - Faverges contourne par le nord en le séparant de l'extrémité méridionale du massif des Aravis.


Le chaînon de la Dent de Cons, vu du nord-est, d'avion depuis l'aplomb d'Héry sur Ugine.
On trouvera les commentaires géologiques relatifs à ce cliché en fin de page ...

En fait, du côté sud-occidental, ce chaînon est même presque isolé du reste du massif des Bauges par la profonde vallée morte qui d'élève depuis Seythenex jusqu'au col de Tamié, où elle se termine suspendue au dessus de la Combe de Savoie.

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Les crêtes de la Dent de Cons et le vallon de Tamié
vus d'avion, du sud-ouest, depuis l'aplomb de Fréterive

s.S = synclinal de Serraval, d'axe NE-SW : le flanc SE de ce pli tardif a fait basculer vers l'ouest les axes des plis antérieurs, d'orientation oblique (désormais plus proche de NW-SE).
Multiples replis, d'axe NW-SE du synclinorium des Bauges nord-orientales :
s.P = synclinal du Pécloz (première charnière principale du synclinorium) ; a.O = anticlinal d'Orisan ; s.cT = synclinal du col de Tamié ; a.fT = anticlinal du Fort de Tamié ; s.T = synclinal de Tamié (seconde charnière principale du synclinorium*).

Les replis du flanc ouest, légèrement renversé, de l'anticlinal d'Orisan sont analysés à la page "Roche Torse".


L'essentiel de la montagne, et notamment sa crête, est surtout formé par le Néocomien argilo-calcaire car sur son versant ouest entre Cons au nord et Les Combes au sud (soit sur près de 5 km) le Sénonien ainsi que l'Urgonien manquent, enlevés par une érosion anté-Nummulitique (ce qui témoigne de l'existence à cette latitude de reliefs saillants, correspondant peut-être à des voûtes de plis). Ces strates calcaires à joints marneux, où ne se signale guère que le niveau plus massif du Valanginien supérieur, sont fortement redressées, parfois même basculées vers l'ouest au delà de la verticale. Ceci, joint au caractère monotone et répétitif de leur succession, confère à cette crête un azimut qui est en moyenne conforme à celui des strates, c'est-à-dire NNE-SSW, et une allure élancée, voire aérienne. mais dépourvue de falaise.

Ces couches appartiennent en totalité au flanc est du grand synclinal de Tamié, d'axe N-S, qui vient se fondre obliquement, aux abords de Faverges dans le grand synclinal de Serraval, d'axe moins méridien, NE-SW. Le chaînon de la Dent de Cons s'incorpore alors au flanc sud-oriental de ce pli majeur, lequel se poursuit vers le nord-est, au delà de la Trouée de Faverges - Ugine, par le chaînon du Charvin, extrémité méridionale de la chaîne des Aravis (plus de détails à la page "Cons nord").

 
Coupe des Bauges orientales

voir en fin de page le schéma des rapports avec le sud des Aravis.

A/ Le versant ouest du chaînon est largement couvert de bois, en pente presque régulière, qui couvrent essentiellement des marno-calcaires du Valanginien - Hauterivien : au sein de ceux-ci la monotonie des faciès et de la répétition des strates n'offre guère de repères permettant de lire les détails sa structure par des traits de son relief.

On voit cependant que le cœur du synclinal de Tamié y est représenté, en pied de versant, par la bande d'affleurements d'Urgonien qui le traverse en biais au sud du village des Combes. Si ces affleurements sont dominés plus haut dans la pente par ceux de l'Hauterivien c'est en raison du renversement (d'ailleurs assez peu accentué) du flanc oriental de ce pli. À peu près à mi-pente en direction de la crête le sens du pendage des couches s'inverse progressivement, en même temps que leur sens de succession devient normal : cela correspond au franchissement de la charnière d'un anticlinal de la Dent de Cons, qui n'est cependant qu'ébauché car l'essentiel de son flanc normal a été enlevé par l'érosion avec la partie du versant est de la montagne à laquelle il appartenait.

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Le versant occidental de la crête de la Dent de Cons, vu du SW depuis le col du Drison.
d.C
= hypothétique décrochement des Combes.
Noter le repos stratigraphique direct du Nummulitique sur l'Hauterivien au nord du village.

 Les affleurements d'Urgonien du cœur du synclinal de Tamié se terminent brutalement vers le nord, au village des Combes. Cela semble pouvoir être le fait d'un décrochement des Combes qui aurait un rejet dextre car un dernier affleurement se retouve nettement plus à l'est dans les pentes qui depuis dominent le village du côté NE. En effet le ravin qui s'élève depuis le village vers la crête pour la rejoindre entre Dent de Cons et Pointe de Cruessajran, a une direction qui le place dans le prolongement d'une cassure de ce type qui se détecte sur la rive opposée du vallon de Tamié, dans le versant est de la montagne de la Sambuy (elle s'y branche à angle aigu sur le décrochement dextre de Bouchasse). Le fait que le tracé de cet hypothétique accident n'ait pas été reconnu à l'est du village des Combes, peut-être attribué au manque de niveaux repères, dans ces pentes boisées uniformément hauteriviennes.

B/ La crête de la Belle Étoile, qui constitue l'extrémité méridionale du chaînon, au sud du col de l'Alpette (1580), est exclusivement formée par les couches du Valanginien et de l'Hauterivien du flanc est du synclinal. Sur le revers est du sommet on observe des dalles structurales assez largement dégagées. Mais ici ce débit de la roche n'est pas déterminé par sa stratification mais par sa schistosité , qui pend vers l'E- SE à plus de 45°: le pendage de la stratification, au contraire plus ou moins fortement penté vers l'ouest, est notamment indiqué par la barre plus calcaire de la limite supérieure du Valanginien, qui rejoint la crête au Pas de l'Âne après l'avoir quittée, pour passer en versant ouest, à la Pointe de la Deuva (au sud du chalet de l'Alpette).

 
Le versant est de la crête de la Belle Étoile, vu du nord-est, depuis le col de l'Alpette (arête ouest du Roc Rouge).
Tout ce versant de la crête est formé de dalles structurales de calcaires argileux du Valanginien, dont le pendage est remarquablement uniforme. Les couches sont en série inverse, de sorte que les bancs du Valanginien inférieur s'enfoncent sous les marnes du Berriasien supérieur dans lesquelles est ouvert le col du chalet de l'Alpette.

Les rapports entre la schistosité et la stratification sont d'autre part bien visibles à l'échelle des affleurements dans les ravines du revers est de l'arête sud de la Belle Étoile : ici l'on se trouve déjà dans le flanc ouest de l'anticlinal qui commence seulement à se renverser (très fort pendage des couches vers l'est). Une impression fallacieuse de plissotement y est donnée par le fait que l'on y voit des variations rapides du pendage : celles-ci correspondent en fait à la coexistence du litage stratigraphique, subvertical, et du feuilletage dû à la schistosité, qui est fort développée et pend au contraire faiblement vers l'est (comme il convient dans le flanc oriental d'un pli aussi déversé vers l'ouest).

Les ravins du versant sud-est de la Belle Étoile, en contrebas du sommet ,
vus du sud, depuis la Croix de Périllet

L'impression de plissotis affectant cette monotone succession de marno-calcaires du Crétacé inférieur, probablement valanginiens, est fallacieuse.

Elle résulte simplement de la coexistence d'une schistosité (s.1), faiblement pentée vers l'est, avec une stratification subverticale (s.0), que l'on ne distingue qu'occasionnellement.

On a délibérément photographié un secteur des pentes où la stratification est particulièrement bien visible, pour montrer, sur une hauteur d'environ 200 m., l'absence presque totale de plissotis et le caractère de simples ondulations peu accusées des rares présents (angle supérieur droit du cliché).

 

Vue rapprochée d'un affleurement, montrant les rapports schistosité - couches à la Croix de Périllet (extrémité sud de la partie rocheuse de la crête de la Belle Étoile).
Les mentions "haut" et "bas" concernent la disposition de la succession des couches (base à droite, c'est-à-dire couches les plus anciennes du côté est).

La schistosité (s.1), à espacement pluri-centimétrique, est omniprésente et d'une visibilité flagrante.
Elle pend faiblement vers l'est, conformément au fait que l'on est dans le flanc occidental de l'anticlinal de la Dent de Cons (flanc oriental du synclinal des Tamié).

Au contraire les limites de couches (s.0), alternativement plus calcaires et plus marneuses, sont très floues. Elles sont soulignées par une certaine réfraction de la schistosité, mais celle-ci est courbe et peu marquée , comme il est normal puisque les changements lithologiques sont modestes et progressifs, d'un banc plus calcaire à un lit plus marneux.

C/ Le versant est du chaînon est accidenté, au nord de la Belle Étoile par deux éperons faisant saillie vers l'est, qui culminent respectivement par les deux sommets secondaires du Roc Rouge et de la Pointe de la Sellive. Ils constituent deux arc-boutants en forme de chevrons que délimitent des falaises dessinant deux "V topographiques"* pointant vers l'amont et ils représentent à eux seuls ce que l'érosion a respecté du Tithonique du flanc oriental du synclinorium de Tamié. Cette forme de relief découle de ce que la pente du versant est à peine moins forte que le pendage des couches : là où les ravins ont réussi à percer la dalle tithonique celle-ci a été totalement enlevée sur une grande hauteur entre les éperons rocheux où elle est conservée (c'est-à-dire jusqu'à ce que les ravins traversent, en bas de pente, le tithonique de la charnière du pli).

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Le versant oriental du chaînon Belle-Étoile - Dent de Cons, vu d'avion, de l'est, depuis l'aplomb d'Albertville.
s.T = synclinal de Tamié : son plan axial est presque tangent à la pente topographique et son axe plonge doucement vers le nord (vers la droite) ; a.C = anticlinal de la Dent de Cons : l'essentiel de son flanc oriental est enlevé par l'érosion ; f.rR = faille du Roc Rouge ; f.Al = faille de l'Alpettaz ; f.G = faille du bas ravin du Chiriac, prolongeant la faille de La Goenne.
Les pentes de ce chaînon qui tombent en direction d'Albertville sont formées par la succession du flanc oriental du synclinal de Tamié, qui s'y montre modérément renversée. En effet le Tithonique pend dans l'ensemble conformément à la pente et s'appuie, du côté gauche, contre (et plutôt sur) les couches du Crétacé.
Il est découpé, par une érosion en V topographique qui est surtout le fait des ravins des Héris et du Chiriac, en deux forts chevrons qui pointent vers le haut des pentes (et qui en cachent l'arrière-plan).
Sous cet angle on distingue mal les replis mineurs (plis parasites*) qui affectent ces deux éperons de Tithonique (voir cliché suivant).


Dans ces éperons rocheux la dalle tithonique est d'ailleurs en position renversée à presque 45° ; mais on y observe un ploiement synforme qui redresse les couches à la verticale vers le sommet des deux pitons. A ce fait s'ajoute le basculement en flanc normal qui affecte, plus à l'ouest, sur la crête principale, le pendage du Valanginien et de l'Hauterivien pour montrer que la pente du versant suit à peu de chose près le plan axial d'un anticlinal de la Dent de Cons en n'ayant presque respecté que son flanc inverse : le flanc oriental ("normal") de ce pli constituait la partie du versant plus orientale de la montagne, que l'érosion a enlevé jusqu'à mettre à nu, entre Gilly-sur-Isère et Marthod, le Jurassique moyen des bas de pentes .

Le Tithonique qui arme ces chevrons est en outre affecté de replis assez spectaculaires, bien visibles à la faveur des entailles des ravins qui découpent ces chevrons : il s'agit de replis de second ordre affectant le flanc oriental, globalement renversé, du grand synclinal de Tamié. Ils se disposent conformément au schéma de la "feuille de chêne*" c'est-à-dire avec un déversement des replis anticlinaux vers la charnière de l'anticlinal majeur le plus proche, ici situé plus à l'Est mais totalement éventré par l'érosion.

 Cette différence entre la disposition des couches du Tithonique et celles du Crétacé, moins plissotées, est une autre illustration du phénomène de dysharmonie (que la structure de la Roche Torse illustre, plus au SW, de façon encore plus démonstrative).

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Les pentes orientale de la Belle Étoile, vu du sud, depuis les pentes inférieures de rive gauche de la vallée de l'Isère à proximité de Sainte-Hélène-sur-Isère. (N.B. la vue est prise presque dans l'enfilade des surfaces de couches mais l'effet de téléobjectif donne l'impression, inexacte, que les crêtes du Roc rouge et de la Sellive sont presque sur le même plan, alors que la première est très en avant-plan ).
s.T = synclinal de Tamié : chacune des deux crêtes secondaires donne une même coupe de la barre tithonique de son flanc inverse. Le schéma explicatif montre que chacune montre, vers le haut, l'ébauche la charnière de l'anticlinal qui faisait suite. ; il montre aussi que la dissymétrie du repli qui affecte le tithonique dans l'éperon saillant du Roc Rouge (et qui est décalé par un petit décrochement dextre transverse) est cohérente avec une interprétation en "repli de flanc inverse" (voir la page "plis en feuille de chêne").

En contrebas de ces éperons de Tithonique on voit se succéder, toujours avec des pendages sub-verticaux, les couches plus anciennes, depuis les Terres Noires qui donnent un talus à pente modérée jusqu'au Jurassique moyen qui forme les collines les plus proches d'Albertville (voir la page "Albertville").

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Le chaînon de la Dent de Cons, vu du nord-est, d'avion depuis l'aplomb d'Héry sur Ugine.
f.G = prolongement vraisemblable de la faille de La Goenne ; f.Al = faille de l'Alpettaz

Toutefois dans le versant est du sommet de la Dent de Cons et au pied nord de la Pointe de Sellive la succession des couches du flanc oriental du synclinal de Tamié se termine brutalement vers le bas : les différents niveaux sont successivement tranchés au pied des escarpements par une surface de contact avec les Terres Noires qui forment les pentes plus douces du bas versant. Cela vient de ce que la rupture de pente correspond au passage de la faille de l'Alpettaz : c'est une faille extensive à très faible pendage qui déplace son compartiment supérieur vers le sud (vers la gauche) : cette attitude et ce rejet sont très comparable à ceux des autres failles du faisceau du Charvin (voir la page "tectonique des Bornes"). En outre elle semble se terminer, comme elles, en se connectant au sein des Terres Noires à la faille majeure du faisceau de failles du Charvin (faille de La Goenne : voir la page "Ugine"). De fait, au sud du village de Mérier jusqu'à Gilly-sur-Isère, il semble bien que ce soit une cette cassure rectiligne, s'alignant dans le prolongement de cette faille, qui met en contact les Terres Noires avec le Bajocien le long du bas ravin du Chiriac.


 Si l'on compare la structure du versant méridional de la Trouée d'Ugine avec celle des pentes septentrionales de cette dernière (voir la page "Ugine") on y voit une similitude fondamentale qui est que les couches sont organisées en une succession stratigraphique normale à pendage vers l'ouest (ce qui correspond au flanc oriental du grand synclinal de Serraval) et qu'elles sont affectées d'ondulations d'axes presque N-S.

Coupe schématique composite montrant les rapports entre les structures observables de part et d'autre de la Trouée de Faverges - Ugine.
Cette construction et rendue possible par le fait que les axes de plis plongent vers le nord : de ce fait la coupe naturelle de la rive septentrionale montre des parties plus élevées de l'empilement structural.


Toutefois si l'on se penche sur le détail on constate que les plis qui s'observent de part et d'autre de la grande faille de la Goenne (faille principale du faisceau du Charvin) ne se correspondent pas ; en effet ils n'affectent pas les mêmes niveaux et surtout n'ont pas la même attitude : ils sont seulement déversés dans la lèvre occidentale alors qu'ils sont basculés (avec des têtes anticlinales plongeantes) du côté est.

Cette différence ne peut s'expliquer par le seul effet de l'abaissement de sa lèvre occidentale. Elle se comprend peut-être un peu mieux si l'on considère que le jeu de cette faille a dû comporter une composante de coulissement sénestre et qu'elle a, d'autre part, un azimut plus méridien que l'axe du synclinal de Serraval. De ce fait son jeu coulissant lui a fait juxtaposer des compartiments qui, avant ce jeu, ne se trouvaient pas à la même latitude. Sa lèvre orientale montre donc une partie originellement plus méridionale, donc plus distante du fond horizontal de ce grand synclinal : il est donc normal qu'elle ait été plus basculée par le plissement que la lèvre occidentale de la faille , plus proche du fond du synclinal.

 


cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuilles Annecy-Ugine et Albertville.

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Carte géologique très simplifiée des montagnes au sud de la Trouée de Faverges (groupe Sambuy - Cons)
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M.Gidon (1977), publication n° 074

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