Mont de la Coche, l'Encerclement |
Le chaînon de l'Arcalod se prolonge vers le sud par une longue crête qui culmine de nouveau avec le Mont de la Coche, depuis lequel se détache vers l'ouest une arête qui mène à la Croix d'Allant en fermant la dépression de Plan Mollard. À l'est de cette dernière la crête principale se poursuit par les rochers de l'Encerclement puis se termine en tombant par des abrupts boisés sur le cours amont du Chéran au rétrécissement du Nant Fourchu de Bellevaux. La lourde échine urgonienne du revers oriental de cette crête ferme du côté occidental le vallon d'Orgeval.
En fait cette échine est constituée par une demi-voûte, déjetée vers l'est et dont l'axe est doucement incliné vers le nord, qui est une antiforme* d'Urgonien renversé : il s'agit de la charnière supérieure qui affecte le flanc oriental du synclinal du Pécloz. Pour s'échapper de sa dépression d'alpages à substratum de marno-calcaires hauteriviens, le cours inférieur du torrent d'Orgeval contourne l'obstacle de cette carapace calcaire en suivant d'assez près la limite Urgonien - Hauterivien. Il se jette ensuite dans le Chéran qui, s'écoule de l'est vers l'ouest et tranche alors la barre urgonienne au Nant Fourchu.
Du côté occidental de la crête rocheuse qui se termine à la gorge de Bellevaux son versant ouest donne une splendide coupe naturelle du cœur de ce grand pli. Il est suffisament ouvert pour montrer, dans les basses pentes de Plan Mollard, un puissant coeur de Nummulitique (ce sont sans doute les affleurements les plus étendus de couches de cet âge dans les Bauges).
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Au dessus des abrupts boisés de rive droite du Chéran le flanc oriental du synclinal du Pécloz se tord à sa partie haute par une charnière secondaire qui le renverse presque complètement. Il forme alors un crêt d'Urgonien, sub-horizontal et à regard ouest sur près de 1 km, qui constitue le couronnement des pentes de Sénonien de l'Encerclement.
1 / Les pentes de Châtillon, brièvement orientées NW-SE au pied de la petite brèche 1759, révèlent quelques particularités stratigraphiques et tectoniques intéressantes à détailler. La première est la réduction puis la disparition, du sud vers le nord, du niveau apto-albien habituellement présent entre Sénonien et Urgonien. Mais à cela s'ajoutent des perturbations tectoniques qui aboutissent à un dispositif complexe, qui se fait d'abord remarquer, par un accident vertical qui détermine la petite brèche topographique cotée 1759 et que l'on peut désigner comme la faille de Châtillon.
On peut d'abord remarquer que cette faille de Châtillon matérialise la ligne de changement de pendage qui correspond au passage d'un partie inférieure du flanc de pli, sub-verticale, à une partie supérieure presque horizontale ; c'est-à-dire qu'elle coïncide avec la charnière supérieure du synclinal du Pécloz. Concernant l'Urgonien qu'elle affecte on s'aperçoit (voir les clichés d'ensemble, notamment celui du versant est) que dans la lèvre actuellement sud-orientale de la cassure (à droite en bas), la succession de ses couches se complète, sur environ 50 m d'épaisseur, par des strates encore plus récentes, qui sont absentes au NW. Mais l'observation attentive du versant est de la crête montre sans contestation possible que la faille s'amortit vers le nord pratiquement à la base de ces couches urgoniennes plus récentes, là où prend également naissance la surface de chevauchement inversé "ØE".
En ce qui concerne leurs autres rapports tectoniques les deux lèvres ont déjà une disposition assez différente en ceci que les couches sont simplement basculées au delà de la verticale dans la lèvre orientale. Au contraire dans la lèvre occidentale elles rompues en chevauchements dans l'Urgonien et plissées dans le Sénonien inférieur, d'ailleurs avec un même sens de cisaillement, le haut vers l'est par rapport au bas.
Ces déformations tectoniques peuvent être attribuées en premier eu à des effets "locaux". Ils consistent en un serrage par fermeture des machoires urgoniennes sur le cœur sénonien de la charnière : le raccourcissement induit dans la lèvre occidentale est en premier lieu à l'origine du déplacement, par des glissements banc sur banc, de la tranche stratigraphiquement la plus haute de l'Urgonien de la lèvre ouest (le principal des ces mouvements étant celui noté "ØE"). En second lieu ce raccourcissement est à l'origine du plissotement de la série litée des bancs sénoniens. A cela s'ajoute une déformation "ambiante", due à la formation du grand synclinal du Pécloz : comme classique dans les plis par flexion concentrique des couches, elle consiste en un cisaillement de l'extrados tendant à déplacer ces dernières en direction de la charnière : conformément à ce schéma il s'agit ici d'un cisaillement vers la gauche du bas par rapport au haut de la falaise (voir aussi, plus haut, la figure de l'ensemble du versant ouest). |
D'autre part, à la brèche même, la limite entre Urgonien et Sénonien est située plus bas (d'une grosse dizaine de mètres) dans la lèvre orientale ; en outre les couches les plus anciennes du Sénonien occidental se tordent de façon à y être plaquées sur le mur vertical qui limite l'Urgonien de la lèvre est. Compte tenu de l'inexistence d'une cassure prolongeant cette dénivellation dans les couches urgoniennes situées quelques dizaines de mètres en amont et en arrière de la brèche (voir plus haut) on aboutit à la conclusion que l'on observe là une ancienne petite falaise, au pied d'une pente qui coupait les bancs urgoniens selon un angle beaucoup plus faible. Or c'est ce dispositif qui a dû être à l'origine (lors du serrage dû à la formation du pli local) du petit chevauchement de l'Encerclement.
C'est donc là un paléorelief qui a été "cacheté" par la sédimentation du Sénonien avant de subir les effets du plissement (voir, plus loin, le schéma explicatif général). Sa présence amène d'ailleurs à présumer que c'est cette disposition topographique elle-même qui a été à l'origine de la localisation, à cet emplacement, de la flexion de la dalle urgonienne, par l'amoindrissement de son épaisseur qui y a induit une faiblesse des résistance à la torsion.
2 / Le Mont de la Coche est le point culminant septentrional de cette extrémité sud du chaînon de l'Arcalod. Ce petit sommet se repère aisément par sa forme caractéristique en pyramide conique garnie d'alpage, due à ce qu'il est formé de calcaires lités du Sénonien. La crête rocheuse urgonienne de l'Encerclement se termine au pied sud de la pyramide herbeuse, en butant contre une faille du Mont de La Coche, dont l'existence et le jeu post-Nummulitique sont évidents mais dont l'interprétation l'est beaucoup moins.
La partie de cette faille visible ici, sur le versant ouest de la montagne, est pentée vers le nord-ouest ; l'angle que fait son pendage vis-à-vis de celui des couches porterait a priori à y voir une faille extensive mais la polarité inversée des couches urgoniennes de sa lèvre sud (inférieure) semble s'y opposer. En fait cette dernière impose de considérer que la faille a joué avant le renversement des couches qu'elle affecte. Comme l'on se trouve ici à la transition entre flanc ouest de l'anticlinal d'Orisan et flanc oriental du synclinal du Pécloz) cela implique un basculement d'un peu plus de 90° autour d'un axe N-S, c'est-à-dire un pendage originel de l'ordre de 45° vers le NE. D'autre part l'examen attentif de la partie supérieure de la lèvre sud-orientale de la faille montre que les premières couches du Sénonien sont plaquées en accordance sur la surface qui tranche les bancs urgoniens presque orthogonalement. En outre cette surface ne présente pas les caractères d'une fracture mais plutôt celle d'un repos stratigraphique très discordant. Ce fait conduit à envisager que l'origine de cette cassure soit syn-sédimentaire, due à une extension d'âge sénonien, puis que les premières couches qui se sont sédimentées en on-lap sur la surface de cassure mise à nu sont apparemment sénoniennes supérieures. Postérieurement le prisme sédimentaire de la lèvre septentrionale a dû rejouer en tassement comme en témoigne la faille bien définie qui affecte les couches nummulitiques dans le secteur du lieu-dit Les Gorges. Les observations fournies par le versant septentrional de la montagne de La Coche apportent en outre confirmation des caractères particuliers de cette cassure (voir la page "Orgeval"). Il est peu plausible de mettre en rapport le fonctionnement de cette faille avec la formation, plus au sud dans le secteur de l'Encerclement, d'accidents syn-sédimentaires affectant le sommet de l'Urgonien (voir les premiers clichés de la présente page) car ils datent d'une époque plus précoce. Tout au plus peut-on envisager qu'elles sont peut-être le témoignage d'un soulèvement qui a préludé au le jeu extensif de la faille sénonienne. |
En définitive la déformation entraînée par le renversement de la partie supérieure du flanc oriental du synclinal du Pécloz a induit des accidents de détail d'une complexité assez spectaculaire.
Ceux-ci s'avèrent relever de phénomènes syn-sédimentaires comportant d'abord la création, par une érosion anté-albienne, d'une paléopente de la surface de l'Urgonien originellement inclinée vers l'est, laquelle a ensuite reçu la sédimentation sénonienne. À ceci s'ajoute le jeu de deux paléofailles extensives à lèvres orientales abaissées, celle de Châtillon et celle du Mont de la Coche.
- La première ne décale que modestement, de quelques dizaines de mètres, la surface supérieure de l'Urgonien et il n'est pas possible de savoir si elle affecte le Nummulitique (quoi qu'il en soit c'est l'antériorité de son jeu par rapport au plissement qui a induit les complications de ses abords).
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La seconde a un rejet beaucoup plus important (plusieurs centaines de mètres) et semble avoir fonctionné en deux temps, d'abord pendant le dépôt du Sénonien supérieur puis de nouveau après le Nummulitique.
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3 / Le versant occidental du Mont de la Coche, entre ce sommet et l'échine NE-SW du Plan de la Limace (qui s'abaisse jusqu'aux chalets du Chargieu), est un secteur assez complexe car on y voit interférer plusieurs grandes structures de nature bien différente.
En effet sa pente est d'abord traversée, au collet nord de la Coche (entre le sommet et le piton 2035), par un accident majeur, le décrochement
de Saint-Reine. Cette cassure
tranche d'abord, un peu plus bas la faille du Mont de la Coche et ceci avec la plus grande netteté (son tracé rectiligne y est soulignée par une ligne herbeuse, donc humide, de largeur pluri-métrique). Elle y met là, dans le prolongement l'un de l'autre, au NW l'Urgonien
de l'Arcalod à l'endroit (flanc ouest du synclinal du Pécloz) avec, au SE, le Sénonien à l'envers,
du flanc est de ce même pli. Le rejet correspondant, à la fois dextre et vertical est de l'ordre de 1000 m !.
Enfin plus bas et plus à l'ouest la crête qui rejoint l'antécime cotée 2035 à la bosse 1836 du Plan de la Limace est traversée par une importante faille N-S qui y détermine le Passage de Plan Mollard. Il s'agit de la faille d'Arcalod, dont le tracé est suivi vers le sud par le ravin de Plan Mollard jusqu'à l'endroit où ce dernier est traversé par le décrochement de Sainte-Reine.
Ces deux failles convergent donc vers le bas du versant mais il est clair que le décrochement
de Sainte-Reine tranche la faille de l'Arcalod sans être affecté par elle (il est donc plus récent). Il interrompt même son tracé et le décale cartographiquement de plus de 3 km vers le SE, puisqu'il faut, pour le retrouver, se porter en rive opposée du Chéran, au voisinage de l'extrémité septentrionale de la falaise de l'Arclusaz.
Dans les pentes inférieures de la montagne, entre Jarsy et les chalets du Chargieu (voir aussi la page "Ecole"), la structure est plus simple.
Les prairies du Coudray (immédiatement à l'est de Jarsy) cachent, sous des dépôts glaciaires, le Berriasien du coeur du synclinal du Trélod. Puis les pentes boisées qui s'élèvent en direction de la Croix d'Allant sont installées sur les dalles du Jurassique supérieur du flanc oriental de ce pli. Enfin, sur l'échine qui s'élève depuis le Chargieu jusqu'au Plan de La Limace et au Passage de Plan Mollard, les couches du Jurassique supérieur dessinent plusieurs replis : ils représentent les ondulations de l'anticlinorium de Chérel (prolongement septentrional de celui du col du Frêne).
Plus au sud, la coupe que donne d'aval en amont le cours du Chéran montre d'abord ces mêmes replis aux alentours du hameau de Carlet. Mais plus en amont, au niveau du débouché du vallon de Très-Roche, ils y sont recoupés par le passage du décrochement de Saint-Reine : ce dernier y fait buter l'Urgonien du coeur du synclinal de l'Arclusaz proprement dit (dont le plan axial est pratiquement vertical : voir la page "Arclusaz") contre ces couches jurassiques du flanc ouest de l'anticlinal de Chérel qui affleurent du côté nord-ouest.
Plus en amont encore, dans la gorge WE de Bellevaux (= du Nant Fourchu) c'est le Sénonien du fond du vaste synclinal du Pécloz qui affleure sur près de 3 km. Ceci est dû à ce que, dans cette partie où il s'enchaîne au synclinal de L'Arclusaz, ce flanc ouest du pli est très peu incliné. Dans cet intervalle il est affecté, peu à l'est du hameau de Rière Bellevaux, par une faille compressive qui est sans doute due au serrage provoqué par la fermeture du pli car sa vergence ouest est en accord avec le sens des cisaillements qui ont dû être induits par celle-ci dans ce flanc du synclinal du Pécloz. |
Aperçu global sur les Bauges orientales |
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légende des couleurs (nouvelle fenêtre)
Carte géologique très simplifiée
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble
des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°",
par M.Gidon (1977), publication n° 07
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École | LOCALITÉS VOISINES | Orgeval |
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Mont de la Coche |
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