Le Grésivaudan

et le rebord subalpin de la Chartreuse

Entre Grenoble et Montmélian, la vallée de l'Isère est dénommée Grésivaudan. Ce n'est qu'un tronçon du sillon subalpin, qui se poursuit vers le nord jusqu'à Albertville par la Combe de Savoie et vers le sud-est par le Trièves et le Champsaur avant de rejoindre le sillon de Gap.


Vue d'ensemble du rebord subalpin chartreux et des deux rives du Grésivaudan, prise du sud-est, depuis le sommet du Grand Serre.
En premier plan, l'extrémité méridionale du massif cristallin de Belledonne s'abaisse doucement vers le sud-ouest pour s'enfoncer sous sa couverture sédimentaire (il disparaît ainsi sous le massif du Vercors).

C'est un vaste couloir dont le fond plat correspond au colmatage alluvial d'une typique combe monoclinale bien caractérisée. Cette dernière a été ouverte par l'affouillement des Terres Noires du Jurassique supérieur, pour la raison évidente que celles-ci représentent la formation la plus "tendre" de toutes celles qui affleurent entre le massif cristallin de Belledonne et la Chartreuse (voir la coupe générale).

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Le couloir du Grésivaudan, entre la Chartreuse et la chaîne de Belledonne, vu du SW, depuis un avion de ligne, vers l'altitude de 8000 m.
La limite entre les collines bordières et la plaine alluviale du Grésivaudan dessine une courbe relativement pure. Ce tracé résulte surtout du calibrage de ce versant de la vallée par le passage des glaciers quaternaires, à la faveur du fait que la nature des roches y est peu diversifiée. Il ne s'agit pas là d'une surface structurale. En effet cette surface courbe recoupe les plis des collines bordières (que leur inclinaison axiale fait en outre plonger tour à tour, du sud au nord, sous la plaine alluviale).
On distingue, au sud de Domène, un des nombreux méandres que décrit l'Isère dans sa plaine alluviale de colmatage fluvio-lacustre.

Aucune intervention de la tectonique n'est nécessaire pour expliquer le tracé du Grésivaudan. Les quelques tentatives faites en ce sens (basées avant tout sur le postulat implicite que toute vallée serait dirigée par un accident tectonique) se révèlent d'ailleurs dénuées de fondements crédibles.

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Le Grésivaudan et son versant oriental (pentes de Belledonne), vus depuis le sommet de la Dent de Crolles.
acc.méd. = accident médian ; s.pa = surface de la pénéplaine anté-triasique (limite entre socle cristallin et couverture sédimentaire).
Les crêtes plus neigeuses du massif des Grandes Rousses pointent, au centre, par dessus l'entaille du Pas de La Coche.
version plus grande, sans indications géologiques

Cette "combe monoclinale" du Grésivaudan, sans doute ouverte originellement par l'érosion fluviatile, a évidemment été fortement aménagée par le passage des glaciers quaternaires. La langue glaciaire qui l'a parcourue alors y a occasionné un "surcreusement" qui est allé jusqu'à des profondeurs de plusieurs centaines de mètres sous le niveau du colmatage alluvial actuel. Puis la vallée a été remplie par un lac lorsque les dernières langues glaciaires ont fondu, il y a environ 10.000 ans. Ce lac est maintenant totalement comblé d'alluvions fluvio-lacustres, souvent limoneuses.

Une image approximative de l'aspect de la vallée du Grésivaudan à l'époque du maximum de la dernière glaciation (de Würm) (vue prise en direction du nord, depuis la Croix de Chamrousse).
L'image du sommet du remplissage de la vallée par la glace est donnée par la "mer de nuages" qui occupe souvent cette vallée par temps froid anticyclonique : le plafond des nuages de flanc de pente s'élevait, ce jour là, à1200 m, ce qui est de très peu inférieur au niveau qu'atteignait la surface du glacier isérois il y a quelques 40.000 ans.


Du côté sud-oriental le Grésivaudan est séparé de la chaîne de Belledonne par une ligne de reliefs boisés, que les géologues qualifient de "collines bordières". Elles sont formées par le Jurassique moyen, qui est resté en saillie parce que ce niveau est plus riche en bancs calcaires que les Terres Noires.

Plus de détails sur les collines bordières de la chaîne de Belledonne : voir les pages "Collines bordières de Belledonne", "Collines bordières d'Allevard", "La Rochette", "Allevard", "Theys", "Les Adrets", "Saint-Mury", "Domène", "Gières".

Du côté nord-occidental le Grésivaudan est dominé par les pentes les plus orientales de la Chartreuse, qui constituent le "rebord subalpin". Il s'agit d'un talus abrupt et haut de plus de 1500 m en moyenne, puisque son sommet culmine aux alentours de 2000 m alors que la plaine alluviale de l'Isère ne dépasse pas l'altitude de 250 m. Il est constitué par la tranche d'un empilement de couches qui va, de bas en haut, du Jurassique supérieur (Terres Noires) au sommet du Crétacé inférieur (Urgonien).

Plus de détails sur le rebord subalpin chartreux, au nord de Saint-Ismier : voir les pages "Petites Roches", "La Flachère", "Chapareillan".

- Au sud de Saint-Ismier c'est la corniche du Tithonique qui arme la ligne de crête, laquelle court par Les Grands Crêts jusqu'au Saint-Eynard, puis reprend au delà du col de Vence jusqu'à La Bastille (Grenoble).

Le décalage du rebord subalpin au niveau du col de Vence correspond à la torsion de la corniche tithonique par l'enchaînement des deux plis que sont le synclinal du Sappey et l'anticlinal de l'Écoutoux, lesquels sont tranchés obliquement. Un second décalage (aux conséquences plus importantes sur le relief) se produit à Saint-Ismier : il correspond au sectionnement, également en oblique par rapport à à leurs axes de l'anticlinal de Parquelin et du synclinal de la Chartreuse orientale.

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Le rebord subalpin aux abords nord de Grenoble, vu du sud, de l'aplomb de Saint-Martin-d'Hères.
Les tirets gris correspondent au tracé de l'intersection des plans axiaux avec la surface topographique ; leur convergence apparente vers le nord est un pur effet de perspective. Par contre on voit clairement que ces plis sont coupés en biais par le rebord subalpin.

- Au nord de Saint-Ismier, jusqu'à Chapareillan, deux lignes de falaises presque continues soulignent le rebord subalpin, celle de l'Urgonien et celle du Tithonique : la corniche urgonienne, qui culmine tout du long aux abords de la cote 2000, est alors continue depuis le sommet de la Dent de Crolles jusqu'à celui du Granier.

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Le Grésivaudan vu du nord-est, d'avion, depuis l'aplomb de Saint-Pierre d'Allevard.
Les limites des formations quaternaires (notamment alluvions glaciaires) ne sont tracées que très approximativement

Que ce soit au nord ou au sud de Saint-Ismier le tracé de ce rebord, comme celui du Grésivaudan dans son ensemble, est tout à fait parallèle à l'axe faîtier de la chaîne de Belledonne. Il est par contre oblique aux plis de la Chartreuse orientale, qui viennent successivement, du nord vers le sud, s'y faire trancher en biseau (c'est ce qui occasionne les deux décalages qui affectent la ligne de crête du rebord subalpin).


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Relations géométriques entre le Grésivaudan et les plis et décrochements de la Chartreuse orientale (schéma perspectif).
Le cisaillement dextre exprimé par le fonctionnement des décrochements (demi-flèches de taille moyenne) est (hypothétiquement) attribué à un coulissement relatif de la chaîne de Belledonne par rapport à la partie occidentale du massif de la Chartreuse (très grandes demi-flèches). Un tel coulissement implique, du fait de son obliquité par rapport aux axes des plis, une composante de déplacement relatif vers l'ouest du massif cristallin sous sa couverture.
Le schéma en cartouche montre que l'origine du rejet vertical occasionné secondairement par les décrochements est due à l'inclinaison vers l'ouest du vecteur déplacement. Cette inclinaison serait due à ce que les décrochements seraient associés à un mouvement relatif de la couverture par rapport au socle, parallèlement à la surface de ce dernier. C'est ce mouvement qui serait également responsable du cisaillement en rétroverse (symbolisé par les plus petites demi-flèches) qui affecte les plis aux approches du massif cristallin.
Pour plus de développements consulter la publication142

Cette disposition résulte de ce que les plis de Chartreuse sont moins méridiens (de près de 35°) que l'axe de la chaîne de Belledonne. L'origine de cette obliquité est à rechercher simplement dans le fait (étayé par de multiples arguments) que ces plis étaient déjà formés avant le soulèvement de Belledonne, ce dernier n'étant intervenu qu'ensuite pour basculer leurs axes.

version plus grande de cette image

 Relations entre le creusement du Grésivaudan et la formation des reliefs de Chartreuse et de Belledonne.
(le nord est à gauche et l'allongement du bloc est perpendiculaire à celui de la chaîne de Belledonne)

 

Ce schéma fait appel à l'intervention d'une première phase d'érosion, aboutissant à un aplanissement. Celle-ci est sans doute intervenue au Quaternaire ancien, en tous cas après le soulèvement de Belledonne et avant le creusement du réseau hydrographique actuel.
Dans les deux étapes de gauche on a omis délibérément de représenter les dépôts molassiques miocènes, qui auraient masqué la structuration du mésozoïque (et dont on ignore jusqu'où ils s'étaient avancés en direction de l'est).

  Contrairement à ce que certains avaient imaginé, les plis des massifs subalpins septentrionaux ne peuvent donc avoir été créés par le glissement des couches sur la pente du socle cristallin en soulèvement. De fait, au sud de Vizille, là où la couverture sédimentaire de la chaîne de Belledonne n'est pas érodée, on voit ces plis se poursuivre vers le sud-est, en franchissant la voûte de la chaîne (c'est aussi ce que font les plis du Vercors). Ces plis ne se disposent pas non plus d'une façon telle qu'ils aient pu être créés par un déplacement du socle cristallin de Belledonne vers le nord-ouest, hypothèse que de nombreux autres arguments viennent réfuter (voir les pages "chevauchement des massifs cristallins externes" et "tectonique des chaînes subalpines septentrionales").

 


compléments sur le Rebord subalpin

 Carte géologique simplifiée de la Chartreuse orientale aux alentours de Saint-Pierre-d'Entremont.
(fond topographique d'après la carte IGN au 1/100.000°)

carte cliquer sur les imagettes Légende

 Carte géologique simplifiée de la Chartreuse orientale aux alentours de la Dent de Crolles.
(fond topographique d'après la carte IGN au 1/100.000°)

carte cliquer sur les imagettes Légende

 Carte géologique simplifiée des montagnes au NE de Grenoble (côté Grésivaudan)
(fond topographique d'après la carte IGN au 1/100.000°)

carte cliquer sur les imagettes Légende

cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuilles Grenoble, Domène et Montmélian

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(combe de Savoie)
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